VIDEO. Paris truqués: «L'amertume» puis la prévention à Fréjus/Saint-Raphaël, après un match acheté
FOOTBALL•Le club de Fréjus/Saint-Raphaël compte se porter partie civile après que deux joueurs ont truqué un match de National, en 2014. Le procès pourrait avoir lieu en 2018, selon « L’Equipe »…Jean Saint-Marc
L'essentiel
- C’est une histoire incroyable : des mafias asiatiques qui troublent le destin d’un petit club de foot varois, un gardien haïtien corrompu par un escroc singapourien, des centaines de milliers d’euros en jeu…
- Deux joueurs de Fréjus/Saint-Raphaël sont soupçonnés d’avoir truqué un match, en 2014. Le club va se porter partie civile à leur procès, apprend « 20 Minutes » ce mardi.
Dans les tribunes, un éclat de rire. Sur le terrain, une série d’actions improbables : un défenseur qui cadre une frappe tendue dans son propre but (1-0), un gardien qui se couche au ralenti pour laisser passer un ballon (2-0), puis qui refuse de plonger (3 puis 4-0, à la 22e). Ce vendredi de mai 2014, Fréjus/Saint-Raphaël recevait Colomiers en National. Ce vendredi de mai 2014, un match a été ostensiblement truqué.
Un match à l’intérêt sportif anecdotique, sur lequel des milliers d’euros, peut-être un demi-million, même, ont été pariés, notamment en Asie. L'Equipe Magazine révèle que Matar Fall et Dominique Jean-Zéphirin ont été mis en examen par la justice française. Ce mardi, 20 Minutes apprend que leur ancien club, l’Etoile Fréjus Saint-Raphaël, va se porter partie civile au procès, qui pourrait avoir lieu en 2018.
Aujourd’hui, ces quatre buts gag ne font plus rire personne, à Fréjus. « On ressent beaucoup d’amertume », souffle Fabien Sgarra, directeur de la communication. Le deux co-présidents, eux, ne veulent plus parler aux journalistes : « C’est compliqué. » Fabien Sgarra, de nouveau :
« C’est vraiment terrible pour le club de faire la une de la presse nationale pour de tels faits… On préférerait que ce soit pour des résultats sportifs, comme avec notre parcours en Coupe de France l’an dernier (quart de finale). Le club est une victime collatérale de cette affaire, ça fait des dégâts terribles en termes d’images. »
Les « responsables » de l’Etoile le martèlent : ni le club, ni son entraîneur de l’époque n’ont été mis en cause dans l’affaire. Une antienne, « on ne savait pas ». Maintenant, on sait. Chaque année, les cinquante éducateurs du club signent une charte, leur rappelant qu’il faut « prévenir » leurs joueurs au sujet du « fléau des paris sportifs ». Avant les matchs de Coupe de France, l’an dernier, une note de service a été placardée dans les vestiaires. Et le club a envoyé un courrier à chacun de ses joueurs : il est strictement interdit de parier le moindre euro ou de donner la moindre information à quiconque. « Mais vous ne pouvez pas mettre un gendarme derrière chaque gars », déplore Fabien Sgarra.
Prévention et sanctions
Pas de gendarmes derrière les smartphones mais une solution, tout de même, proposée par le syndicat des joueurs pros. Régulièrement, l’UNFP organise des « croisements de fichiers » avec l'ARJEL, l’autorité de régulation des jeux en ligne. « La dernière loi est très stricte, les joueurs sous contrat n’ont pas le droit de parier sur des matchs de foot, martèle Guillaume Stephan, chargé de mission à l’UNFP. Ça vaut pour les contrats pros mais aussi pour les contrats de formation ou les contrats fédéraux ». L’ancien joueur donne régulièrement des formations auprès des joueurs de centre de formation :
« Notre slogan, c’est « on parie que tu vas tout perdre. » On leur dit qu’il est interdit de parier, mais aussi qu’il est interdit de transmettre des informations : qui est blessé, qui est en forme… Et, bien sûr, que truquer un match, c’est un crime ! On leur explique que ce sont des mafias qui contactent des joueurs qui ont des situations plutôt précaires, dans des petits clubs. On leur dit qu’il faut à tout prix parler si jamais ils sont approchés… Et, bien sûr, qu’il ne faut jamais tomber là-dedans. » »
« On parie que tu vas tout perdre ». En effet : Fall et Jean-Zéphirin sont mis en examen pour corruption passive et association de malfaiteurs. Ils encourent jusqu’à dix ans de prison ferme et jusqu’à un million d’euros d’amende.