Qui va vraiment regretter «Taratata»?

Qui va vraiment regretter «Taratata»?

TÉLÉVISION – Les langues se délient sous couvert d’anonymat dans le monde musical…
Benjamin Chapon

Benjamin Chapon

Passée la fervente mobilisation des fans et de certains artistes pour essayer de sauver «Taratata» via une pétition, et en attendant de voir ce que donnera la version Internet promise par Nagui, le monde de la musique est partagé sur le fin de règne de l’émission musicale, dont la dernière émission est diffusée vendredi soir, à 0h50 sur France2.

Une majorité de musiciens est inquiète de l’avenir et craint, sincèrement, l’appauvrissement de l’offre musicale à la télévision. Mais sous couvert d’anonymat*, nombreux sont ceux qui avouent qu’ils ne regretteront pas «Taratata».

La musique? Pas anecdotique

«On sait ce qu’on perd et on ne sait pas ce qu’on retrouve, philosophe le manager d’un des artistes français les plus exposés cette année. Mais «Taratata», c’était la plaie.» Enregistrements longs et pénibles, confirmations au dernier moment, exposition très limitée… Et surtout, les interviews de Nagui.

Sujettes à blagues récurrentes parmi les attachés de presse de musiciens,les questions de l'animateur «Les artistes français savaient à quoi s’en tenir, raconte l’une d’entre elles. On les préparait en leur disant quelles anecdotes figuraient dans le dossier de presse parce qu’à tous les coups, les questions portaient là-dessus. Mais c’était plus compliqué avec les artistes étrangers.»

Chat c’est une bonne question

Le manager d’un artiste international ayant participé à la dernière de «Taratata» n’en revenait pas. «J’ai été agréablement surpris par la qualité technique de l’émission. Mais ces questions ridicules… Ce n’était même pas vraiment drôle. En tout cas, personne ne rigolait.»

Une attachée de presse confirme: «Les artistes français sont quand même contents de faire «Taratata» parce qu’il n’y a que ça et que ça les flatte. Mais les artistes internationaux ne comprennent pas le concept d’une émission uniquement musicale où, finalement, on leur parle peu de musique. Je me rappelle d’un artiste qui m’avait demandé si c’était une émission animalière parce que Nagui ne lui avait parlé que du chat sur la pochette de l’album.»

Mouiller la chemise

«On peut reprocher beaucoup de choses à Nagui, notamment ses chemises, mais au moins il aime la musique», pondère un directeur artistique. Pour un de ses collègues. «Le problème de «Taratata» était sa solitude. Si tu as un artiste qui ne plaît pas à Nagui, c’est foutu, tu ne passes pas à la télé.»

La plupart des personnes interrogées regretteront ainsi beaucoup plus «CD’aujourd’hui», la pastille quotidienne également sacrifiée par France 2. «C’était souvent l’occasion d’une première télé pour des artistes émergents ou indépendants.»

««Taratata» était une bonne émission de live et un mauvais talk show, tranche l’agent d’une jeune chanteuse qui a débuté grâce à l’émission. Je crois qu’elle incitait les gens à aller aux concerts. Sur scène, il n’y a plus Nagui et ses questions.»

La plupart des interlocuteurs de 20 Minutes ne veulent «pas se fâcher» avec Nagui, unanimement considéré comme «sympa» et avec qui ils espèrent tout de même «encore travailler»