TELEVISIONJudith Louis, directrice de la fiction d’Arte: «Arte veut développer des séries d’anticipation»

Judith Louis, directrice de la fiction d’Arte: «Arte veut développer des séries d’anticipation»

TELEVISIONThe Hour, ce jeudi soir, Real Humans bientôt, Borgen il y quelques semaines, la directrice de la fiction nous détaille la ligne éditoriale des séries d’Arte.
Extrait de la série d'Arte «Ainsi soient-ils», consacrée au quotidien de prêtres en devenir.
Extrait de la série d'Arte «Ainsi soient-ils», consacrée au quotidien de prêtres en devenir. - Alberto Bocos Gil
Recueilli par Alice Coffin

Recueilli par Alice Coffin

«The Killing», «Ainsi Soient-Ils», «Borgen» ces derniers mois, la série britannique «The Hour» ce jeudi soir, la série suédoise «Real Humans» dans quelques semaines, ou «Top of the Lake» la série de Jane Campion dans quelques mois, Arte affiche de très belles productions. Et, à en croire, la directrice de la fiction de la chaîne franco-allemande, les mois et années à venir réservent d’autres surprises. Interview.

Alors, ça y est, Arte va devenir une espèce de HBO gratuit?

Ah, ah, c’est une très belle référence mais j’ai du mal à y croire. Il y a quand même un défi du petit à Arte! On travaille sur un nombre restreint de soirées avec un budget tout aussi restreint, du coup disons que tout se joue sur nos choix! On dit non à beaucoup de projets mais lorsqu’on dit oui on s’engage complètement!

Vous parlez des séries étrangères que vous achetez ou des séries françaises que vous coproduisez?

Des deux car c’est une spécificité d’Arte, ce sont les mêmes personnes qui choisissent et suivent les séries achetées et les séries coproduites. Cela permet d’avoir une ligne éditoriale vraiment globale et forte.

Et c’est quoi cette ligne éditoriale, c’est quoi par exemple le point commun entre «The Hour» et «Ainsi Soient-ils»?

On veut miser sur les séries d’anticipation. Comme l’est «Real Humans» qui décrit un monde qui n’est pas le nôtre, mais qui n’en est pas loin. Cela permet sans avoir recours aux moyens de la science-fiction que nous n’avons pas, de mettre en scène des mondes dans lesquels peuvent s’épanouir des problématiques métaphysiques et romanesques.

Mais concrètement qu’allez vous produire comme type de séries?
Et bien, pareil le fait qu’il y ait de très bonnes séries britanniques ou scandinaves dans le genre polar, comme «The Killing», va permettre de développer au sein d’Arte France des séries de ce genre. Cela nous a montré qu’on pouvait faire des choses très fortes en polars.

Ces séries vous voulez les produire seul ou à plusieurs?
On veut passer à la vitesse supérieure et coproduire avec les Anglais ou les Scandinaves. Je ne dis pas qu’il y a un ADN mais il y a quand même des similitudes en Europe. C’est plus facile de coproduire avec des Européens qu’avec les Américains qui fonctionnent avec des writing rooms ou des saisons de 24 épisodes.

Au-delà de la forme, y a-t-il une communauté de thèmes entre Européens?
Oui, d’ailleurs c’est fou comme dans «Borgen», on retrouvait le fonctionnement de notre système français par exemple. Alors que les séries américaines comme «Desperate housewives» ou certaines séries médicales paraissent toujours un peu exotiques.

Les autres pays européens aussi souhaitent coproduire avec vous?
Oui, oui on est pas seuls dans notre coin! D’ailleurs cela se sent très bien lors des MIP (Marché international des programmes audiovisuels), on se retrouve entre partenaires européens.

Est-ce que tout cet engagement pour les séries change l’image d’Arte?
Oh l’image d’Arte a déjà changé, grâce aux programmes courts, au web. Ce qui a changé c’est que depuis le 1er janvier 2012 nous avons un prime time consacré aux séries. Mon prédécesseur François Sauvagnargues s’était battu pour lancer des séries et elles ont été diffusées en deuxième parties de soirées. Cela n’allait pas, si on crée des séries il faut les assumer, d’où cette nouvelle case de première partie de soirée.

The Hour : les années 50 de la BBC

Judith Louis explique pourquoi elle adore cette série située dans les années 50 et dans le milieu du journalisme télé. «Cela illustre parfaitement le fait qu’il y a une résonnance dans les univers décrits par les séries des britanniques. Là, cela parle de la BBC, mais cela donne envie de créer une série sur les débuts de l’ORTF en France. On retrouverait les mêmes problématiques. Cela raconte l’histoire des pionniers de l’information confrontés aux questions du traitement de cette info, de la place des femmes dans la vie professionnelle, des rapports avec le pouvoir politique. C’est très bien fait et très fort.»