« Une fille à moto, c’était soit une prostituée, soit un travelo »… Anne-France Dautheville raconte son tour du monde
Témoignage•Anne-France Dautheville a défié les conventions en parcourant le monde à moto dans les années 1970, une époque où l’idée d’une femme seule sur deux roues était presque impensableLucie Franco
Dans sa veste fleurie, les yeux d’un bleu perçant et le sourire aux lèvres, Anne-France, 80 ans, revient sur sa vingtaine, confortablement assise dans le fauteuil de l’émission « FOCUS » sur 20 Minutes TV.
Mai 1968 a été pour elle un évènement libérateur. À une époque où les aventuriers du bitume étaient presque exclusivement des hommes, elle s’élance, animée par une passion pour la liberté et le voyage. Elle voulait faire quelque chose de grand. Anne-France Dautheville s’est alors dit : « Et si je faisais le tour du monde ? » En juillet 1973, elle s’est élancée sur sa petite Kawasaki : « C’était une petite moto, mais au moins celle-là, je pouvais la retourner seule. (rire) »
Au départ de Montréal, Anne-France rejoint l’Alaska. En avion, la moto en soute, elle atterrit à Tokyo, où son bolide est récupéré. S’ensuit un trajet jusqu’à Mumbai, où elle fait un petit tour de l’Inde, et décide de revenir en France, passant par le Pakistan, l’Afghanistan, l’Iran, la Turquie, la Bulgarie, la Yougoslavie et l’Autriche « et puis de l’Autriche à la France : les doigts dans le nez ! », s’esclaffe-t-elle.
Une épopée qui dure plusieurs mois et qui l’amène à affronter des routes accidentées, mais aussi des rencontres inoubliables avec des populations locales. En plein dans les années 1970, les clichés vont bon train, beaucoup qu’elle triche, en mettant sa moto dans un camion. D’autres imaginent qu’elle est lesbienne. À l’époque, une fille à moto, « c’était soit une prostituée, soit un travelo ».
Un voyage impossible aujourd’hui
Si l’aventurière a pu vivre une expérience aussi folle, pas si sûr qu’elle puisse le refaire aujourd’hui. Parmi les nombreuses anecdotes qu’elle raconte, Anne-France précise que certains pays comme l’Afghanistan ne sont plus aussi ouverts qu’avant, et que le coût de la vie a augmenté dans beaucoup de pays… Elle qui voyageait sans trop dépenser, aurait besoin malgré tout de plus d’argent aujourd’hui.
Mais l’octogénaire délivre un message optimiste : après tous les paysages somptueux qu’elle a pu voir, « ce qui est génial en France : on fait 30 km et le paysage change ». Selon elle, pas besoin de traverser le monde pour voyager. C’est dans le Sud-Ouest qu’elle a retrouvé le désert de l’Afghanistan, dans la Drôme qu’elle a reconnu des paysages de l’autre bout du monde…
Pour écouter l’interview complète d’Anne-France Dautheville, et surtout voir les photos de son périple, vous pouvez regarder la vidéo placée en tête de cet article.
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