Condamné pour avoir bravé la censure, le cinéaste Mohammad Rasoulof annonce avoir quitté l’Iran
COMBAT•Il était accusé de « collusion contre la sécurité nationale » pour de simples manifestations20 Minutes avec AFP
Alors que vient de s’ouvrir le Festival de Cannes, où son film Les graines du figuier sauvage est en sélection officielle, le réalisateur iranien Mohammad Rasoulof a imploré mardi le cinéma mondial d’apporter un « soutien fort aux réalisateurs menacés ».
Un message d’autant plus important que le cinéaste sait de quoi il parle, lui qui a payé (très) cher son amour du 7e art en se faisant arrêter à de nombreuses reprises dans son pays, qu’il a finalement quitté pour ne pas retourner en prison.
Un exil en forme de crève-cœur
« Je devais choisir entre la prison et quitter l’Iran. Le cœur lourd, j’ai choisi l’exil », a déclaré, dans un communiqué transmis mardi 14 mai 2024 à l’AFP, le cinéaste de 51 ans désormais réfugié en Europe, dans un lieu tenu secret.
Pour rappel, Mohammad Rasoulof avait appris peu après sa sélection cannoise qu’il était condamné à une peine de prison pour « collusion contre la sécurité nationale », selon son avocat.
De multiples démêlés avec la justice iranienne
En plus de vingt ans de carrière, ce n’était pas la première fois : privé de passeport, Mohammad Rasoulof n’avait ainsi pas pu se rendre au festival de Berlin en 2020 pour présenter Le diable n’existe pas, Ours d’or de la compétition. Et il avait été victime de la même « mésaventure » en 2011.
En 2019, déjà, le Festival de Cannes avait rendu hommage à ce cinéaste qui « ne cesse, à travers son travail, de conter la réalité de son pays, affrontant ainsi la censure imposée chez lui par les autorités iraniennes ».
« Dire non à un régime autoritaire »
« Je me suis souvent demandé ce que cela représentait pour quelqu’un de dire non à un régime autoritaire (…) La vie est rendue bien plus difficile en disant non », mais « il y a une part de beauté dans le fait de dire non », a-t-il expliqué.
Début mai, son avocat Me Babak Paknia a révélé que Mohammad Rasoulof avait été condamné à huit ans de prison, dont cinq applicables, plus des coups de fouet, une amende et la confiscation d’une partie de ses biens.
Libéré pour raison de santé
Ce jugement, qui n’a pas été annoncé par les médias officiels en Iran, fait suite à l’arrestation du cinéaste en juillet 2022 pour avoir encouragé des manifestations liées à l’effondrement d’un immeuble ayant fait plus de 40 morts en mai dans le sud-ouest de l’Iran (il avait ensuite été libéré à titre temporaire pour raisons de santé en janvier 2023).
Mohammad Rasoulof est un proche de Jafar Panahi, autre cinéaste dissident de renommée internationale qui avait été arrêté en 2022 pour lui avoir apporté son soutien au tribunal, avant d’être libéré sous caution en février 2023.
Notre dossier « Iran »Dans son message annonçant son départ d’Iran, le réalisateur indique « rejoindre des millions d’Iraniens à travers le monde dans l’exil » d’un « Iran culturel » en dehors d’un « Iran géographique » qui « souffre sous les bottes » de la « tyrannie religieuse ».