SORCIERE« Roqya » ou comment la sorcellerie s’est « uberisée »

« Roqya » : Cette histoire de sorcière traquée en pleine cité est plus qu’un film d’horreur pour Golshifteh Farahani

SORCIERELa comédienne incarne une jeune femme accusée de sorcellerie dans ce premier film au suspense haletant en salles le 15 mai
Golshifteh Farahani dans « Roqya » de Saïd Belktibia
Golshifteh Farahani dans « Roqya » de Saïd Belktibia - The Jokers/Les Bookmakers
Caroline Vié

Caroline Vié

L'essentiel

  • Une jeune femme soupçonnée d’être une sorcière est traquée par les habitants de sa cité.
  • Entre féminisme et fantastique, « Roqya » prend le spectateur aux tripes.
  • Golshifteh Farahani est comme toujours épatante en maman courageuse refusant de se soumettre à des croyances d’un autre temps.

Peut-on encore être soupçonné de sorcellerie dans la France des années 2020 ? C’est bel et bien ce qui arrive à la trafiquante d’animaux exotique qu’incarne Golshifteh Farahani dans Roqya de Saïd Belktibia. Cette mère aimante devient du jour au lendemain une paria séparée de son fils et traquée par les habitants de sa cité.

« Bien sûr que le film comporte des éléments de cinéma d’horreur, explique Golshifteh Farahani à 20 Minutes mais ce n’est pas ce qui m’a attirée vers cette histoire qui me semble plus offrir le portrait d’une femme forte confrontée à l’obscurantisme. » La « Roqya », une forme d’exorcisme supposée chasser les djinns ou démons, pourrait causer la perte de cette héroïne au caractère bien trempé comme celle de son enfant, perdu dans un monde d’adultes frappés de déraison.

Résolution et fragilité

« Il y a chez Golshifteh ce cocktail de féminité, de résolution et de fragilité qui correspondait au personnage, confie le réalisateur. Elle savait ce que veut dire être victime d’une haine aveugle et se relever pour faire face. » Jérémy Ferrari, à contre-emploi, en ex-compagnon violent, ajoute à l’atmosphère anxiogène de ce premier film très réussi. Quoi qu’en dise Golshifteh Farahani, Roqya est surtout un thriller haletant, de ceux qui assèchent la bouche et font battre le cœur.

« C’est l’histoire d’une femme qui refuse de se soumettre et qui est prête à en payer le prix, insiste la comédienne. Les choses deviennent plus compliquées quand son jeune fils est mis en péril. » Tiraillée entre la réalité actuelle et des sciences occultes d’un autre temps, la jeune femme est confrontée à la violence d’un système patriarcal désireux de la broyer.

Une performance lumineuse

Ce que le réalisateur décrit comme une « ubérisation » de la sorcellerie ne s’inspire pas précisément d’une histoire vraie mais puise ses idées dans plusieurs éléments réels. « On laisse planer une certaine ambiguïté sur la véracité des croyances, insiste Golshifteh Farahani, mais il n’en demeure aucune sur le fait que mon personnage est maltraité parce qu’elle est une femme et qu’il faut changer les mentalités. Ce film prend la forme fait réfléchir à cela. » Sa performance lumineuse apporte un relief unique à Roqya, une œuvre où fantastique et féminisme font bon ménage pour prendre le spectateur aux tripes.