tout le monde n’est pas en chanté« YMCA », l’hymne gay non assumé qui fera danser l’investiture de Trump

Investiture de Trump : « YMCA », l’hymne gay non assumé qui fera danser les républicains

tout le monde n’est pas en chantéCe lundi, le groupe qui s’est construit sur l’imagerie homo participera à l’investiture de Donald Trump. Le tout alors que la communauté LGBT s’inquiète de la remise en cause de ses droits par le nouveau locataire de la Maison-Blanche
Fabien Randanne

Fabien Randanne

L'essentiel

  • La cérémonie d’investiture de Donald Trump se tient ce lundi à Washington.
  • Parmi les artistes conviés aux festivités, les Village People devraient chanter « YMCA ».
  • Ce tube, considéré par beaucoup comme un hymne gay, résonnera de manière singulière à l’heure où la communauté LGBT aux Etats-Unis s’inquiète pour la préservation de ses droits.

Ce lundi, les Village People se produiront dans le cadre de l’investiture de Donald Trump à la Maison-Blanche. « Nous savons que cela fera des mécontents, mais nous pensons que la musique doit vivre sans considération politique », a déclaré la semaine passée, via sa page Facebook, le cofondateur du groupe, Victor Willis.

Si celui qui apparaît vêtu en policier au sein des Village People décrète que la musique serait apolitique, il n’en demeure pas moins que la participation du groupe disco, qui a construit son succès en utilisant codes et imageries gays, pose question à l’heure où nombre de personnes LGBT états-uniennes s’inquiètent de voir leurs droits remis en cause par le nouveau président.

En décembre, Donald Trump a ainsi annoncé vouloir stopper « le délire transgenre » dès son investiture. « Je signerai des décrets pour mettre fin aux mutilations sexuelles des enfants, exclure les transgenres de l’armée et les exclure des écoles primaires, des collèges et des lycées », a-t-il dit. Dans un contexte où les paniques morales visant la communauté LGBT s’intensifient et où Meta vient d’expliquer qu’il est désormais possible de dire sur Facebook, Instagram et Threads, sans être inquiété par la législation états-unienne, que « les homosexuels sont des malades mentaux », les personnes gays, lesbiennes, bi et trans redoutent le pire.

« YMCA » a rythmé les meetings de Trump

Que les Village People soient de la partie à l’investiture pour y chanter YMCA ce lundi n’est donc pas anecdotique. Leur tube de 1978 a été largement utilisé lors des meetings de Donald Trump, il y a donc une certaine logique à leur présence. D’autant plus que ce trouble mélange des styles illustre bien le destin ambigu de la perception de la chanson.

Lorsqu’elle est sortie, à la fin des années 1970, elle est devenue un hymne gay instantané. Le groupe, dont le nom fait allusion à Greenwich Village, le quartier homo new-yorkais, s’adresse avec succès au plus grand nombre. Mais il ne cache pas et n’économise pas ses clins d’œil à la communauté gay.

Policier, marin, cow-boy… Les membres du groupe incarnent chacun un stéréotype de la masculinité et une figure de l’imaginaire érotique, pour ne pas dire porno, des homosexuels. Sous les boules à facettes apparaît alors une galerie de personnages fétichisés qui jusque-là ne se révélaient comme tels que dans la confidentialité de la contre-culture, à commencer par les œuvres de Tom of Finland…

L’album sur lequel figure YMCA s’intitule Cruisin', autrement dit « la drague » en argot homo, mais aussi « faire une croisière », selon son sens premier. Qui pouvait être dupe que le disque ne parlait pas de voyage en bateau ?

« You can hang out with all the boys »

Victor Willis, peut être. En décembre, sur Facebook, il clamait que YMCA n’était pas un hymne gay. « Comme je l’ai déjà dit, c’est une fausse supposition qui vient du fait que mon coauteur était gay, de même que certains membres de Village People (mais pas tous) ».

La chanson parle de la Young Men’s Christian Association, un mouvement permettant aux jeunes hommes qui en étaient membres, de partager, entre autres, des activités sportives, mais aussi des repas ou trouver un hébergement peu onéreux. Victor Willis assure avoir simplement parlé de sa propre expérience en écrivant le texte. Et n’a semble-t-il pas compris le double sens des paroles assurément évident pour Jacques Morali, son coauteur homo.

« It’s fun to stay at the YMCA, they have everything for men to enjoy, you can hang out with all the boys », autrement dit « C’est amusant d’être au YMCA, il y a tout pour que les jeunes hommes aient du bon temps, tu peux passer un moment en compagnie de tous les gars »…

Victor Willis a assuré qu’il ignorait que les YMCA étaient aussi un lieu de rencontres homosexuelles… Et il a prévenu aussi que, « dès janvier 2015 », il poursuivrait en justice, « tous les organes de presses […] présentant YMCA comme un hymne gay ». Oups…

Retournement de veste

Dans le même temps, il précisait ne pas être « dérangé » par le fait que « des gays considèrent cette chanson comme leur hymne ». Le signe d’une irritation à degré variable. Ou d’une boussole idéologique mal réglée. Après tout, dans son post Facebook de la semaine passée, Victor Willis disait espérer que YMCA puisse « rassembler le pays après une campagne tumultueuse et divisée au cours de laquelle notre candidate favorite a perdu ». Après avoir voté pour la démocrate Kamala Harris, les Village People iront donc chanter pour le républicain Donald Trump. C’est ce qu’on appelle la versatilité ou du retournement de veste.

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D’ailleurs, en 2020, Victor Willis avait exigé d’interdire l’utilisation de YMCA dans les meetings de Trump et avait finalement abandonné les poursuites, se rendant compte qu’il y avait un profit à en tirer. « Depuis, il est estimé que la chanson a généré plusieurs millions de dollars », a-t-il lui même révélé.