RUGBYCoupe du monde de rugby : Comment l'Angleterre a préparé son match de la mort face à l’Australie

Coupe du monde de rugby : Comment l'Angleterre a préparé son match de la mort face à l’Australie

RUGBYLes hommes de Stuart Lancaster doivent battre les Wallabies samedi soir pour voir les quarts de finale…
Les Anglais Barritt, Vunipola, et Farrell, sont au pied du mur.
Les Anglais Barritt, Vunipola, et Farrell, sont au pied du mur.  -  SIPANY/SIPA
Julien Laloye

J.L.

De notre envoyé spécial à Cardiff (Pays de Galles),

C’est tout un peuple qui est mort de trouille, avant, peut-être, de rentrer à la maison mort de honte. S’il ne bat pas l’Australie ce soir à Twickenham, l’Angleterre deviendra le premier pays hôte d’une coupe de monde de rugby à ne pas passer les poules. Depuis sa défaite improbable face aux Gallois samedi dernier (25-28), le XV de la Rose doit affronter une pression monstrueuse des médias et des anciens joueurs, entre autres. Retour sur une semaine légèrement agitée pour nos amis anglais.

Dimanche, la gueule de bois galloise : Pourquoi ne pas avoir tenté la pénalité de l’égalisation ?

Avant de sortir la sulfateuse sur tout ce qui porte un maillot blanc, les médias s’interrogent sur le dernier tournant du match : une pénalité « tentable » (mais en coin) snobée par les Anglais pour une pénaltouche qui ne donnera rien dans la dernière minute. « Cette décision me revient, assume le capitaine Chris Robshaw. On a essayé d’aller chercher la victoire car la pénalité était difficile à tenter mais malheureusement cela n’a pas marché. On avait pesé le pour et le contre et l’on pensait que cela pourrait nous permettre de remporter le match. » Bien vu l’artiste.

D’autant que derrière, le bonhomme se prend la déferlante pleine poire : « C’est une grande décision à prendre mais si on le fait, il faut assurer derrière. Ce que l’on n’a pas fait. A ce moment-là, j’aurais signé pour un nul », lance, amer, le sélectionneur Stuart Lancaster. « Je pense que J’aurais mis cette pénalité sans problème » ajoute Farrell. Bien la solidarité, ne changez rien surtout.



Lundi, on change de bouc émissaire : Mike Brown fait rire tout le royaume

Après Chris Robshaw, c’est Mike Brown qui prend cher. L’arrière british, en plus d’avoir concédé la dernière pénalité de la gagne à Biggar, est moqué dans tout le royaume pour son interview post-match, il est vrai moyennement encourageante. In extenso ça donne ça :

« #IHateMikeBrown #scrumV #cheerupmike #awkward pic.twitter.com/TcPLPEnn5G — Lucy Jones x (@lucyjonesooo) September 27, 2015 »

Question : « Vous avez concédé beaucoup de pénalités dans ce match »

Réponse : « Oui, ça nous a coûté le match »

Quesiton : « Vous regrettez de ne pas avoir pris la dernière pénalité ? »

Réponse : « Non, on a essayé, on a perdu »

Question : « Vous pensez pouvoir vous rattraper face à l’Australie »

Réponse : « J’espère. Sinon ça veut dire qu’on sera éliminés »

Question :…

Réponse : « C’est bon je peux y aller ? »

Mardi, on parle arbitrage : les Anglais sont accusés de tricher en mêlée

A J + 3, toujours pas de rayon de soleil en vue à Pennyhill Parke, le camp de base du XV de la Rose. Bob Dwyer, l’ancien coach de l’Australie championne du monde en 91, s’en prend à Joe Marler, le pilier gauche anglais, qu’il accuse de pousser systématiquement de travers. Jonathan Kaplan, un ancien arbitre international très actif sur twitter, confirme, photo à l’appui.

« J’ai beaucoup de respect pour les arbitres et les arbitres français en particulier, lance l’entraîneur des avants anglais Graham Rowntree, pas du tout faux-cul, à propos de Romain Poite, l’arbitre du choc à venir. Ils font preuve de tellement de sang-froid pour arbitre les mêlées. Il (Romain Poite) aime les mêlées et en arbitre toutes les semaines en Top 14, où c’est un secteur primordial. Je suis un grand fan : il a pris de bonnes décisions envers notre paquet d’avants par le passé ». Un peu plus de pommade Graham c’est possible ?

