France-Ukraine: «Didier Deschamps est un obsédé malsain de la gagne», selon Bernard Pascuito, auteur de sa biographie

France-Ukraine: «Didier Deschamps est un obsédé malsain de la gagne», selon Bernard Pascuito, auteur de sa biographie

INTERVIEW – Il est l’auteur d’une biographie non-autorisée de Didier Deschamps qui sortira le 21 novembre prochain (Editions First)…
Antoine Maes

Antoine Maes

Quand Bernard Pascuito est allé recueillir le témoignage de Bernard Tapie, l’ancien président de l’OM n’a pas fait de détour. «Un livre sur Deschamps? Pouah! Sans intérêt». Il se ravisera sûrement à la lecture de l’ouvrage. Sous le titre «La face cachée de Didier Deschamps» (Editions First, sortie le 21 novembre, 17,95 euros), c’est un «DD» intime qui fait surface dans cette biographie sous forme de portrait intime. Attachant, travailleur, talentueux, mais aussi parfois paranoïaque, souvent complexé et terriblement secret. C’est en tout cas ce qui se dégage du livre, où les témoignages de José Anigo, Pape Diouf, ou Jeannot Werth, son agent pendant 20 ans, éclaire d’une lumière parfois crue la personnalité du sélectionneur des Bleus.

Vous avez écrit des biographies de Coluche ou Gainsbourg. Est-ce que c’était plus difficile de travailler sur Didier Deschamps?

Ce qui change d’abord, c’est que c’est un personnage vivant. Ensuite, c’est plus un portrait intimiste qu’une biographie. Faire une bio d’un type de 45 ans, même s’il a fait beaucoup de choses dans sa vie… Pour les témoignages, j’ai été plus aidé: j’ai rencontré pas mal de gens, mais je n’aime pas trop rencontrer trop de monde. Je trouve qu’au bout d’un moment, les gens vous communiquent leur propre vision des choses. Et j’aime bien me la faire moi-même.

Si vous deviez résumer Didier Deschamps en peu de mots?

Il est beaucoup plus passionnant, beaucoup plus ambigu qu’on ne le croit de prime abord. Et derrière cette «envoutante langue de bois» comme le dit Pape Diouf, j’ai toujours pensé qu’il y avait un mec qui gambergeait. Ce que j’ai découvert en plus, ce sont les fragilités du personnage. Les blessures intimes. Je pense notamment à l’épisode avec Anigo, qui le traite de Calimero. Sa réaction je la trouve totalement disproportionnée. Le mec ne l’a pas traité de « fils de p… » quand même! C’est un type qui n’est pas sûr de lui. Vous savez, Deschamps a perdu son frère quand il avait 19 ans, et ça a aussi renforcé en lui ce sentiment que la vie est injuste. Ces failles là en font un être très humain.

Retrouvez les bonnes feuilles de "La Face cachée de Didier Deschamps" lundi matin en excluvité dans 20 Minutes, avec les témoignages de José Anigo, Bernard Tapie, pape Diouf, Jeannot Werth...

C’est un complexé en fait?

Il n’était pas plus doué que d’autres, et il a souffert qu’on ait toujours privilégié chez lui la tête plutôt que la technique. Il y a des réflexions qui l’ont blessé, comme Platini disant de Deschamps que c’était un porteur d’eau. Et les plus grands compliments qu’on lui fait, c’est toujours ‘’le stratège’’ ou ‘’le meneur d’hommes’’. C’est un obsédé malsain de la gagne. Et les victoires ne valent que dans la seconde où elles arrivent. Il n’y a pas de vraie joie totale. On passe tout de suite à autre chose.

On n’ose pas imaginer son état en cas d’élimination…

Il va être effondré. Pas au point de se tirer une balle, enfin j’espère. Mais il peut avoir une réaction inattendue, qui serait de partir. Parce que autant c‘est un grand tacticien sur le terrain, autant le mec dans la vie prend toujours les mauvaises décisions, comme le montre ses départs de la Juventus de Turin ou de Monaco.

On a l’impression que quand le climat se crispe, il peut s’isoler très vite?

Il ne fait confiance qu’à très peu de gens. Malheureusement, il fait confiance à Bernès. Ca c’est une relation qu’on n’a pas fini d’explorer. Je pense qu’il y a des cadavres entre eux.

Vous lui auriez demandé quoi sur Deschamps?

Comment il a réglé le problème de la passation en équipe de France entre Blanc et Deschamps. Et comment il est arrivé à rester bien avec les deux! Quand on sait que Blanc en veut beaucoup à Deschamps, on est surpris qu’il n’en veuille pas aussi à Bernès.

Vous pensez que Deschamps appréciera de lire ce livre?

Si votre meilleur ami passe une heure à vous détailler vos failles et vos faiblesses, je ne suis pas sûr que ça vous fasse plaisir. Et moi je ne suis pas le meilleur ami de Deschamps. Mais je me suis tenu à une chose: ce n’est ni un livre à charge, ni un livre de complaisance. C’est ce que j’ai dit à Diouf, à Tapie, à Anigo… S’il est gêné, c’est que j’aurai réussit mon truc, parce que je serai rentré dans l’intime. Les gens susceptibles savent qu’ils le sont, mais ils détestent qu’on leur dise.