Euro 2016: Lewandowski à 0 but? «C'est tellement facile de tailler», peste Guivarc'h
FOOTBALL•L’avant-centre titulaire des Bleus en 98 n’avait pas inscrit le moindre but…David Phelippeau
Il n’en veut pas à la presse, mais répète à l’envi que les critiques sont souvent faciles. L’attaquant des Bleus champions du monde de 1998 Stéphane Guivarc’h, qui n’avait pas inscrit le moindre but lors de la compétition, peut comprendre ce que ressent actuellement l’avant-centre polonais Robert Lewandowski, toujours muet lui aussi pendant l’Euro.
Entre deux rendez-vous pour son entreprise bretonne « Tanguy piscines » pour laquelle il est commercial, Guivarc’h a bien voulu évoquer le mutisme de l’attaquant du Bayern Munich (blessé et incertain contre le Portugal jeudi). Un symptôme que le Breton a bien connu durant l’été 1998.
Comment vit-on ce genre de situation quand on est habitués à marquer ?
Mal car un attaquant est là avant tout pour inscrire des buts et faire marquer les autres. Moi, me concernant en 98, j’ai joué 72 matchs sur la saison en comptant la finale du Mondial, ça avait débuté avec la Coupe Intertoto avec Auxerre, et ça s’était fini avec la finale du Mondial contre le Brésil… Treize mois de compétition sans me reposer donc forcément j’y avais laissé des plumes. D’ailleurs, en début de compétition [contre l’Afrique du Sud], je me blesse. Normalement, la compétition aurait dû être finie pour moi, mais je me suis accroché, battu pour revenir. Je suis revenu pour participer à la fête, mais pas dans les meilleures conditions.
Lewandowski est critiqué. Vous l’étiez aussi…
Lewandowski n’a pas la réussite escomptée, mais il ne se crée pas les occasions non plus. Si on prend le cas de Griezmann, il se faisait critiquer partout après le premier match et là, il est le sauveur. Tout le monde l’idolâtre aujourd’hui… Attention, la Pologne est toujours en course. Même s’il n’a pas marqué, il monopolise sans doute les défenseurs, et ça laisse de la place aux autres attaquants polonais.
Et le mutisme trotte dans la tête ?
Forcément que ça trotte. Pas quand on est sur le terrain, mais en dehors. Mais, les critiques font avancer. Il faut s’appuyer dessus. Après, Lewandowski ne doit pas douter car il est tellement adroit… Alors, oui, il ne marque pas en sélection, mais ça reste la Pologne. Ce n’est ni l’Allemagne, ni la France.
Il faut éviter de lire la presse dans une période compliquée comme ça…
Non, moi, je lisais la presse même si parfois je prenais de gros tacles !
Aucun but alors que vous étiez l’attaquant numéro 1. Ça reste quand même un bon souvenir ?
J’en garde un très bon souvenir. J’étais arrivé tardivement avec le groupe France. Il y avait un système de jeu qui était mis en place par Aimé Jacquet dans lequel j’étais seul devant. Je n’avais pas non plus les hommes de couloir qui débordaient comme à Auxerre. Je savais très bien que j’allais jouer une heure et que j’allais sortir. Mon temps de jeu était compté. Et puis, à force de défendre et de harceler les défenses, je perdais en lucidité devant le but. J’avoue que j’avais beaucoup moins d’efforts à faire au niveau défensif à Auxerre et c’était donc plus facile.
Les mauvaises langues disent que la France a gagné en 98 sans véritable attaquant. Ça vous touche ?
Moi, ça ne me fait rien du tout. C’est tellement facile de tailler, de critiquer. On est humains et on peut avoir une méforme, et tout de suite, on se fait attaquer. Tout cela n’est pas très grave au final. Vous savez, avec cette équipe, on n’est partis de rien. On se faisait tailler de partout, mais c’est tellement facile de retourner sa veste.
En finale contre le Brésil (succès 3-0), vous donnez l’impression d’être au bout du rouleau…
J’arrive en finale carbonisé. De toute façon, après ma blessure du début de compétition, j’ai beaucoup souffert. Tenez, je me rappelle, lors du stage à Tignes, avant le Mondial, en faisant des raquettes, je m’étais fait une contracture au mollet, ça commençait très mal pour moi.
Et vous manquez trois gros face-à-face contre Claudio Taffarel… C’est le regret de votre vie ?
Plus deux que trois car il y en a un sur lequel j’étais trop loin… Non, pas le regret de ma vie mais un vrai regret sportif. Après, devenir champion du monde ce n’est pas rien non plus. Surtout quand on se retourne sur ma carrière faite des hauts, de bas, de National, Ligue 2 etc...
Revenons à Lewandowski, un conseil à lui donner ?
Il doit prendre le recul nécessaire, mais je me fais aucun souci pour lui.