Reynald Pedros: Après France-Bulgarie 93, «tu entres dans les vestiaires… c’était un cimetière»
•FOOTBALL – Le consultant de Canal+ se souvient parfaitement du dramatique France-Bulgarie d’il y a presque vingt ans jour pour jour…Propos recueillis par David Phelippeau
17 novembre 1993: La France s’incline (1-2) à l’ultime seconde contre la Bulgarie et fait une croix sur la Coupe du monde aux Etats-Unis. Vingt après, l’ancien milieu de terrain du FC Nantes Reynald Pedros, titulaire au Parc des Princes, ce soir-là, et aujourd’hui consultant sur Canal+, nous raconte l’une des pages les plus sombres de l’histoire du football français.
Quelle image gardez-vous de ce désastre?
Le but de Kostadinov. Il est assez exceptionnel. On est dans leur camp. On perd un ballon et on commence vite à sentir que ça sent le roussi. Alain Roche contrôle sans le vouloir le ballon pour Kostadinov. Laurent Blanc n’a jamais voulu autant tacler de sa vie mais il ne contre pas le ballon. La frappe va se loger sous la barre de Bernard Lama.
Et après?
Certains pleurent. On est abasourdis par ce qu’il nous arrive. Tu entres dans les vestiaires... C’était un cimetière. Je me souviens que Papin, quand je retourne aux vestiaires, me dit : «Toi, tu en feras d’autres, t’es jeune (22 ans). Moi, c’était ma dernière chance d’aller à un Mondial». C’est vrai que sur le coup, je me dis qu’il a raison mais finalement je n’en jamais fait d’autres.
C’est ce message que vous voulez faire passer aux Bleus actuels?
Oui, il ne faut pas se dire qu’il y aura d’autres opportunités d’aller à un Mondial. Il n’y aura peut-être pas de deuxième chance. Il ne faut pas qu’ils se disent : «Je suis jeune, j’aurai sans doute une autre occasion de faire une Coupe du monde!».
Y avait-il des soucis chez les Bleus à l’époque?
Je ne suis pas d’accord avec ceux qui disent qu’il y avait une tension énorme entre Parisiens et Marseillais. Moi, je ne l’ai jamais ressentie. Ça chambrait car c’était deux clubs forts du championnat. On parlait aussi de la rivalité entre Papin et Cantona mais je n’ai jamais senti ça sur le terrain.
Y avait-il un peu de suffisance?
Non. Un mois avant, on avait pris une claque contre Israël. On était donc mis en garde. Ce match de la Bulgarie a été abordé comme il fallait. Je me répète, c’est ce but magnifique qui nous élimine. C’est la beauté du football. Pour eux c’était génial, pour nous, c’était dramatique. On n’a rien négligé en tout cas. On a cherché des excuses et des coupables à cette défaite mais il n’y a pas eu tant d’erreurs que ça...
Mais ça restait une anomalie d’être éliminé par la Bulgarie à domicile?
Est-ce que l’anomalie ce n’était pas plutôt de perdre contre Israël, un mois avant, au Parc des Princes? Et il ne faut pas oublier non plus que les Bulgares sont allés en demi-finale de la Coupe du monde après. Ce n’était pas une petite équipe.