FOOTBALLMondial 2014: «Un bon nom de ballon, c’est un nom un peu bizarre», estime un spécialiste du naming

Mondial 2014: «Un bon nom de ballon, c’est un nom un peu bizarre», estime un spécialiste du naming

FOOTBALLCelui là s’appelle «Brazuca»…
Propos recueillis par Romain Baheux

Propos recueillis par Romain Baheux

Pendant un mois, on ne verra que lui. Le ballon du Mondial 2014 a un petit nom et il s’appelle «Brazuca». Il succède au «Jabulani» de la Coupe du monde sud-africaine de 2010. Mais comment baptise-t-on un ballon? Explications avec Marcel Botton, créateur du groupe Nomen et spécialiste du naming.

Depuis quand nomme-t-on les ballons du Mondial?

Dès 1930 et la première Coupe du monde. Très vite, cette logique d’attribuer un nom à un ballon est devenue une logique commerciale. La volonté du fabricant est de profiter d’une partie de l’immense attention médiatique donnée à la Coupe du monde sur ce ballon. Le ballon a un nom, on peut le commercialiser et vendre sur sa notoriété. Avant l’arrivée d’Adidas en 1970, on donnait des noms mais on s’en foutait un petit peu. Cet équipementier a souhaité jouer sur sa notoriété.

C’est quoi, un bon nom de ballon?

C’est un nom un peu bizarre, qui doit interpeller l’esprit. C’est comme pour le terme vuvuzela. Ce mot, que personne ne connaissait, s’était répandu lors du Mondial 2010 juste parce que c’était étrange et qu’il y avait un certain plaisir à le prononcer. Si on demande chez Ruquier ou aux Grosses Têtes ce qu’évoque le nom Top Star (nom du ballon de l’édition 1958), tout le monde s’en fout. Si on demande la signification de Brazuca, ça interpelle. Bon, le petit inconvénient pour ce nom c’est que ça fait quand même beaucoup penser à bazooka. L’association se fera facilement mais ce sera vite surmonté.

Comment le nom de «Brazuca» a-t-il été choisi?

Adidas a fait voter les Brésiliens en leur donnant le choix entre trois noms connotés brésiliens et ils ont choisi celui-là, qui signifie la fierté nationale à travers l’art de vivre. A une époque, on pensait qu’il fallait des noms mondiaux mais ça sonnait un peu apatride. On en est revenu car ce n’est pas parce que l’on s’adresse au monde entier qu’il ne faut pas avoir d’origine. On relie le nom du ballon au pays où est organisée la Coupe du monde, on lui donne une signature géographique comme pour le Jabulani en 2010. Le Brésil va être extrêmement présent dans la sphère médiatique. Là, ce nom va le relier directement à ce pays.

Est-ce un outil de promotion efficace pour Adidas?

La faiblesse de ce naming est qu’un ballon n’a pas besoin de nom pour être désigné. C’est moins puissant que pour le stade où les journalistes sont obligés de le nommer et de citer le nom de la marque par conséquent. Il peut être cité parce que c’est amusant et que cela fait partie du folklore mais ça sera moins automatique.

Comme pour un stade, peut-on imaginer qu’une entreprise y accole son nom?

On peut imaginer un co-branding avec Adidas et une autre société et je pense que cela risque d’arriver un jour. Cependant, le public qui pourrait ne pas apprécier. Avec un ballon appelé «Brazuca», le lien direct avec la marque n’est pas évident. Passer d’un nom qui promeut une nation à un nom qui promeut une entreprise, ça peut entraîner des réticences.