« Sleep » : Pourquoi ce thriller sud-coréen rappelle « Parasite »
DODO•Grand prix au Festival de Gérardmer, ce film angoissant fait partager les angoisses d’une jeune mère face aux crises de somnambulisme de son mariCaroline Vié
L'essentiel
- Dans ce film, primé au Festival de Gérardmer, une jeune femme commence à craindre les agissements nocturnes de son mari.
- Pourrait-il lui faire du mal sans le vouloir ?
- Sleep fait penser au cinéma de Bong Joon-ho par son humour noir et la tension qui s’en dégage.
Ils savent y faire les réalisateurs sud-coréens pour transformer la cellule familiale en cauchemar. Sleep de Jason Yu, découvert à la Semaine de la critique de Cannes et Grand Prix du Festival de Gérardmer, prend légitimement sa place auprès des œuvres de Bong Joon-ho, réalisateur de Parasite. Ce n’est pas étonnant car le jeune cinéaste a fait ses premières armes comme assistant sur Okja que mettait en scène son aîné. Sleep fait référence aux étranges agissements d’un père de famille somnambule qui terrorise sa jeune épouse. Elle commence à avoir peur de lui, pour elle et pour leur enfant nouveau né. Pourrait-il leur faire du mal ?
« Je vois Sleep comme un film de genre mais aussi comme une réflexion sur le mariage et l’amour, précise le réalisateur Jason Yu. Je trouvais intéressant le fait que la menace vienne de la personne aimée. » Le film prend un ton encore plus tragique quand on sait que le comédien principal, Lee Sun-kyun, également à l’affiche de Parasite, a été retrouvé mort en décembre alors qu’il n’avait que 48 ans. Il livre ici une performance particulièrement inquiétante.
Horreur et féminisme
Un appartement bourgeois où le héros vit avec sa femme et leur nouveau-né devient un lieu progressivement angoissant. La cellule familiale – qui devrait être un refuge – se métamorphose en piège au gré d’un scénario malin. Comme dans Parasite, l’humour noir, pointe souvent son nez sans nuire à la tension générale.
L’absurdité de certaines situations préside aux changements de tons qui font souvent le charme du cinéma coréen. Quant à l’homme sud-coréen, Jason Yu en brosse un portrait peu flatteur en jouant habilement sur le hors-champ pour faire deviner à quel point il peut être dangereux.
Une société brutale et misogyne
La société sud-coréenne, telle que la montre Jason Yu, n’est guère plus engageante. Comme son mentor, le réalisateur flirte avec l’horreur pour en faire appréhender la brutalité teintée de misogynie. « Je me doutais de l’interprétation féministe que pourrait générer mon film », reconnaît Jason Yu. Il fait montre d’un talent réel pour montrer le point de vue d’une jeune mère brillamment jouée par Jeong Yu-mi.
Les chroniques horrifiques sud-coréennes savent toujours taper près de l’os pour déranger le spectateur. Et le cinéma sud-coréen compte maintenant un nouveau nom à surveiller de très près : on n’a pas fini d’entendre parler de Jason Yu après ce premier film réussi.