Wenger salue Monaco et Arsenal «les deux clubs assez fous pour l'engager»
FOOTBALL•Le coach d’Arsenal conserve un œil attentif sur l’évolution du club monégasque, qui lui a donné sa chance quand il était un tout jeune entraîneur, dans les années 1980…Nicolas Camus
De notre envoyé spécial à Londres,
La rencontre entre Arsenal et Monaco, c’est forcément un peu la sienne. S’il a commencé sur le banc de Nancy, c’est à Monaco qu’Arsène Wenger a vu sa carrière d’entraîneur décoller. Champion de France au terme de sa première saison sur le Rocher, en 1987-1988, il a également atteint la finale de la Coupe des Coupes 1992. Avant de faire d’Arsenal, qu’il a rejoint en 1996 après deux saisons au Japon, un club incontournable. Ce 8e de finale de Ligue des champions est donc un moment spécial pour lui, de celui qui invite à se pencher sur son propre parcours. L’homme n’est pas fan de l’exercice, mais se prête au jeu de la conférence de presse avec le sourire.
Monaco fait partie de votre histoire. Est-ce que cela vous arrive de vous retourner sur cette période?
Notre métier fait qu’on se concentre toujours sur le lendemain. Je ne dis pas que je ne le ferai pas un jour, mais vu que je n’ai jamais arrêté -je dois être l’un des rares techniciens français dans ce cas, d’ailleurs- je n’ai pas eu le temps de me retourner. Ce sont deux clubs qui ont été assez fous pour m’engager. Ce n’était évident pour aucun des deux à l’époque où ils l’ont fait. J’ai beaucoup de respect pour ça.
L’émotion sera peut-être plus forte au retour à Monaco?
Oui, sans doute. Là je ne sors pas du contexte habituel. En plus, ils ne joueront pas en rouge et blanc, c’est nous qui évoluerons avec ces couleurs (sourire).
Quels souvenirs avez-vous de votre première saison à Monaco, conclue par le titre de champion?
Avec le recul, je me rends compte que j’avais une très bonne équipe. J’avais des joueurs intelligents et forts. En plus à l’époque, on n’avait le droit qu’à deux étrangers, l’avantage fiscal était réduit. On avait Hateley et Hoddle, et ensuite j’ai pris Weah. Et puis on avait de très bons joueurs français, comme Amoros et Petit, un peu plus tard. C’était la fin de la période Bez [à Bordeaux], le début de celle Tapie [à Marseille] et de Canal + au PSG. On était quatre équipes à faire la loi.
Et concernant la finale de 1992, disputée le lendemain de la catatrophe de Furiani?
C’était la nuit de la hantise. On ne s’était pas couchés, on était dans un état catastrophique. On avait Jean-Luc Ettori, qui était corse, dans les buts... Le président a été appelé, on était tous rassemblés à l’hôtel. Ce n’était pas une préparation de finale de coupe d’Europe.
Au moment de partir de Monaco, vous vous êtes dit que vous ne resteriez plus jamais aussi longtemps dans un même club?
Non mais… (il réfléchit) Je me suis demandé si j’allais revenir en France. C’était une période difficile [Furiani, l’affaire OM-VA un an plus tard]… Au départ, je ne suis pas parti de France pour ne pas y revenir, mais le hasard a fait que ça s’est passé comme ça. Ensuite, j’étais très bien au Japon, j’étais prêt à y rester. Je m’étais juste dit que si je revenais en Europe, c’était pour aller dans un grand club.
Le Japon était la destination parfaite pour tourner la page?
Ce n’était pas seulement pour échapper au foot français, c’était surtout pour moi, pour connaître autre chose. J’avais entraîné dix ans en France, les Novotel de Brest, de Lille et de Sochaux souriaient quand j’arrivais, il était temps de partir! Je me suis dit que c’était le moment de connaître autre chose. J’avais 44 ans… Si tu ne pars pas à cet âge, tu ne pars plus.
Et qu’est-ce qui fait que vous êtes toujours à Arsenal?
Parce que je n’ai plus 44 ans (il sourit). J’en ai 65! Je suis à la fin du marathon. Ici, j’ai rencontré les conditions idéales d’expression pour un entraîneur. Très jeune, j’ai compris qu’il fallait mieux maîtriser un maximum de choses qui entouraient l’équipe parce que même les choses que tu n’as pas décidées, tu en es responsable. La manière de fonctionner ici était sûrement celle qui correspondait le mieux à ma personnalité, à ce que j’aimais faire dans le foot.
Que pensez-vous du nouveau projet monégasque, plus axé sur les jeunes?
Je crois plus dans ce deuxième projet que dans le premier [l’achat de joueurs à prix d’or]. Parce qu’il me ressemble plus, peut-être, mais surtout parce que quelle que soit la richesse d’un individu, mettre 150 millions d’euros par an, ce n’est pas possible à long terme. Ça pose problème. Le modèle actuel est plus viable économiquement et correspond plus à l’image de Monaco.