Marseille : Pourquoi l’exposition « Pause déjeuner » aiguise l’appétit pour la photographie
PHOTO•De grands photographes ont saisi ce moment de la pause repas, à la fois banal et exceptionnelCaroline Delabroy
L'essentiel
- Jusqu’au 14 mars, les Archives et bibliothèques départementales consacrent à Marseille une exposition à la pause déjeuner.
- Plus de 200 photographies sont exposées, certaines signées de Cartier-Bresson, Reboud ou Martin Parr.
- Célébrités, travailleurs, repas de famille, la pause déjeuner se fait multiple et intime.
Difficile de ne pas accrocher le regard de Marilyn Monroe, croquant un sandwich au volant de sa voiture. L’exposition « Pause déjeuner », qui se tient aux Archives et bibliothèques départementales à Marseille, n’a pas choisi l’icône américaine au hasard. La comédienne incarne à la fois un rituel du déjeuner totalement hollywoodien, avec ces photos prises sur un tournage, et européen : plusieurs clichés noir et blanc montrent un simple repas qu’elle partage dans une cuisine avec Yves Montand, Simone Signoret et Arthur Miller, alors son mari.
D’autres célébrités sont mises à table, à l’image de Serge Gainsbourg, Alfred Hitchcock ou Jacques Chirac. Mais l’exposition, de plus de 200 photographies, s’intéresse – fort heureusement – à d’autres sphères : la pause déjeuner au travail, le week-end en famille, à la maison ou en extérieur, le déjeuner loisir au restaurant aussi. Elle vient clôturer MPG2019, l’année de la gastronomie en Provence.
« Un thème qui nous parle tous »
« Le terme de 'pause déjeuner' est né du monde du travail, rappelle Pascale Giffard, commissaire de l’exposition. C’est un moment qui peut être très solitaire ou quelque chose de très partagé. L’idée était de montrer cette pratique très quotidienne vue par les grands noms de la photographie ». Une salle réunit ainsi des tirages originaux de Jacques-Henri Lartigue, Marc Riboud et Henri Cartier-Bresson. « Ce sont des scènes très simples, c’est un thème qui nous parle à tous et fait aussi voyager dans d’autres pays », réagit Juliette, formatrice de français, venue avec un groupe d'élèves adultes.
« Il n’y a pas, comme aujourd’hui, de téléphone sur toutes les tables continue-t-elle. On a l’impression que les gens prenaient plus le temps de manger, qu’il y avait plus d’échanges, cela fait du ben. » « Finie la nostalgie et le noir et blanc, on passe aux années 1990 ! », lance Dominique Betton, médiatrice culturelle, alors qu’elle approche de la conclusion très pop de l’exposition. Sur fond rose et jaune anis, deux séries contemporaines sont accrochées. L’une est signée du Britannique Martin Parr, connu pour son observation minutieuse et pleine d’humour de la société de consommation. L’autre, de l’Argentin Marcos Lopez, termine sur une note ultra-colorée et composée. « Depuis les années 1980, avec l’arrivée de la junk food, les nouveaux comportements alimentaires ont donné lieu à une nouvelle photographie, miroir de nos sociétés consuméristes », peut-on lire en commentaire.
A l’heure de Instagram, on s’étonnerait presque de l’absence de ces photographies culinaires anonymes et ultra-léchées qui alimentent le réseau. « Je voulais que ce soit une pause sans téléphone dans le quotidien des gens, explique Pascale Giffard. Je voulais rester sur cette pause déjeuner, ce moment de vie et ces photographes qui, avec leur Leica, ont été les premiers à explorer la street photographie, à se rapprocher des gens et à picorer la vie quotidienne. » Grand public, et ne prétendant pas à être autre chose, cette exposition invite ainsi à prendre le temps et, cerise sur le gâteau, à gagner en appétit pour la photographie.
Jusqu’au 14 mars aux Archives et bibliothèques départementales des Bouches-du-Rhône. Entrée libre.