au poil !« Rosalie », une performance jamais rasoir

« J’ai été choquée quand je me suis vue avec la barbe… » Nadia Tereszkiewicz épate dans « Rosalie »

au poil !Nadia Tereszkiewicz incarne une jeune femme à la pilosité débordante face à Benoît Magimel dans cette belle histoire d’amour en salles le 10 avril
Caroline Vié

Caroline Vié

L'essentiel

  • Le destin d’une jeune femme au physique très particulier permet à Nadia Tereszkiewicz de livrer une composition magistrale.
  • Elle tient tête à Benoît Magimel dans cette belle histoire d’amour.
  • Cette réflexion sur l’apparence et le regard des autres est portée par ces deux acteurs remarquables.

Etre une femme à barbe ce n’est pas facile à vivre dans la France de 1870. C’est cette existence pas vraiment dorée que fait partager Rosalie de Stéphanie Di Guisto, découvert au Festival de Cannes l’an passé. La réalisatrice de La Danseuse a choisi Nadia Tereszkiewicz, Césarisée en 2023 pour Les Amandiers de Valeria Bruni Tedeschi pour lui confier ce personnage exceptionnel.

« J’ai été choquée quand je me suis vue pour la première fois avec la barbe, confie Nadia Tereszkiewicz à 20 Minutes. J’ai suivi le même parcours que Rosalie dans le film. J’ai commencé par me sentir mal avant d’accepter ma nouvelle apparence au point de ne plus y faire vraiment attention. » L’héroïne se fait épouser par un cafetier incarné par Benoît Magimel qui se révèle fort surpris quand il découvre la pilosité débordante que sa promise avait rasée avant la noce.

Un rituel pénible mais nécessaire

« Le tournage a été très solitaire pour Nadia, explique l’acteur. Je me souviens d’un figurant qui a été choqué par son apparence quand il l’a vue arriver barbue la cantine. . C’était très compliqué. » La comédienne devait par cinq heures de préparatifs pour devenir Rosalie entre pose des poils un par un, ajustage du corset, maquillage et coiffure. « Ce rituel très fastidieux m’a aidée à m’approprier le rôle, » insiste-t-elle. Le spectateur s’attache progressivement à cette jeune femme tout en s’habituant à son apparence hors du commun. « Stéphanie Di Guisto ne voulait pas que nous nous rencontrions avant le tournage, insiste Benoît Magimel. Il était important pour elle que nous nous découvrions comme le font nos personnages. Je pense que cela a favorisé notre immersion dans l’histoire. »

Le regard porté sur l’héroïne est l’un des thèmes majeurs de ce magnifique portrait. « Quand on est actrice, on est habituée à ce que son physique soit scruté, précise Nadia Tereszkiewicz. J’ai puisé une partie de ma performance dans la façon dont on me regardait. C’était dur mais cette douleur était nécessaire pour comprendre Rosalie, mais elle était éphémère. En un sens, j’étais heureuse d’avoir honte de son apparence. D’autant plus que cela n’a pas duré. »

Une thématique universelle

La portée du film dépasse celle de la vie de ce couple qui apprend à s’aimer et à s’accepter pour déboucher sur une réflexion plus large sur l’apparence et les réactions qu’elle peut provoquer. « Rosalie peut parler aussi bien aux hommes qu’aux femmes, déclare Nadia Tereszkiewicz. Elle se bat pour liberté à être elle-même et à être aimée. » La force de caractère de la jeune femme la rend très émouvante face aux rejets qu’elle subit. « Cela rendait ma composition difficile, raconte Benoît Magimel. Ce n’est pas évident de se montrer insultant, mais, comme pour Nadia, c’était très important d’embrasser ce malaise pour m’en nourrir. »

Ce que décrit Nadia Tereszkiewicz comme « une positivité dépourvue de naïveté » habite cette femme qui fait une force de sa différence en refusant d’être considérée comme un monstre.