Chez Netflix, une volonté de « normaliser » la diversité devant et derrière l’écran
le changement, c’est maintenant•Nawell Madani, Omar Sy, Jean-Pascal Zadi… Connue pour sa volonté d’inclusivité aux Etats-Unis, la plateforme américaine Netflix fait la part belle aux minorités dans ses productions françaises à succèsO.O
L'essentiel
- Nawell Madani, Jean-Pascal Zadi, Omar Sy. Connue pour sa volonté d’inclusivité aux Etats-Unis, la plateforme américaine Netflix fait la part belle aux minorités dans ses productions françaises à succès.
- Dix ans après son implantation en France, Netflix dépoussière-t-elle les pratiques, tout en bouleversant l’ordre établi ?
- Pour Marie-Lou Dulac, fondatrice de DIRE & Dire, une agence de conseil en diversité et inclusion, l’entreprise a mis en place des bonnes pratiques, même si du chemin reste encore à accomplir.
Une allocution télévisée aux allures de programme télé. Dans le nouveau spot publicitaire de Netflix, on croise Nawell Madani, Alban Lenoir, SCH, mais aussi le jeune Bakary Diombera (Banlieusards 2). Une troupe emmenée par Stéphane Blé, président de la République de la série En Place joué par Jean-Pascal Zadi. Ces têtes d’affiche et étoiles montantes représentent aussi bien des acteurs incarnant les minorités que les plus gros succès en France de la plateforme américaine.
Au point de se demander si, dix ans après son arrivée dans l’Hexagone, Netflix a dépoussiéré les pratiques tout en bouleversant les castings ? « C’est une entreprise qui a mis l’inclusion au cœur de son identité, dans ses effectifs et dans ses productions, répond d’emblée Marie-Lou Dulac, fondatrice de DIRE & Dire, agence de conseil en diversité et inclusion. Aux Etats-Unis, une personne sur deux dans leur équipe est une femme, beaucoup sont en position de management. Avec des équipes plus diversifiées, les créations s’en ressentent. »
Deux objectifs : l’inclusion et la segmentation
En France, en raison de l’absence de statistiques ethniques, il est plus difficile de palper réellement le changement. En juillet 2023, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), dans son étude sur la représentation de la société française dans les médias, a relevé que les téléspectateurs plébiscitaient la diversité présentée par les plateformes à l’écran avec plus de 40 % de personnes perçues comme non blanches, dont plus d’un tiers (37 %) ne sont pas assignées à des rôles négatifs (37 %).
Pour parvenir à modeler sa stratégie, Netflix entretient deux objectifs, parfois contradictoires : l’inclusion et la segmentation. « Dans la société américaine, il y a un marketing multiculturel, par exemple dans la cosmétique ou dans le divertissement, avec des chaînes dédiées aux communautés. Netflix veut à la fois s’inscrire dans cette tendance, tout en s’adressant aussi aux personnes blanches, juge Marie-Lou Dulac. L’idée, c’est de normaliser la diversité. Même si on est un spectateur blanc, on peut apprécier Lupin. »
Des progrès mais du chemin à accomplir
Davantage d’inclusions de personnages issus de minorité, création d’un fonds pour l’égalité des chances permettant de soutenir les communautés sous-représentées à l’écran à raison de 100 millions de dollars sur cinq ans… Selon l’institut USC Annenberg, qui collabore avec la plateforme pour évaluer sa politique en matière d'inclusion, 55 % des rôles principaux des séries et films Netflix entre 2018 et 2021 ont été confiés à une femme, et près de la moitié (47 %) des rôles principaux en 2020-2021 ont été attribués à un groupe ethnique sous-représenté.
Une volonté qui transpire dans le dernier spot de la plateforme. Une source proche du tournage indique ainsi à 20 Minutes « avoir voulu représenter la France à travers ses différentes facettes, et dans sa diversité géographique, culturelle ». Mais, même si le succès de la plateforme pousse d’autres acteurs des milieux de la télé et du cinéma à adopter de bonnes pratiques, les données concernant les minorités sont loin d’être « délirantes », rappelle Marie-Lou Dulac, en insistant sur le chemin qu’il reste à accomplir.
Exemple parlant : les musulmans représentent un quart de la population mondiale, mais ne sont représentés que par à peine plus de 1 % de personnages dans les séries télévisées populaires, relevait l’USC Annenberg en 2022. « On n’a pas fini d’imaginer la France », résume la plateforme pour clore la bande-annonce. On confirme, le chantier est en cours.
À lire aussi