Après 15 ans, «Urgences» tire sa révérence
TELEVISION•Jeudi soir, le 331e et dernier épisode d'une série qui a marqué la télé est diffusé aux Etats-Unis...Philippe Berry
De notre correspondant à Los Angeles
«Code bleu! On charge à 200. On dégage. Boum-tchak. Rythme asystolique! Charge à 300. On dégage!! Boum-tchak. Rien. C’est fini. Flat line. On arrête le massage. Heure du décès: 23h00, jeudi 2 avril 2009.» Après 15 saisons qui ont marqué l’histoire de la télévision, la série «Urgences» (E.R, en VO) va mourir de sa belle mort, avec un 331e épisode de deux heures diffusé, ce jeudi sur NBC.
Le tremplin de George Clooney
Pendant plus de 20 ans, «Urgences» est resté au stade du script poussiéreux sorti de l’imaginaire de Michael Crichton, inspiré par sa propre expérience d’étudiant en médecine. Avec Steven Spielberg (et après l’adaptation de «Jurassic Park»), Crichton décide d’en faire un pilote pour une série télé en 1994. Le succès est immédiat. Près de 25 millions d’Américains découvrent les aventures des urgentistes du Cook County de Chicago. Il y a le gentil Mark Green, le tombeur Doug Ross (rôle qui propulse la carrière de George Clooney), la jolie infirmière Carol Hathaway (qui devait initialement mourir dans le pilote), le bleu John Carter, le sans-cœur Peter Benton et la besogneuse Susan Lewis.
A son arrivée, c’est un véritable électrochoc qui secoue le petit écran. Sa narration, avec de multiples arcs qui s’entremêlent à un rythme aussi effréné que les intubations et les «NFS, chimie-iono, gaz du sang», donne un vrai coup de jeune au genre plutôt conservateur du drama. La série joue la carte du réalisme médical, s’inspirant de cas réels. Mais surtout, «Urgences» devient un véritable miroir de notre société. Sida, homosexualité, alcoolisme, Darfour... La série trouve toujours un ton juste et pudique pour traiter de sujets complexes.
Malgré quelques touches d’humour, «Urgences» est une série sur les corps et les esprits meurtris. Les patients y restent, les docteurs aussi. Qui n’a pas versé une larme à la mort de Mark Green? N’est pas resté sonné lorsqu’un déséquilibré poignarde Carter et tue Lucy, que Romano perd son bras, ou Ray, ses jambes?
Le succès, puis le déclin
En plus de 300 épisodes, «Urgences» a vu défiler de nombreux guests prestigieux, de Forest Whitaker à Steve Buscemi, en passant par une jeune Kirsten Dunst. Quentin Tarantino a tenu à réaliser l’épisode «Motherhood» en fin de première saison. En 1997, l’épisode «Ambush», filmé et diffusé en direct, est une prouesse récompensée d’un Emmy Awards. Au total, «Urgences» a été nominé 122 fois: un record. La série conquiert le monde en étant diffusé dans presque 200 pays. En France, elle remplace le sacro-saint film du dimanche soir.
Pendant plusieurs années, le show reste le drama le plus regardé de la télévision américaine et culmine à presque 50 millions de téléspectateurs en 1998, bien aidé par la diffusion du finale de la sitcom «Seinfeld». Mais avec le départ de George Clooney après cinq saisons, puis, au fur et à mesure, de tous les personnages historiques, le succès s’effrite. Certes, des nouveaux arrivent (Kerry, Abby, Kovacs, Neela, Sam, Pratt), mais «Urgences» commence à tourner en rond. D’autres séries hospitalières lui volent la vedette («Grey’s Anatomy», «House»).
Si l’audience tourne aujourd’hui autour de 8 millions de téléspectateurs (depuis 1994, Internet, une explosion du câble et les DVD sont aussi passés par là), la série s’est offert une quinzième saison d’adieux, avec des retours en pagaille (Mark Green et Romano en flash- backs, Carter dans plusieurs épisodes, Benton, Carol et même Doug/George Clooney pour un). Ce jeudi soir, on devrait également voir d’anciennes têtes. Pour un dernier au-revoir.
En France, cette dernière 15e saison doit encore être diffusée. Quels moments vous ont marqué? La série va-t-elle vous manquer ? Ou bien l’aviez-vous lâchée il y a longtemps?