«La crise d’adolescence n’a rien d’une fatalité» Par Michel Fize, sociologue au CNRS (Centre national de recherche scientifiqu
Aqui revient cette idée folle d’inventer, un jour... la « crise » d’adolescence ? Jean-Jacques Rousseau lui-même, le philosophe pédagogue ! Il n’y aurait, selon lui, qu’adolescents révoltés ou déprimés... Pourtant, tout ceci n’est qu’une fable ! La crise© 20 minutes
Aqui revient cette idée folle d’inventer, un jour... la « crise » d’adolescence ? Jean-Jacques Rousseau lui-même, le philosophe pédagogue ! Il n’y aurait, selon lui, qu’adolescents révoltés ou déprimés... Pourtant, tout ceci n’est qu’une fable ! La crise d’adolescence (de la puberté, en réalité) n’a rien d’une fatalité, ne répond à aucun déterminisme biologique. Et l’opposition aux parents – aux enseignants quelque fois – n’est pas une nécessité, même si les « spécialistes » estiment que non seulement la crise existe, mais encore qu’il vaut mieux la faire tôt que tard. Nous savons maintenant que l’erreur d’analyse tient au fait que la plupart des psychologues, psychiatres, psychanalystes et médecins parlent de l’adolescence sur la base d’observation de jeunes en difficulté psychologique ou sociale, essayant de comprendre et de dessiner le « normal » à partir du « pathologique ». Or, la plupart des adolescents traversent cette période de vie paisiblement, sans conflit avec quelque adulte que ce soit. Il semble bien, comme le soulignait déjà Rousseau, que certaines conditions familiales (dialogue, responsabilités) ou sociales (implication des adolescents dans la vie de la cité) soient de nature à contrarier le processus de crise pubertaire. Il existe ainsi des sociétés où les rapports entre adultes et adolescents sont organisés de telle sorte que chacun ayant un rôle à jouer au sein de la communauté regarde l’autre avec respect et tolérance. C’est le cas des sociétés dites « primitives », où, à l’issue de rites initiatiques, les garçons pubères entrent dans la communauté des adultes : les tensions entre générations sont ainsi tuées de manière préventive. Dans nos sociétés « modernes », il n’y a plus de responsabilités pour les plus jeunes, plus de dialogue avec eux. D’où révolte, mauvaise humeur, violences de leur part. En famille, chacun vit dans son monde, avec ses amis, ses centres d’intérêt. D’où cette opposition que l’on observe ici ou là, entre parents et adolescents. Cela tient à une mauvaise relation entre eux. Pas facile pour des parents de voir grandir leurs enfants ! De voir contester leur pouvoir ! Pas facile pour des adolescents, qui pensent par eux-mêmes, voient la vie à leur façon, de supporter encore l’emprise familiale ! D’où le grand malentendu... et la prétendue « crise ». * Auteur de Ne m’appelez plus jamais crise !, aux éditions Eres, 2003.