VIDEO. «Slam Dunk», «Captain Tsubasa», «Haikyu!!»... Le sport, c'est bon pour le manga
MANGA•L’éditeur Kana réédite « Slam Dunk », référence du manga de basket et du manga de sport tout court, l’occasion de revenir sur un genre à la fois très codifié et très richeVincent Jule
L’âge d’or du manga en général, et du mythique magazine Weekly Shônen Jump, a connu un coup d’arrêt au milieu des années 1990 avec les fins successives de ses deux titres phares, Dragon Ball et Slam Dunk. Si le premier n’est plus à présenter, le second est moins connu en France. Il a bien sûr ses fans, et a déjà été édité, mais rien de comparable avec le Japon, où il est l’un des mangas les plus importants et les plus vendus de l’histoire.
Un sondage du ministère de la Culture l’a même désigné meilleur manga de tous les temps en 2007, devant Dragon Ball et Jojo’s Bizarre Adventure. La réédition par Kana du manga en « Star Edition «, soit 20 volumes de 300 pages (les deux premiers sont sortis vendredi), est l’occasion idéale pour revenir sur le classique de Takehiko Inoue, et sur la force et la richesse du manga de sport.
Le manga de sport, l’histoire d’une passion ou d’une rencontre
Hanamichi Sakuragi est un grand rouquin mais petit voyou, un bon à rien qui multiplie les râteaux avec les filles. Mis à part impressionner la jolie Haruko, il s’inscrit au club de basket, un sport dont il ne connaît absolument rien. Il se prend pourtant vite au jeu, et va y mettre tout son cœur. Voilà le pitch de Slam Dunk, qui rappelle tant d’autres shônen sportifs : Captain Tsubasa, Angel Voice, Whistle, Dream Team, Rookies, Eyeshield 21… Mais si le sport est une évidence, une passion, pour les footeux de Whistle et Captain Tsubasa, ou pour les héros « trop petits « de Dream Team, un autre manga sur le basket, et Haikyu !!, sur le volley-ball, il peut être aussi une rencontre, une réponse.
De l’action à l’émotion
Dans Eyeshield 21, le souffre-douleur Sena n’a pas choisi le football américain, c’est lui qui l’a choisi, qui lui a permis d’exploiter son talent, la vitesse, et au final de s’épanouir. Les délinquants adeptes du panier de Slam Dunk, du ballon rond dans Angel Voice ou de la batte… euh du gant de baseball dans Rookies trouvent dans le sport un autre moyen, sain et productif, d’exprimer leur violence intérieure. Ce que les Japonais appellent le nekketsu, qui peut se traduire littéralement par « sang bouillonnant ou brûlant » et qui, entre initiation et transcendance, habite les shônen.
A la différence des aventures extraordinaires d’un ninja démon (Naruto) ou d’un pirate élastique (One Piece), l’identification est immédiate avec un shônen sportif qui s’ancre dans un quotidien réaliste, scolaire. Ce qui n’empêche pas les enjeux les plus proches de nous, comme l’amour ou la famille, d’être bien souvent évacués. C’est ainsi par amour que le chien fou et roux Sakuragi se met au basket. Mais qui s’en rappelle, ou même s’en soucie, après 31 tomes de matchs, actions, contres… et oh, un trois points !
Car l’émotion passe avant tout dans l’action, dans l’effort, dans l’accomplissement de soi. C’est pourquoi chaque geste, technique, choix est détaillé, décrypté, commenté… et pourquoi un combat de boxe d’Ippo peut durer plusieurs volumes de 200 pages tandis qu’il faut une dizaine d’épisodes de 20 minutes à la New Team pour traverser la surface de réparation.
Misturu Adachi ou la vie, la mort, le baseball
L’inverse est aussi vrai, le sport peut servir de prétexte, de décor, pour étudier les relations humaines. Le mangaka Mitsuru Adachi en fait sa spécialité, avec Touch – Théo ou la batte de la victoire, H2, Cross Game, des œuvres d’une extrême sensibilité sur le baseball, la vie, la mort et l’intimité. Dans la même veine, impossible de ne pas mentionner l’inclassable et incontournable I’ll sur la relation passionnante et désabusée entre deux frères ennemis du basket. Vendue par Glénat comme un pur manga de sport, sous le titre I’ll Génération Basket, la série n’avait pas trouvé son public et s’était arrêtée en cours de route, avant d’être reprise en intégralité par Tonkam… et d’être malheureusement aujourd’hui en arrêt de commercialisation.
REALité
Mais le chef d’œuvre du genre reste peut-être l’autre manga de basket de Takehiko Inoue, le bien nommé REAL. Ses héros sont des êtres brisés, dans tous les sens du terme, à cause d’une maladie ou d’un accident, et l’appel du ballon est devenu leur raison de (sur) vivre. Une BD sur le handisport ? Dans un sens, si ce n’est que le lecteur est toujours pris à contre-pied. Ainsi, lors d’un face-à-face, un joueur qui a toujours ses deux jambes mais qui est battu par un autre en chaise roulante lance le plus naturellement du monde : « Ce n’est pas juste. Tu me dois un handicap. » Plus tard, ce sont les efforts surhumains d’une jeune fille pour passer de sa chaise à son lit qui sont détaillés sur près de dix pages. Le plus beau des combats. A l’instar d’un Ashita no Joe, celui qui fut aux yeux des Japonais tour à tour orphelin, vagabond, bagarreur, prisonnier, boxeur et enfin symbole d’une société, d’une époque et d’un pays.
A chaque sport, son manga
Si le foot, le basket, le baseball et les arts martiaux sont prisés par les lecteurs, ils ne sont pas les seuls sports à avoir droit à leur manga. Sans être exhaustif, citons le tennis avec Prince of Tennis et Happy, l’aviron avec Regatta, l’escalade avec Ascension, la plongée avec Glaucos, le drift avec Inital D, la danse avec Subaru, la lutte avec Battle Club, le patinage artistique avec Effleurer le ciel, le skate avec Sk8r’s, l’équitation avec Jumping, le jeu de go avec Hikaru no Go, et même l’esport avec Versus Fighting Story.