Le suspense devrait s’étirer jusqu’à 20h15 ou à peu près, le temps que Gilles Boulleau nous parle 49.3, Panama papers et festival de Cannes. Puis le présentateur du JT de TF1 se tournera vers Didier Deschamps pour le grand moment qu’on attend tous : celui du lâcher la liste des 23 joueurs censés nous faire descendre les Champs-Elysées en juillet. No spoil assuré. Car si l’on connaît désormais le vainqueur de l’élection présidentielle bien avant 20h à cause de ces foutus réseaux sociaux, le secret des listes d’avant-compétition reste une tradition relativement bien préservée depuis que Le Parisien révélait en Une le nom des 6 exclus de 98 avant la conférence de presse d’Aimé Jacquet.

D’abord parce que la décision finale se prend souvent le dernier jour, à la dernière minute. « Il ne faut pas croire qu’on arrête la liste des semaines avant, explique Alain Boghossian, ancien adjoint de Raymond Domenech et de Laurent Blanc chez les Bleus. Le staff se réunit la semaine précédente puis le jour même, en général, et il y a des arbitrages jusqu’au dernier moment, en fonction des états de forme des uns et des autres, des blessés éventuels, des observations qu’on a pu faire. Après le sélectionneur tranche, et il y a au maximum 2 ou 3 membres du staff dans la confidence jusqu’à l’annonce officielle ».

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C’est dans ce laps de temps que l’on manifeste un peu d’égard pour les grands absents, prévenus une petite heure avant l’heure fatidique par téléphone. « Ça reste exceptionnel, complète Boghossian, on ne va pas appeler tout le monde non plus. Les joueurs savent qu’il va y avoir des gagnants, des perdants et que c’est la règle du jeu ». En pratique, on peut quand même séparer les futurs appelés en trois catégories :

Ceux qui sont sûrs d’y être.

Ceux-ci n’ont pas besoin d’être prévenus. Mieux que ça, ils sont parfois consultés par le sélectionneur sur tel ou tel profil, tel Desailly en 98. « Aimé Jacquet nous consultait sur certains joueurs sur lesquels il hésitait, dans le comportement du groupe, dans la dynamique, dans des scénarios probables ou improbables.Donc on se disait qu’on était forcément dedans. On ne te consulte pas sur un autre gars si tu n’y es pas ».

Ceux qui ont une bonne tête de surprise.

Ceux-là sont les moins surpris de tous, paradoxalement, puisqu’ils ont été prévenus en amont de l’intérêt que leur porte la nation. En 2006, Pascal Chimbonda savait qu’il allait être convoqué,comme il le raconte à Metro. « Domenech m’a appelé et il m’a demandé quels étaient mes projets. Je lui ai répondu que je partais en vacances en famille, comme le Championnat était terminé. Alors il a dit : "Je pense que tes vacances, tu vas les repousser, parce que tu vas peut-être faire partie du groupe. Il y aura deux surprises dans la liste ».

Ceux qui sont probables-mais-bon-c’est-pas-sûr.

Les moins chanceux du lot. Ils ont 90 % de chances de voir leur nom apparaître à l’écran, mais personne ne leur a confirmé. Un proche de Coman, par exemple, nous expliquait n’avoir reçu aucun signal positif ou négatif de la Fédération ou du staff. L’envie de se renseigner peut-être forte, mais c’est inutile d’essayer de gratter des infos selon Boghossian. « C’est faux de penser que les agents ou les agents nous harcèlent. Et si c’est le cas, on leur dit d’attendre 20h, comme tout le monde ».

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Venons-en aux fuites proprement dites. Le copinage avec certains journalistes n’est pas à exclure, évidemment. On a connu des sélectionneurs d’autres sports majeurs qui donnaient la compo la veille au soir par texto (pas à nous, hein). Mais le plus gros danger reste de loin le stagiaire de TF1 qui met la main sur le précieux document par hasard et qui le balance sur Twitter à 19h. Pour éviter pareille mésaventure, la chaîne veille sur la liste comme un morceau de la Sainte Croix ramené de Jérusalem.

Jérôme Saporito, le directeur adjoint de TF1 détaille le dispositif mis en place depuis 2010 et probablement reconduit tel quel jeudi :

« « Philippe Tournon (l’attaché de presse des Bleus, ndlr), arrivera le premier vers 18h avec une clé USB qui contient les 23 noms et ceux des réservistes, s’il y en a, pour qu’on ait un peu de temps afin de réaliser la mise en image des joueurs avant le JT. Ensuite, la clé sera conservée dans une salle gardée par un vigile. Il y aura quatre personnes en tout qui seront au courant des noms avant l’annonce du sélectionneur. Le moment crucial ? Quand la liste arrive à la régie. En général, on demande aux techniciens de laisser leur téléphone à l’entrée de la pièce. Puis Gilles Bouleau sera mis au courant afin qu’il puisse préparer quelques questions ». »

On peut déjà te souffler la première mon Gillou : « Didier, pourquoi n’avoir pas sélectionné Hatem Ben Arfa que toute la France attendait ? ».