Isabelle Huppert en majesté a illuminé le Festival Lumière

Isabelle Huppert en majesté a illuminé le Festival Lumière

superstarLa comédienne, très émue a reçu le Prix Lumière des mains d’Alfonso Cuarón et Noémie Merlant
Caroline Vié

Caroline Vié

L'essentiel

  • Isabelle Huppert a laissé apparaître sa fantaisie pendant son séjour lyonnais.
  • Cette grande dame est revenue sur sa longue carrière.
  • L’actrice assure avoir gardé la passion de son métier.

«C’est agréable d’entendre tous ces compliments et je suis très touchée mais je suis incrédule, admet-elle. Je comprends ce que les films représentent mais je n’occupe qu’une toute petite place dans quelque chose de plus grand. Tout cela me dépasse un peu ». Elle a mis le feu au Festival Lumière. Isabelle Huppert, rayonnante, a dansé au son de Vent de folie, tube des années 1980 du groupe Tenue de soirée en venant recevoir le prix Lumière.

Un choix musical surprenant mais tout à fait approprié quand on découvre qu’il s’agit de l’une de ses chansons favorites que Sandrine Kiberlain a reprise sur scène pour rendre hommage à son amie. « J’aime bien cette chanson entraînante et il y a des mots qui résonnent "C’est ma façon d’aimer" ou "Jusqu’au bout de la nuit". C’est joyeux », explique-t-elle.

Brillante et pleine d’humour

C’est une Isabelle Huppert pétillante et pleine d’humour qu’on a découverte pendant son séjour lyonnais aux côtés de Thierry Frémaux. Emue quand elle a reçu son trophée des mains d’Alfonso Cuarón et de Noémie Merlant, elle a avoué qu’elle n’imaginait pas un accueil pareil. « Ce que j’ai vécu à Lyon dépasse mon imagination et pourtant, j’ai beaucoup d’imagination », a-t-elle déclaré après avoir reçu des manifestations d’admiration de stars (Camélia Jordana et Julien Clerc ont notamment chanté pour lui témoigner sa sympathie) et d’anonymes tout aussi enthousiastes lors d’une soirée survoltée.

« Je me suis trouvé actrice très jeune. Il faut croire que c’était ma place : c’était comme une évidence. J’ai eu beaucoup de chance, précise-t-elle. Une actrice raconte une histoire dans les personnages qu’elle incarne mais elle révèle aussi quelque chose d’elle-même », confie-t-elle. Sa filmographie lui a permis d’en dire long sur elle et sur les autres au travers de collaborations passionnantes avec de grands cinéastes comme, entre autres, Michael Haneke, Claire Simon, Brillante Mendoza, François Ozon ou Michael Cimino.

« Le triomphe de l’instant présent »

Isabelle Huppert n’est pas du genre à s’endormir sur ses lauriers. « Je sais que certains films ont plus marqué les esprits, mais je n’ai pas de favori, dit-elle. Une fois que le film vient de se terminer, je n’y pense plus. Ce qui m’intéresse, c’est de le faire. Si je devais y penser, ce serait trop lourd à porter. Le cinéma, c’est le triomphe de l’instant présent. Ce n’est pas avec ce qu’on a fait qu’on fait ce qu’on fait ». Sa culture cinématographique, Isabelle Huppert l’a construite progressivement.

« J’ai vu très peu de films avant de devenir actrice, dit-elle. Je n’avais aucune culture de cinéma, dit-elle. Quand je vois un film aujourd’hui, cela ne reflète absolument pas sur ce que j’ai envie de faire comme actrice, c’est de l’imaginaire pur. Le cerveau a des capacités imaginaires assez fortes. » Elle ne ressent pas de gêne à se revoir à l’écran. « On s’y habitue, explique-t-elle. Et on redécouvre parfois des détails de l’histoire qu’on avait oubliés car on se souvient souvent moins du film lui-même que des moments où on l’a fait ».

La vague MeToo

Elle choisit ses rôles à l’instinct au gré des rencontres et des propositions. « Ce qui compte, c’est moins ce que le film raconte que comment il le raconte. Donc, je n’ai pas de genre cinématographique préféré. C’est le film qui m’indique le chemin ». Cette route aventureuse, la comédienne l’a suivie sans se laisser arrêter par les obstacles. « J’ai rencontré de la misogynie mais cela ne m’a jamais empêché d’exercer mon métier d’actrice », martèle-t-elle.

Elle ne minimise pas pour autant la vague MeToo. « Il ne faut pas diaboliser le cinéma, précise-t-elle. Mais il est bien que certaines choses aient été dites car toute souffrance mérite qu’on se penche dessus et qu’on la combatte ». La comédienne n’a rien perdu de son appétence pour son métier qu’elle désire poursuivre tant sur scène qu’à l’écran.

Metteuse en scène d’un jour

« Le cinéma est plus fait pour poser des questions que pour apporter des réponses. J’attends d’un cinéaste qu’il me laisse faire ce que j’ai envie de faire tout en me donnant une direction. » Isabelle Huppert a pu s’essayer elle-même à la mise en scène en dirigeant les invités du Festival pour la reconstitution de La Sortie des usines Lumière, un rituel joyeux auquel chaque invité d’honneur se plie avec bonheur. Elle a demandé à ses interprètes d’un jour, Sandrine Kiberlain en tête, de sortir du bâtiment en file indienne comme des pingouins sur la banquise. Un bel exemple de la fantaisie de cette grande dame du 7e art.