Polémique sur «Mektoub My Love: Intermezzo»: Abdellatif Kechiche dénonce un «complot de marionnettes»
CINEMA•Ce lundi, une journaliste a publié sur son compte Twitter la lettre énervée que le réalisateur aurait envoyée au Syndicat des agents artistiques françaisF.R. avec AFP
La présentation de Mektoub My Love : Intermezzo à Cannes fut l’un des moments les plus controversés du dernier Festival. A l’issue de la projection de ce film de 3h28 dans lequel le réalisateur Abdellatif Kechiche « fixe sa caméra sur les corps de jeunes femmes dansant lascivement en boîte de nuit », selon la formule de l’AFP, certains ont crié au génie face à un geste « radical » quand d’autres estimaient que le long-métrage se distinguait par sa vacuité. La journaliste Anaïs Bordages a fait le décompte des plans « qui montrent des culs » dans ce film et en a dénombré 178.
La conférence de presse qui s’est tenue dans le cadre du Festival s’est déroulée dans une ambiance tendue, comme l’a décrite Caroline Vié, envoyée spéciale de 20 Minutes. L’actrice Ophélie Bau, qui participe à la scène la plus polémique – un cunnilingus de treize minutes tourné de manière très crue – n’était pas présente pour répondre aux questions des journalistes. Elle s’était contentée de monter les marches avant de s’éclipser discrètement. Abdellatif Kechiche a esquivé toutes les questions sur l’absence de la comédienne. Pour certains, cette attitude aurait été le signe que le torchon brûlait entre Ophélie Bau et lui.
La consigne d'« apparaître crispée »
Ce lundi, la journaliste Mélanie Klein a posté sur son compte Twitter – avec l’accord de son auteur – une lettre d’Abdellatif Kechiche adressée au Syndicat des agents artistiques français. Dans sa missive, il accuse l’organisation d’avoir voulu régler ses comptes avec lui via Ophélie Bau et crie au « complot de marionnettes ».
« Ophélie Baufle [le patronyme d’Ophélie Bau à l’état civil] avait pour consigne de s’arranger pour apparaître crispée à mes côtés lors de la traditionnelle montée des marches, puis de redescendre précipitamment, et de préférence émue, dans sa robe haute couture d’un blanc virginal », affirme-t-il.
Le réalisateur se défend d’avoir exercé toute contrainte sur ses acteurs lors du tournage de Mektoub My Love : Intermezzo. Au sujet de la scène de cunnilingus, il raconte que « si Ophélie avait exprimé la moindre gêne et qu’elle ne souhaitait plus y participer, elle avait largement le temps d’y réfléchir et de me le signifier ».
« Son plaisir et sa liberté »
« Plutôt que de chercher à m’incriminer en voulant faire croire que j’aurais oppressé, manipulé, ou enivré les acteurs pour leur faire jouer une telle séquence, il eut été plus constructif et courageux, à mon sens, d’élever le débat et de rendre compte à quel point il est encore difficile aujourd’hui pour une femme de revendiquer son plaisir et sa liberté », poursuit-il.
Pour l’heure, ni Ophélie Bau, ni le Syndicat des agents artistiques français n’ont officiellement réagi à cette lettre. Une source proche de l’agent incriminée par le réalisateur a fait savoir à LCI que celle-ci préparait une réponse, « par le biais de son avocat. »
Le précédent « La Vie d’Adèle »
Ce n’est pas la première fois qu’Abdellatif Kechiche se plaint d’être la cible de critiques qu’il estime orchestrées. En 2013, il s’en était ainsi pris au chef du service culture du Monde, à l’actrice Léa Seydoux et au producteur et fondateur de MK2 Marin Karmitz qu’il accusait de « vouloir détruire » La Vie d’Adèle, pour lequel il a obtenu la Palme d’or.
La manière dont il aurait dirigé ses actrices était pointée du doigt. Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos avaient déclaré au site américain The Daily Beast qu’elles ne travailleraient sans doute plus jamais avec lui. « Kechiche est un génie, mais il est torturé », avait déclaré Adèle Exarchopoulos.
Par ailleurs, en octobre, le parquet de Paris a ouvert une enquête à l’encontre d’Abdellattif Kechiche après une plainte à son encontre d’une femme de 29 ans pour agression sexuelle. Interrogée par l’AFP début mai, une source proche du dossier avait indiqué que l’enquête était toujours en cours et que le cinéaste n’avait toujours pas été auditionné.