PREVIEW. «Les Passagers du vent» reviennent se perdre dans les ruines fumantes de la Commune
BD•Un nouveau cycle s’ouvre pour la série mythique de François Bourgeon. « 20 Minutes » vous propose d'en découvrir quelques pages avant la sortie de l'album ce jeudi…Olivier Mimran
Huit ans après la publication du dernier volume (La Petite fille Bois-Caïman) d’une série qui l’a rendu mondialement célèbre, François Bourgeon lui offre enfin une suite… en forme de grand écart géographique : des bayous de Louisiane, où l’on avait découvert, en pleine guerre de sécession, une Isa (le personnage phare de la série) centenaire, nous voici projetés dans le Paris d’après les événements de la Commune ! En revanche, on retrouve bien Isabeau (ou Zabo), plus âgée, puisque l’action se situe vingt ans plus tard…
Mais constatez-le vous-même grâce aux éditions Delcourt, qui « offrent » quelques planches du nouvel album aux lecteurs de 20 Minutes…
De l’action en pagaille...
On n’attendait pas moins d’action des Passagers du vent qui, depuis 1979, n’en ont jamais manqué, que leur intrigue se soit située en France, au milieu de l’océan, en Afrique ou aux Amériques… C’est même une des composantes de leur immense succès (selon François Bourgeon, chacun des sept volumes déjà publiés aurait été vendu à près d’un million d’exemplaires par le monde - un chiffre étourdissant en matière de BD).
La séquence présentée, qui se situe dans le premier quart de l’album, permet de découvrir, outre Zabo - qui s’est depuis rebaptisée Clara -, la jeune Kervi, une Bretonne débarquée à Paname quelques années plus tôt et qui va occuper, elle aussi, une place essentielle dans ce nouveau cycle. Car oui, Rue de l'abreuvoir (le sous-titre de ce volume) ouvre bien un nouveau cycle, Le sang des cerises, qui fait évidemment référence à la chanson Le temps des cerises, publiée en 1868 et devenue un hymne des événements de la Commune de Paris, en 1871.
De quoi ça parle ?
De rien de précis, l’album pose plutôt les bases de ce que sera ce nouveau cycle (constitué de quatre albums, a priori) en introduisant l’amitié qui va vite lier Isabeau/Clara et Klervi, sur fond de tensions parisiennes post-communardes. À ce propos, plusieurs séquences « expliquent » le contexte politique dans lequel s’inscrit le récit par l’intermédiaire de dialogues un peu bizarres car très didactiques. Comme si les personnages s’expliquaient les uns les autres ce qu’il s’est produit, alors que tous sont supposés y avoir assisté.
D’accord, c’est un procédé scénaristique connu (et pratique), qui ne heurtera pas les inconditionnels de Bourgeon. Les autres, en revanche, pourraient trouver ça un peu lourd…
Une minutie poussée à l’extrême
Le troisième grand personnage de l’ouvrage, c’est… Paris, bien sûr. Et plus particulièrement le Montmartre de la fin du 19e siècle, quartier duquel partirent les événements de la Commune et que François Bourgeon connaît bien pour y avoir habité de nombreuses années (âgé de 73 ans, il vit désormais en Bretagne). N’empêche qu’en orfèvre de la bande dessinée, l’auteur en a construit une maquette - du moins, des rues concernées dans le récit - pour en restituer le plus de fidèlement possible la lumière, les ambiances etc.
Ce qu’on en pense…
De nombreux lecteurs avaient été décontenancés par le diptyque La Petite fille Bois-Caïman, jugeant que ces épisodes de transition manquaient du souffle épique qui est un peu la marque de fabrique des Passagers… Et bien, qu’ils soient rassurés : ce nouveau cycle semble renouer avec les « Trois A » : aventure, action, amitié, des fondamentaux historiques de la série. Et offrir une vraie consistance à un personnage - Clara (alias Isabeau) - qui en manquait jusqu’alors cruellement. Ce qui prouve qu’en plus de son immense talent, François Bourgeon a su écouter son public le plus fidèle et remettre sa ligne éditoriale en question. C’est la marque des grands auteurs.
Les passagers du vent t8/9 : Le sang des cerises - livre I « Rue de l’abreuvoir », de François Bourgeon - éditions Delcourt - 17,95 euros