La scène est bien connue. L’attaquant est fauché dans la surface de réparation adverse, l’arbitre expulse le fautif et son équipe se retrouve à dix et sanctionnée d'un penalty. Communément appelé double peine – ou triple si on prend en compte la suspension conséquente au carton rouge -, ce principe pourrait être aboli. Jeudi soir, l’UEFA a émis le souhait de ne sanctionner que d’un carton jaune le joueur qui commet cette faute dans sa surface de réparation. Le Board, l’organe garant des lois du jeu, doit maintenant étudier cette demande. Ancien arbitre international, Bruno Derrien évoque cette réforme et ses possibles conséquences.

La situation actuelle. «A la base, ça a été mis en place pour limiter les actes d’anti-jeu. Ça pouvait être mal compris, on se demandait pourquoi on mettait un carton rouge plutôt qu’un carton jaune. C’était à l’arbitre d’interpréter. Dans la règle, la notion de dernier défenseur n’existe pas. La règle, c’est quand un joueur a une occasion nette de marquer et qu’elle est entravée par une faute, l’arbitre doit expulser le joueur fautif. Il y a des éléments comme la trajectoire de la balle ou le mouvement de l’attaquant pour trancher. Là où c’est plus simple, c’est quand un joueur boxait le ballon de la main sur sa ligne comme lors du quart de finale à la Coupe du monde 2010 entre le Ghana et l’Uruguay avec l’expulsion de Luis Suarez.»

L’intérêt du changement. «Si elle est appliquée, cette mesure diminuera mathématiquement le nombre moyen de cartons rouges sur une saison. Parfois, des fautes bénignes empêchent un joueur de marquer et l’équipe du joueur fautif se retrouve à dix très rapidement. Le plus dur, c’est quand ça concerne le gardien et que les trois changements ont déjà été effectués par l’entraîneur. Après, il y aura toujours des cartons rouges. Un défenseur qui effectue un tacle inconsidéré dans la surface sera expulsé. Il faut prendre en compte la nature de la faute.»

Les risques du changement. «On pourrait se retrouver avec davantage de situations d’anti-jeu. Si un joueur met une main sur sa ligne pour sauver un but, est sanctionné d’un carton jaune et que l’équipe adverse rate le penalty, où est la réparation par rapport à un but accordé? Comme je l’expliquais, un joueur qui file au but en-dehors de la surface pourra toujours être sanctionné d’un carton rouge. Il faut aussi voir que la notion d’anéantissement d’occasion de but existe en-dehors de la surface, là où il n’y a donc plus de double peine puisque pas de penalty. A un mètre près, le joueur pourrait être exclu sans entraîner de penalty ou rester sur le terrain avec un carton jaune s’il commet une faute dans la surface. Ce sont des questions qu’il faut se poser.»