Rennes: Il y a 40 ans, les premières Trans Musicales enflammaient la salle de la Cité
FESTIVAL•Les Trans fêtent ce week-end les 40 ans de la première édition du festival, organisée en juin 1979Manuel Pavard
L'essentiel
- Les Trans Musicales fêtent leurs 40 ans ces vendredi et samedi, avec deux soirées à l'Ubu.
- Si les Trans se tiennent en décembre depuis 1980, la première édition du festival a, elle, été organisée les 14 et 15 juin 1979 par une bande de jeunes Rennais passionnés de musique.
- A l'époque, le système D était de mise et les groupes – tous rennais– jouaient bénévolement sur une sono prêtée.
Pour tous les Rennais, le premier week-end de décembre est synonyme depuis longtemps de Trans Musicales. Mais ça n’a pas toujours été le cas. Il y a 40 ans, jour pour jour, le mythique festival rennais prenait en effet son envol. On était alors en juin 1979.
Après avoir sommeillé durant de longues années, Rennes se réveillait petit à petit sous l’impulsion de la vague punk venue d’Angleterre. Parmi les agitateurs de ces nuits rennaises, figuraient notamment Jean-Louis Brossard, Béatrice Macé, le disquaire Hervé Bordier (parti depuis vers d’autres horizons) et leur groupe d’amis, tous âgés d’une vingtaine d’années et réunis au sein de l’association Terrapin.
Une bande de potes aux manettes
« À l’époque, on était une bande de potes passionnés de musique qui se retrouvaient au bar de l’Épée et sur tous les concerts rennais, se souvient Jean-Louis Brossard, programmateur et grand manitou des Trans. On a décidé d’organiser des concerts pendant deux jours à la Cité pour faire découvrir la scène rennaise. » L’événement était alors destiné à soutenir l’association, qui rencontrait des difficultés financières.
La programmation oscillait entre punk, rock progressif et jazz. Particularité, les douze groupes à l’affiche étaient tous rennais : citons Fracture, Oniris, Anchees Doo Too Cool ou encore les têtes d’affiche Marquis de Sade. « C’était très bricolé et à la bonne franquette », se remémore Frank Darcel, fondateur et guitariste du groupe, devenu écrivain – son dernier roman Vilaine Blessure est paru en mars dernier chez Le Temps Editeur.
Sono prêtée, groupes bénévoles et prix libre
Le système D et la débrouille étaient de mise. « La sono avait été prêtée par Oniris, illustre Jean-Louis Brossard. Tous les groupes jouaient bénévolement et le public donnait ce qu’il voulait. » Frank Darcel se rappelle quant à lui de « l’ambiance géniale dans les loges de la Cité », à une époque où « les services d’ordre n’existaient pas encore ».
Ces premières Trans Musicales furent en tout cas un franc succès, avec 1.800 personnes comptabilisées sur les deux jours. On se pose donc la question : pourquoi le festival s’est-il déroulé en décembre à partir de 1980 ? Sur ce point, les versions divergent, légèrement brouillées par les quatre décennies écoulées.
« Béa [Béatrice Macé] est passée en décembre car les étudiants sérieux ne pouvaient pas aller aux Trans en juin », avance le leader de Marquis de Sade, alors lui-même étudiant en médecine. Pour Jean-Louis Brossard, l’explication est encore plus simple : « C’est juste qu’on n’avait pas prévu d’en faire une autre. Et quand on s’est décidé, il était trop tard pour les refaire en juin. »
La « movida rennaise »
Ensuite, le choix de décembre s’est imposé de lui-même. « La deuxième édition a très bien marché et la première semaine de décembre, on n’avait pas vraiment de concurrence, souligne le programmateur des Trans. Il y avait enfin un truc qui se passait en hiver. »
Frank Darcel se souvient ainsi avec plaisir de « cette movida rennaise de la fin des années 1970 et début des années 1980 », cette période d’effervescence culturelle qui permit à la capitale bretonne de rompre définitivement avec son image de « ville endormie ». Jean-Louis Brossard l’évoque avec une certaine fierté aujourd’hui, lui et sa bande de jeunes énervés venaient alors de « donner un coup de pied » dans la torpeur ambiante.
« Les années d’après, les copains des groupes parisiens sont venus passer des week-ends à Rennes, raconte Frank Darcel. C’était avant le sida, Rennes était une ville très libertine. Et à Paris, on ne servait souvent plus d’alcool après 1 heure alors qu’ici, on savait recevoir ! »