VIDEO. Stade Français: Grève ou rachat, comment les joueurs et les supporters se rebellent contre la fusion
RUGBY•Ils refusent de voir leur club mourir à cause d'une fusion avec le Racing...Aymeric Le Gall
Le jour d’après. Si la nuit des supporters du Stade Français et du Racing 92 n’a pas dû être de tout repos après l’annonce surprise-surprise de la fusion entre les deux clubs, chez les joueurs stadistes c’est encore pire. Au moins leur aura-t-elle porté conseil. En effet, alors que les rumeurs d’une grève des soldats roses circulaient depuis hier, c’est désormais bel et bien officiel, le Stade Français refuse de mettre les crampons ce week-end contre Castres si les choses restent en l’état.
D’une bombe à l’autre
Réunis hier au stade Jean-Bouin pour exprimer leur incrédulité et leur colère, joueurs et supporters du Stade Français semblent donc unis autour d’une même cause : lutter pour la survie de leurs couleurs. Cette décision, unique dans l’histoire du rugby professionnel français, va véritablement faire l’effet d’une bombe dans le milieu du ballon ovale. Au moins autant que ne l’a été l’annonce de la fusion. La réponse du berger à la bergère en somme.
Depuis le séisme provoqué par le duo Lorenzetti-Savare, tout sourire dans les salons d’un resto des jardins de Bagatelle, c’est peu dire que la colère gronde dans l’entourage des deux clubs. Bon, ok, surtout du côté des pensionnaires de Jean-Bouin, probablement les plus impactés par cette drôle de nouvelle. Djibril Camara a carrément sorti les violons aujourd’hui lors d’une conférence de presse organisée avec le XV de France :
« « Je suis triste pour mon fils qui ne connaîtra pas le Stade Français. C’est comme si on m’avait annoncé que ma mère était décédée ». »
« J’essaie encore de réaliser ce qui a été fait dans notre dos, avouait ce matin Jonathan Danty à L’Equipe. On nous a toujours dit qu’on était l’avenir du club. On a souvent entendu que si on partait, le club était mort. Et là, on se rend compte que tout a été fait dans notre dos. C’est un peu dur à avaler. » En face, côté Racing, à part la réaction de Henry Chavancy, c’est un bon gros silence radio qui est de mise.
Comme du côté des joueurs, c’est chez les supporters du Stade Français que la colère est la plus palpable. « Je n’ai pas entendu la moindre réponse officielle de la part des clubs de supporters du Racing alors que du côté du Stade Français, j’étais à Jean-Bouin hier soir, on voyait vraiment qu’ils étaient énervés, tristes, certains pleuraient. Et du côté du Racing, rien », glisse Marius, 28 ans, supporters des Ciel et Blanc.
Des énervés au Racing (aussi)
Si le constat est réel, la nouvelle n’a pas non plus fait que des heureux chez les Franciliens du Racing. « La colère est toujours présente, elle s’est même amplifiée depuis hier, témoigne Jean-Pierre Chivrac, président de l’asso de supporter "Génération Yves du Manoir". Après, ce n’est pas le cas de tous les supporters. Certains sont partisans d’attendre et de voir. D’autres, comme moi, ne veulent pas en rester là. Mais c’est vrai que la grogne est plus forte dans le camp d’en face. Et pour cause, ce sont eux qui ont le plus à perdre, c’est évident. »
C’est vrai que chez les supporters du Stade Français, la pilule a du mal à passer, même en poussant très très fort. C’est tellement bloqué que certains ont décidé de prendre le taureau par les cornes. C’est le cas de Pierre, fervent supporter du club parisien, qui a créé une boîte mail au titre évocateur : sociosstadefranç[email protected]. Contacté par 20 Minutes, celui-ci nous explique le pourquoi d’une telle initiative :
« J’ai fait ça histoire de lancer une idée, pour voir s’il y a des gens intéressés. En 24 heures j’ai reçu plus de 120 mails donc ça montre que le sujet intéresse, il y a beaucoup de bonne volonté. L’idée, c’est que si Savare, qui gère la société commerciale, veut partir avec les actifs au Racing, très bien. Mais l’important, c’est de garder le numéro d’affiliation du club qui est attaché à l’association. Si elle refuse de le vendre à Savare, peut-être qu’elle acceptera de le mettre à la disposition d’une nouvelle entité qui serait créée par des supporters. Mais ça veut dire quoi ? Dans le meilleur des cas tu lèves 200.000 euros. Et avec 200.000 euros tu fais quoi ? Ben tu vas jouer en Fédérale 3. Faut tout reconstruire. L’idée c’est que les supporters puissent continuer toutes les deux semaines à aller voir leur match du Stade Français. »
Son projet n’est pas pour déplaire à tout le monde et un compte Twitter a même été créé (par un autre utilisateur) pour relayer les informations liées à cette affaire. L’idée n’est encore qu’à un stade embryonnaire, et rien ne dit d’ailleurs qu’elle ira vraiment au-delà, mais dans les faits ce genre d’initiative n’est pas dénuée de sens. En 2014, les fans anglais du club de foot de Portsmouth ont réussi à réunir les fonds pour racheter leur club afin que celui-ci ne disparaisse pas dans l’oubli, après avoir longtemps été le joujou de propriétaires peu scrupuleux. Comme quoi, le foot peut parfois donner de bonnes idées à son ennemi juré.