Ti West a renouvelé l’horreur en rendant hommage au cinéma X
festival de Gérardmer•Le réalisateur de « MaXXXIne » a reçu un accueil triomphal dans la manifestation vosgienne dont il était l’invité d’honneur
Caroline Vié
L'essentiel
- Avec sa trilogie composée de « X », « Pearl » et « MaXXXine », Ti West a secoué le cinéma de genre.
- Le succès de ses films a ouvert la porte à des œuvres plus provocatrices.
- Le réalisateur travaille actuellement sur deux nouveaux projets.
Si vous aimez le sexe et le sang au cinéma, vous avez entendu parler de Ti West. Sa trilogie, commencée en 2022 avec X puis poursuivie avec Pearl et MaXXXine en 2024, lui a valu un succès international. L’héroïne campée par Mia Goth est une actrice de cinéma porno et la grand-mère de cette dernière pour ces œuvres qui ont su trouver leur public en raison de leur côté résolument transgressif.
« J’ai toujours aimé le cinéma d’horreur, confie-t-il à 20 Minutes parce qu’on y abordait des sujets tabous et qu’il était bon marché à réaliser en toute indépendance. Vous aviez juste besoin de vous montrer inventif pour réussir ». Marchant sur les traces d’aînés prestigieux comme Sam Raimi (Evil Dead) ou Peter Jackson (Bad Taste), le cinéaste américain a renouvelé le genre par sa liberté de ton ce qui lui vaut d’être l’invité d’honneur du Festival de Gérardmer 2025.
Epicer le cinéma d’horreur
« Je trouvais que le cinéma d’horreur devenait un peu fade, trop sage en quelque sorte, se souvient-il. L’idée m’est alors venue de lui adjoindre un côté sexy ». Cette notion a donné naissance à X où une équipe de film pornographique venue tourner dans une ferme isolée tombe sur des psychopathes. « C’était évidemment délicat de mêler sexe et horreur mais je ne me suis rien interdit, dit-il. Cela aurait pu créer une controverse qui aurait tué le film. Heureusement, le public était prêt pour ce cocktail ».
X a été si bien reçu que Pearl, tourné dans la foulée, est sortie la même année. « Le premier film avait détendu l’atmosphère, précise-t-il. Je me suis donc senti plus libre pour réaliser le genre d’œuvres qu’on n’était pas censés regarder quand j’étais gamin ». Il a ainsi relancé la mode d’un cinéma horrifique moins grand public mais rentable grâce à un budget raisonnable.
Des genres et des gens méprisés
« Le X et le cinéma d’horreur me semblent avoir une relation symbiotique par le mépris dont ils sont l’objet », explique-t-il. L’idée de mettre en avant une actrice de lui semblait aussi un bon moyen de donner un grand coup de pied dans la fourmilière. « On regarde ses femmes de haut car il est estimé qu’elles ne sont respectables. C’est important de montrer que toutes les femmes méritent le respect ».
Ti West a adoré Anora de Sean Baker pour la façon dont le film donne la parole à une stripteaseuse avec humour et tendresse. Il est aussi fan de The Substance de Coralie Fargeat où Demi Moore se métamorphose en monstre après avoir pris une drogue censée la rajeunir. « C’est génial de voir ces deux films américains originaux et culottés recevoir des prix et obtenir du succès au box-office, dit-il. Cela prouve que les spectateurs sont prêts à accepter des histoires qui les bousculent ».
Et pour la suite ?
Le réalisateur estime qu’il est trop tôt pour prédire si l’élection de Donald Trump va changer la donne pour ce qui concerne les productions. « Son précédent mandat avait vu naître des œuvres militantes et utiles mais pas vraiment excitantes du point de vue du divertissement », analyse-t-il. Pour sa part, il ne se voit pas poursuivre les aventures de l’héroïne de sa trilogie.
Notre rubrique Cinéma« Ce qui est drôle avec ces films, c’est qu’on a tellement l’impression qu’ils sont devenus cultes instantanément qu’ils sont une entité à part entière, reconnaît-il. « Trois » est un bon chiffre pour faire un beau coffret de DVD. On verra dans dix ans si j’ai envie de remettre le couvert ». Pour l’instant, il est en pleine écriture et pourrait tourner un film à gros budget avec un studio en septembre ou un long métrage moins cher si la production de ce dernier tarde à se lancer. « Je ne me sens pas écrasé par le succès de la trilogie, confie-t-il. Je suis prêt à continuer ma carrière en toute liberté. » On a hâte de voir la suite.