Coronavirus : Quand retournera-t-on aux concerts comme « avant » ?
LIVE•A partir du mercredi 30 juin, les concerts pourront reprendre sans jauge et avec du public debout, à quelques détails prèsCapucine Olinger
L'essentiel
- Les concerts en intérieur peuvent reprendre à 75 % de leur capacité d’accueil.
- Les organisateurs de concert s’interrogent sur le retour du public, avec la question de l’adoption du pass sanitaire.
- Par ailleurs, la planification des tournées à l’automne reste une équation à plusieurs inconnues.
Les concerts en intérieur peuvent reprendre à 75 % de leur capacité d’accueil. Pour les salles accueillant moins de 1 000 personnes, le public devra obligatoirement porter un masque. Dans les salles accueillant plus de 1 000 personnes, le port du masque ne sera plus obligatoire mais un pass sanitaire sera exigé à l’entrée.
Si ces annonces sont plutôt une bonne nouvelle et présagent un retour vers la « vie d’avant », des inquiétudes persistent côté organisateurs. En effet, le pass sanitaire serait un frein à la vente de billets. Tous constatent que la plupart des festivals de l’été ne sont pas complets, certains n’auraient pas vendu la moitié des entrées…
Le public réticent face au pass sanitaire
Selon le producteur Matthieu Drouot (Gérard Drouot productions), « le public reste inquiet, il n’a pas forcément peur du virus, mais plutôt de ne pas pouvoir être remboursé. Sur les nombreux concerts qui ont dû être annulés en 2020, de nombreuses personnes ont eu du mal à se faire rembourser leurs billets. La réserve d’un pass sanitaire valide pour pouvoir rentrer dans la salle est donc trop incertaine pour certains, qui ne souhaitent probablement pas prendre ce risque. Par ailleurs, nous constatons que les gens ne comprennent pas cette distinction pour le spectacle vivant, alors qu’il ne faut pas de pass sanitaire pour des rassemblements religieux, politiques ou associatifs par exemple. Les gens se tournent vers d’autres loisirs ou des soirées privées. »
Selon lui, l’effet pass sanitaire s’est concrètement ressenti pour les Nuits de Fourvière (Lyon) : « En mai nous avons vendu les 1 500 places le jour de l’ouverture de la billetterie. En juin, nous avons pu rajouter 1 500 places supplémentaires suite aux nouvelles réglementations, avec la condition d’un pass sanitaire valide, et là nous n’avons vendu que 600 places. »
Situation d’attente
Selon le tourneur Guillaume Benfeghoul (Allo Floride), « les gens sont du coup dans une logique de dernière minute, à savoir qu’ils font d’abord leur test et achètent leur place ensuite » ce qui complique les perspectives de visibilité en amont pour les organisateurs. Les festivals qui ont débuté fin juin et qui se tiendront jusqu’en septembre vont essuyer les plâtres, avant la reprise des concerts en salle et des tournées de l’automne 2021. Les professionnels du secteur attendent les premiers concerts en salle qui se tiendront ce week-end pour se faire une idée, et espèrent qu’il n’y aura pas trop d’absentéisme dans les grandes salles.
De leur côté, les artistes sont très excités à l’idée de retrouver leur public et se réjouissent de retourner sur les routes, même s’ils ont parfois du mal à saisir pourquoi il n’est pas physiquement au rendez-vous. Mais les retrouvailles « se font souvent avec beaucoup d’émotion, comme ce fut le cas pour Jeanne Added au Printemps de Bourge » nous confie Joran Le Corre, tourneur et directeur artistique (Wart Music).
De manière générale, les organisateurs restent confiants quant à la tenue des concerts en salle et des tournées à venir, même si la situation sanitaire et l’évolution de variants laissent planer des doutes.
Un nombre de concerts divisé par sept
La reprise des concerts à la rentrée s’organise, même si beaucoup de spectacles ont déjà été reportés à 2022, voire à 2023. C’est notamment le cas des artistes internationaux puisque les contraintes sanitaires et de quarantaines diffèrent dans chaque pays, ce qui rend complexe l’organisation d’une tournée. La tournée d’adieu d’Elton John, reportée à octobre 2021 à Paris, aura, elle, normalement lieu sans problème, nous précise Matthieu Drouot, pour qui la non-prolongation de l’état d’urgence au-delà du 30 septembre serait un soulagement.
La reprogrammation et les reports peuvent être un véritable casse-tête. Pour Guillaume Benfeghoul, « tout se fait au cas par cas et artiste par artiste. Les nouvelles mesures ont été soudaines, on s’adapte et nous attendons de voir ce que la rentrée va donner par rapport à l’épidémie, nous misons plutôt sur 2022. Nous échangeons avec les artistes pour essayer de trouver les meilleures dates en fonction aussi de leurs actualités. Nous avons actuellement une trentaine de spectacles prévus pour les prochains mois, contre plus de 200 en temps normal. »
2022 promet d’être chargée
Tous ces reports posent aussi la question des disponibilités des salles : Ne va-t-il pas y avoir un embouteillage si tous les concerts reprennent en même temps en 2022 ? Va-t-on voir une offre démesurée de spectacles dans les mois à venir ?
Tous les organisateurs de concerts et salles de spectacles contactées nous confient que c’est le cas. Surtout dans les salles parisiennes comme La Cigale, L’Olympia, Le Trianon, contrairement à des Zéniths dans des villes comme Saint-Etienne ou Pau qui ont encore des disponibilités. Le calendrier de L’Olympia est déjà complet jusqu’à la fin de l’année 2022, avec parfois même plusieurs options par soir, sachant que la salle est ouverte plus de 250 soirs par an. Même chose pour le Stade de France dont les week-ends de 2022 sont déjà tous bouclés avec options également.
Pour Guillaume Benfeghoul qui programme des artistes électro comme M∅me et Bon Entendeur, la réouverture des clubs sera aussi un tournant.
Les professionnels de l’industrie restent toutefois optimistes et voient ce pass sanitaire d’un bon œil s’il permet une reprise presque totalement normale et s’il permet aux artistes de jouer dans les meilleures conditions. Tous ont hâte de retrouver les salles et le public, qui leur semble également dans l’attente, l’envie et la frénésie de vibrer à nouveau « en présentiel ». « La chance, si je puis dire, dont nous avons bénéficié dans notre secteur durant cette crise, c’est la confiance que nous a toujours accordée le public, en conservant ses billets des mois durant et en restant patient face aux reports » nous confie à ce propos Matthieu Drouot.