colèreMais, au fait, c'est quoi le problème des agriculteurs avec la jachère ?

Manifestation des agriculteurs : C’est quoi le problème avec la jachère ?

colèreEn pleine crise agricole, la jachère est au cœur de toutes les conversations… Mais pourquoi exactement ?
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

Dénoncée avec force dans les manifestations d’agriculteurs à travers l’Europe, la jachère consiste mettre au repos une partie des terres pour régénérer les sols. Méthode traditionnelle, la jachère avait disparu avec l’apparition de désherbants et d’engrais chimiques, avant de réapparaître dans la Politique agricole commune (PAC) en 1992 comme outil de lutte contre la surproduction : les agriculteurs devant geler des terres en échange d’aides.

Aujourd’hui, la jachère trouve un nouvel usage : les services environnementaux (reconstitution des réserves en eau et de la fertilité des sols, refuges de biodiversité, etc.). Elle fait même désormais partie intégrante de la PAC 2023-2027, dans l’Union européenne. Les exploitations agricoles supérieures à dix hectares doivent mettre en jachère 4 % des labourables et donc cultivables. Le respect de cette mesure est une condition indispensable pour toucher les aides européennes de la PAC.

Jachère, guerre en Ukraine et dérogation

En effet, dans la nouvelle PAC entrée en vigueur début 2023, les aides versées aux agriculteurs sont conditionnées au respect de critères agro-environnementaux, dont l’obligation de laisser au moins 4 % des terres arables en jachères ou d’infrastructures agro-écologiques (haies, bosquets, fossés, mares, etc.). Un taux minimum pouvant être ramené à 3 %, s’ils y ajoutent 4 % de cultures intermédiaires ou fixatrices d’azote sans produits phytosanitaires, pour atteindre 7 % favorables à la biodiversité.

Depuis le début de la guerre entre Moscou et Kiev, cette règle avait cependant été suspendue, afin de compenser les perturbations de la production de céréales dans le « grenier de l’Europe », l’Ukraine. Reste que les exportations céréalières ont repris et la dérogation a expiré fin 2023, malgré l’appel cet automne d’une dizaine d’Etats réclamant sa prolongation au moins partielle pour 2024. La fin de cette exception coïncide avec les débuts du mouvement du secteur agricole que l’on connaît aujourd’hui.

« Le sujet général, c’est la continuation » de l’exemption

La concurrence des importations ukrainiennes et les normes sur les jachères figurent, en effet, parmi les grandes revendications des agriculteurs manifestant ces dernières semaines en France, Allemagne ou Roumanie. Et le groupe LR à l’Assemblée nationale a présenté fin janvier un livre blanc sur l’agriculture comprenant 60 propositions qui visent à faire du secteur un « enjeu stratégique » afin de répondre à la colère actuelle. Parmi elles, « moins de charges sur les contrats courts » et sur les emplois permanents, ainsi que la suppression de certaines normes comme « le pourcentage de la ferme en jachère ».

Dans le même temps, la Commission européenne a annoncé qu’elle envisageait d’adopter une nouvelle dérogation aux obligations de jachères. L’exécutif européen examine une proposition sur « une dérogation temporaire à ces règles » imposant donc à chaque exploitation ce taux de 4 % de jachères ou surfaces non-productives, a indiqué le porte-parole de l’institution Eric Mamer. « Le sujet général, c’est la continuation » de l’exemption accordée à la suite de la guerre en Ukraine, a-t-il indiqué, sans livrer de détails. A l’unisson des grandes organisations agricoles, plusieurs Etats membres, dont la France, réclamaient de prolonger cette dérogation.