C'était il y a 70 ans. Le 18 juin 1940, Charles de Gaulle lançait sur les ondes de la BBC son appel devenu célèbre. A l'époque, la radio est le seul moyen à la disposition du général, qui espère être entendu du plus grand nombre. S'il se trouvait dans la même situation aujourd'hui, il ne procèderait pas de la même façon. Reste à savoir s'il serait entendu.

«Le Général de Gaulle avait cette capacité à utiliser les moyens modernes de communication», souligne le philosophe et sociologue Jean-Pierre Le Goff, contacté par 20minutes.fr. Aussi, aujourd'hui, nul doute qu'il posterait «une vidéo sur Internet», reprend Christian Delporte, historien spécialiste des médias et de la communication politique.

Attendre le retweet

Une vidéo virale, sur Youtube ou Dailymotion, «et une lettre ouverte, envoyés sur un média citoyen type Agoravox», précise David Fayon, spécialiste des réseaux sociaux. Reste ensuite au Général à envoyer son «coup de canon» et à faire monter le buzz. Et pour ça, rien de mieux que la trilogie Twitter-Facebook-blog personnel.

«Un tweet incitant à propager le message, avec une URL raccourcie renvoyant vers la lettre ouverte et si possible un hashtag (un mot clé spécifique, NDLR), pour pouvoir guetter les reprises», imagine David Fayon. Ensuite, il n'y a plus qu'à attendre le retweet. «Il lui faudrait aussi relayer l'info sur son compte Facebook, son blog, par mail, et repérer les personnes influentes susceptibles de lui faire écho».

Laisser une trace

L'avantage: laisser une trace. Car si en 1940 l'appel n'a été entendu que par une minorité, un texte ou une vidéo sur le Web pourraient être repris, en France et à l'étranger. «Avec le risque que le message ne soit noyé dans la masse d'informations drainées par Internet», note toutefois Christian Delporte.

Dans son roman Le retour du général, Benoït Duteurtre imagine d'ailleurs un de Gaulle revenant de nos jours et reprenant le pouvoir grâce «à un appel lancé en piratant les ondes de la télé», explique l'auteur, tandis que «le gouvernement français en exil choisit d'utiliser le Web pour tenter de le renverser.»

«La France est morcelée»

«Une petite équipe pourrait faire les choses en grand», assure David Fayon. Mais cela suffirait-il pour que les Français se mobilisent? «Aujourd'hui, la France est morcelée, note Jean-Pierre Le Goff, et les classes sociales dominantes ne sont plus les mêmes.» Pour le sociologue, les paysans et ouvriers de l'époque étaient plus susceptibles de prendre les armes que «la génération actuelle, qui par ailleurs s'est beaucoup pacifiée et est devenu plus individualiste».

«Ce sont les circonstances qui créent l'unité», répond Christian Delporte. L'historien note d'ailleurs que «les Français n'ont pas réagi tout de suite, à l'époque», au message, qui s'adressait d'abord aux militaires. «De nos jours, ça prendrait au moins autant de temps». Mais la vraie question est: «Qui pourrait être le Général de Gaulle aujourd'hui?»

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