« @WorldRugby be strict on Joe Marler's scrum tactics #ScrumStraightJoe pic.twitter.com/EQQxwpc6mw — deGranville (@PVilsoni) September 29, 2015 »

Mercredi, jour du « Ta gueule l’ancien » : Will Carling charge le sélectionneur anglais

L’ancien capitaine des années « sorry, good game » balancés à la face de Frenchies impuissants, ne se prive pas pour critiquer son équipe de cœur. Interrogé par la BBC, Will Carling marche à pieds joints sur la tête de Stuart Lancaster, le sélectionneur : « Il traite ses joueurs comme des enfants dans une classe d’école. A force de répéter qu’il n’a pas de leaders et qu’il doit prendre toutes les décisions, personne ne prend ses responsabilités sur le terrain. Il fallait prendre la pénalité et tenter d’obtenir le match nul, qui n’aurait pas été un mauvais résultat. Mais il y a eu trop de confusion entre des joueurs qui n’ont pas l’habitude de décider ». Réponse des joueurs, dans la foulée : « c’est ridicule », envoie Richard Wigglesworth, le demi de mêlée, dans le Guardian. Bonne ambiance.

« Hell of a week ahead for England.Hell of a chance to write a great page in history. When under the most pressure come the sweetest victories — Will Carling (@willcarling) September 28, 2015 »

Jeudi, le Prince Harry arrive au soutien : vous la sentez la pression ?

Lancaster balance sa compo de la dernière chance. Burgess, critiqué de toutes parts pour ses choix erratiques au centre (notamment par ce billet assassin de Gordon D’Arcy, l’ex-international irlandais) est remplacé par Joseph. Le Prince Harry, venu encourager les troupes avec un maillot sur le dos, joue le préparateur mental de circonstance avec plusieurs titulaires. Humilié par son frère le week-end précédent (Le Prince Williams est aussi le vice-président de la fédération galloise), Harry n’a pas envie de passer pour couillon deux semaines de suite, si l’on en juge sa barbe de trois jours et son air de prêtre jésuite en colère ballon en main.


Vendredi, retour de bâton : Les Anglais (re)font les malins, les Australiens se gaussent

Cinq jours après le désastre de Twickenham, il faut croire que la douleur s’estompe. Les Anglais retrouvent de la prestance : Clive Woodward, champion du monde en 2003 en tant que sélectionneur, nous explique que les Australiens « ne sont pas des joueurs intelligents », pendant que Danny Cipriani, écarté du mondial au dernier moment, assure qu’aucun « Aussie » n’aurait sa place dans l’autre camp.

« Danny ne jouerait pas chez nous non plus, je crois », préfère en rigoler Quade Cooper. « Monsieur Woodward a raison : je n’ai obtenu que 300 sur 500 à mon certificat de fin d’études (équivalent du bac, NDLR). Ma mère n’était pas très contente, elle m’a supplié de travailler dur. C’est comme ça que je m’en suis sorti, rétorque de son côté Michael Cheika, l’entraîneur des Wallabies. Mais c’était un hasard, je suppose… Parfois, ce qui fait la différence dans ce jeu, ce n’est pas le quotient intellectuel mais le quotient émotionnel ». La belle ogive.

Samedi, jour de gloire ou de désespoir : même le Financial Times s’y met

Comme si ce n’était pas assez clair, la presse britannique rappelle ce qui se joue un peu plus tard dans la journée à Londres : l’intérêt de continuer cette Coupe du monde si les Anglais n’y sont plus, rien de moins. Au Guardian, où tous les journalistes livrent leurs pronostics, personne ne veut croire au drame. Graham Henry, dans sa colonne hebdomadaire, rappelle que la France est sortie grandie de pareille situation en 2007. Mais à l’époque, « Ireland was all over the place », ce qui veut dire en gros que les Irish étaient une équipe de bras cassés.


Même le Financial Times, habituellement si éloigné des affaires sportives du monde, a choisi de consacrer sa photo de Une sur l’événement. On n’a pas poussé l’audace jusqu’à ouvrir la bible de la City, notre allergie des pages saumon du Figaro nous ayant déjà coûté plusieurs séjours aux urgences, mais on imagine le contenu. Et surtout la tempête d’immondices qui attend les Anglais si ça devait mal de finir ce soir…