VIDEO. «Passionné», «bâtisseur»… Loulou Nicollin était tellement plus qu'un beauf
FOOTBALL•L'emblématique dirigeant de Montpellier va laisser un grand vide dans le football français...B.V. avec J.L et N.C.
C’est la loi de l’image. Dans les prochains jours, vos timelines vont être assiégées de vidéos retraçant les moments les plus épiques de la carrière de Loulou Nicollin, décédé jeudi d’un arrêt cardiaque à l’âge de 74 ans. Pas que des faits de gloire : l’insulte homophobe, les vannes de beauf, les « dérapages » incontrôlés. OK. Loulou Nicollin était la grande gueule du foot français : on adorait son franc-parler, on rigolait de ses formules grivoises, on se moquait du président ramasseur de poubelles.
Mais on l’aimait. Profondément. Parce que Loulou Nicollin n’était pas le con que ces vidéos peuvent décrire. Il était un personnage attachant, intelligent, passionné. D’ailleurs, quand on appelle pour parler de lui, les téléphones décrochent immédiatement et les voix sont émues. Les premiers à qui l’on a voulu parler de Loulou, c’est le Paris Foot Gay. Pourquoi ? Parce que l’histoire du président de Montpellier avec l’association anti-homophobie résume si bien le bonhomme.
Flash-back : nous sommes en octobre 2009 et Nicollin traite l’adversaire d’un soir Benoît Pedretti de « tarlouze ». L’affaire fait scandale, les assos se soulèvent. Julien Pontes, membre du PFG, raconte la suite :
« « Il avait eu des mots maladroits, du registre de l’homophobie, symbolique d’une homophobie un peu inconsciente. Mais il avait eu le grand mérite d’écouter, de comprendre. Il avait alors reçu chez lui notre président de manière chaleureuse. Ensuite, il avait été l’un des rares présidents de club à signer la charte contre l’homophobie dans le football. » »
Il deviendra même président d’honneur du Paris Foot Gay et tournera un clip dont la punchline restera mythique : « l’homophobie c’est pour les tarlouzes. »
C’était Loulou. C’était « une façon de concevoir le sport de façon conviviale, d’être ouvert, poursuit Pontes. Il est allé au-delà des clichés. On a perdu un camarade précieux. » C’est con mais on aurait presque envie d’utiliser l’horrible cliché de « l’homme vrai », si tant est qu’il en existe des faux. Nicollin disait ce qu’il pensait, sans y réfléchir deux fois. Dans le foot, c’est trop rare pour qu’on lui reproche. « Ça va, ça va. Ça va pas, on gueule. Point barre », nous résumait-il si bien dans une interview en 2012.
« Le dernier Mohican dans son genre »
« On pouvait s’engueuler avec lui et le lendemain s’embrasser, retient son ancien joueur Gary Bocaly. Il ne passait jamais par quatre chemins pour dire quelque chose, il ne se gênait pas pour venir dans le vestiaire et nous dire ce qu’il pensait. Il adorait ses joueurs plus que tout, il avait une relation de père avec nous. C’était quelqu’un de franc. Et plus tu l’étais avec lui, plus il t’aimait. Personnellement, ça a été une grande chance de le connaître et de le découvrir. »
Puisqu’on arrive au foot, parlons-en un peu. Il n’a peut-être pas la classe de Pep Guardiola, mais Loulou Nicollin a quand même mené son club de la 4e division au titre de champion de France. Il connaissait le foot, pour de vrai, encore plus que son immense collection de maillots ne le suggère. « C’est un des grand bâtisseurs du foot français, le dernier Mohican dans son genre, confirme l’ancien président lillois Michel Seydoux. Tous les présidents de Ligue 1 vous diront qu’ils ont eu une relation exceptionnelle avec lui, même si avec Loulou rien n’était simple et tout était très compliqué. Quand je suis arrivé à Lille, je me souviens de la première fois où je l’ai rencontré. Il m’a dit "Tu aimes ça le foot, ça te fait bander ?" Tu verras, c’est un sport formidable mais c’est un sport dangereux. »
Qui l’a beaucoup fait souffrir. Les descentes avec Montpellier, les engueulades avec les coachs, son staff, ça use. Mais il n’a jamais perdu sa passion. « Tout le monde a pu s’en apercevoir tout au long de ces années, son cœur battait pour son club, résume Bocaly. Il n’y a qu’à voir, un président qui vient toujours s’installer sur le banc comme il le faisait, c’est très rare. »
Pour lui rendre un dernier hommage, beaucoup utiliseront la photo de Loulou la crête multicolore après le titre de son équipe, en 2012. C’est une belle image. Certains y trouveront un moyen de résumer ce qu’ils croient être la beaufitude du personnage. D’autres y verront toute sa simplicité.
« C’était une promesse qu’il nous avait faite et il a tenu parole. Il a eu la chance de voir sa Paillade remporter la Coupe de France et le championnat. C’est exceptionnel. Il a toujours dit qu’il mourrait en étant le président de Montpellier. Malheureusement, c’est arrivé aujourd’hui. »
Laissons à Loulou le soin de conclure par lui-même ce modeste hommage. C’était à 20 Minutes, en 2012 : « L’image j’en ai rien à braire, tant qu’on gagne. » Putain, tu vas nous manquer Loulou.