Les chaînes de télé taillent les crayonneurs
Une cinquantaine de caricatures défileront ce soir sur France 5. Elles rythmeront, à 20 h 40, le documentaire Cabu, politiquement incorrect. Une exception tant la lucarne se méfie des dessinateurs. Sur les généralistes, seul Olivier Ranson sévit enco...©2006 20 minutes
Une cinquantaine de caricatures défileront ce soir sur France 5. Elles rythmeront, à 20 h 40, le documentaire Cabu, politiquement incorrect. Une exception tant la lucarne se méfie des dessinateurs. Sur les généralistes, seul Olivier Ranson sévit encore dans « T'empêches tout le monde de dormir » sur M6. « Fogiel ne voulait plus être le méchant de service, il me laissait le soin de dire des horreurs, précise-t-il. J'irais encore plus loin s'il n'y avait pas le filtre du réalisateur ! »
Car lorsqu'on les autorise à s'exprimer, les caricaturistes sont contrôlés. « J'ai tenu quinze jours en 2000 à “Nulle part ailleurs”, se souvient Charb, plume de Charlie Hebdo. Je me suis moqué des animateurs. Qui ont piqué une crise. Résultat, une nana me fliquait et seules les planches les plus soft passaient ! Les gens de télé ont un tel ego, qu'ils supportent mal la dérision. » Et congédient volontiers les fauteurs de trouble.
Après avoir croqué les sportifs pendant cinq ans à France Télévisions, Bernard Chenez a été l'an dernier licencié par Daniel Billalian, patron des sports. « J'ai quand même résisté longtemps, puisque j'étais aussi à Canal+ de 1992 à 2000, souligne l'illustrateur de L'Equipe. La disparition de notre métier à l'écran est significative. Les programmateurs sont de plus en plus consensuels. Ils ne supportent ni le direct, ni les poils à gratter. » Et de citer, comme tous ses collègues, le dessin de Wiaz diffusé dans un « Droit de réponse » en 1987 sur TF1 : « Une maison de maçon, un pont de maçon, une télé de m... » Le groupe Bouygues avait peu goûté et viré le présentateur, Michel Polac.
« Le côté éditorialisant de la caricature est aux antipodes du petit écran », note Tignous. Qui se réjouit d'avoir cette année une « totale liberté », dans « Impertinences », animée par Bruno Masure sur La Chaîne parlementaire. « Il fait des choses très hard mais c'est sur le câble... note Masure. Les dessins par leur concision ont un pouvoir dévastateur.
Alice Coffin