DEUILY-a-t-il un boum des bébés Johnny en 2018?

Un an sans Johnny Hallyday: La mort du rockeur a-t-elle inspiré les jeunes parents?

DEUILAvant la mort de Johnny Hallyday, le prénom du chanteur était très peu donné aux nouveau-nés du XXIe siècle…
Coucou, elle avait un Johnny dans le tiroir
Coucou, elle avait un Johnny dans le tiroir - Shutterstock/SIPA
Benjamin Chapon

Benjamin Chapon

L'essentiel

  • Il y a un an, la France perdait son idole. 20 Minutes explore la manière dont le pays fait son deuil de Johnny Hallyday dans une série d’articles.
  • Très peu donné depuis une vingtaine d’années, le prénom Johnny pourrait connaître un retour en force.
  • Les plus grands fans de Johnny Hallyday ne semblent toutefois plus en âge d’avoir des enfants.

Des Johnny par milliers ? Un an après la mort de l’idole, les Français ont-ils rendu hommage à Johnny Hallyday en donnant, en masse, le même prénom à leurs enfants ? Johnny part de loin selon l’Insee. En 1980 naissaient 650 Johnny, le record de popularité du prénom. En 2017, une dizaine seulement. Officiellement devenu un « prénom rare », Johnny peine à figurer parmi les 1.000 prénoms les plus donnés.

On va mettre fin au suspens tout de suite : non, il n’y a pas eu de boum des Johnny en 2018. L’Insee ne communiquera pas ses statistiques 2018 avant plusieurs mois mais un sondage au doigt mouillé dans une dizaine de maternités et cabinets de sage-femme nous indique que la France n’a pas connu de vague Johnny. « J’étais de garde la nuit de sa mort, raconte Sandrine, infirmière à l’hôpital Necker. On a entendu la nouvelle sur France Info avec les collègues. On s’est tout de suite dit qu’on allait avoir plein de petits Johnny dans les mois suivants mais en fait, non, on n’en a eu aucun. Il y a toujours pas mal de Laura et Jade, ça oui, mais Johnny, non, ce n’est pas du tout revenu. »

Même son de cloche à Mont-de-Marsan, Oyonnax et Maubeuge : « Un papa m’a dit qu’il avait donné Johnny en deuxième prénom à son fils né le jour de l’hommage national mais je crois qu’il plaisantait », se rappelle-t-on dans une maternité de Brest.

Johnny is the new Kevin

Elle est loin l’époque où les Français donnaient à leurs enfants les prénoms de leurs idoles. Même les footballeurs champions du monde 2018 n’auront pas plus que ça inspiré les jeunes parents cet automne. Du moins pas du tout dans la proportion des Zinédine de 1998. Le pic des Johnny a eu lieu en 1980, une époque où ont débarqué en masse les prénoms américains parmi les classes populaires françaises. On a ainsi eu les Kevin puis les Dylan, les Cindy, les Brenda… Les participants aux diverses émissions de téléréalité témoignent de cette époque.

La sociologie des fans de Johnny montre que les fans du chanteur ont, en moyenne, dépassé la soixantaine et ne sont donc plus en mesure de baptiser les enfants. Par ailleurs, des travaux récents ont montré l’impact négatif que pouvait avoir un prénom comme Johnny ou Kevin sur la vie quotidienne, et notamment au travail. Jean-François Amadieu, directeur de l’Observatoire des discriminations, avait noté qu’à CV égal, un Kevin avait jusqu’à un tiers de chance en moins d'être embauché que, par exemple, un Thomas. Alors un Johnny… Le chercheur Baptiste Coulmont, auteur de Sociologie des prénoms, a aussi réalisé une étude sur l’impact du prénom Kevin, perçu comme un marqueur social fort et dévalorisant aux yeux des classes supérieures.

Fais pas ton Johnny

Johnny Hallyday aimait-il son prénom, choisi comme nom de scène dans les années 1950 pour coller à son personnage de chanteur américain ? En tout cas, Laeticia Hallyday ne l’aimait pas. Du moins elle répugnait à l’appeler ainsi, préférant des « mon amour » ou « mon bébé », parce que, d’après elle, « Johnny appartient à tous les Français ».

Prénom inscrit dans le patrimoine français, largement plus que Jean-Philippe, par exemple, Johnny n’a pourtant pas de fête dans le calendrier. Si vous y tenez, vous pouvez les fêter le 27 décembre, en même temps que les Jean…

Quelle postérité Johnny Hallyday laissera-t-il à son prénom ? Le philosophe Jean-Pierre Le Goff note que certains prénoms populaires deviennent des antonomases, des noms communs. Un Judas est un traître, une Marie-Chantal est une bourgeoise, un Jacky est un vieux beauf… Que seront les Johnny ? L’éditrice d’un ouvrage de référence sur les prénoms affirme, sans trop se mouiller, que « la référence va se perdre. Certaines associations comme Emilie Jolie, qui semblaient indélébiles à une époque, s’atténuent en moins d’une génération. Par exemple, il y a eu une chanteuse prénommée Clio l’an passé, les parents des petites Clio de 2018 ne pensent plus à la voiture. »

Espérons que la dizaine de bébés Johnny probablement nés cette année porte haut les couleurs du prénom avant qu’il ne disparaisse, ou pire, ne devienne un prénom comme les autres.