François Gabart : «Ce que j'ai réalisé en 4 ans est énorme»
VOILE•Les premiers mots du vainqueur du septième Vendée Globe...Aux Sables-d'Olonne, Matthieu Goar
Il y a eu les retrouvailles avec sa famille et son team, l’émotion partagée avec la foule massée le long du chenal, les bulles de champagne, le discours du podium. Après de longues minutes d’euphorie, François Gabart s’est longuement expliqué sur sa course lors d’une conférence de presse. Entre analyse rationnelle, humour et émotion. Le tout pieds nus après avoir largué ses «bottes que je n’avais pas quittées depuis plusieurs jours».
La relation avec son bateau
«Je suis très fier du bateau Macif. Je le dis au nom de toute l’équipe. Pendant cette course, je me le suis approprié. Je l’ai écouté, je l’ai senti. Je suis ingénieur, j’adore la technique. Une partie du plaisir du Vendée, c’est de pouvoir développer ces bateaux.»
L’accueil du public
«C’est extraordinaire. J’avais beau l’avoir vécu il y a quatre ans, j’ai été surpris, je ne m’attendais pas à ça. C’est hallucinant. On a de la chance, cela veut dire que le Vendée Globe va bien. Si jamais il n’y avait pas tout ça, je me dirais qu’on est fous, que ça ne sert à rien. C’est peut-être de la folie, mais ça sert à quelque chose.»
L’ambition de gagner la course
«Lorsque je suis parti sur ce Vendée, l’objectif numéro un était d’abord de faire une belle course. Vouloir terminer premier aurait été trop ambitieux. Quand j’ai doublé Armel dans le Pacifique, ça faisait un mois que je naviguais et que je tenais le coup. Là je me suis dit que je pouvais jouer la gagne. Puis on s’est battu avec Armel. Pour deux compétiteurs, ce qui nous est arrivé est exceptionnel. Je le remercie car j’ai vécu un Vendée exceptionnel grâce à lui.»
Sa progression fulgurante
«A la conférence de presse en 2008, à l’arrivée de Michel Desjoyeaux, j’avais commencé le bateau professionnel 6 mois plus tôt à peine. Ce que j’ai réalisé en 4 ans est énorme. Ca fait pas mal de temps que je me surprends, je ne sais pas quand ça va s’arrêter. On découvre des choses sur soi, je ne pensais pas que j’avais cette énergie-là pour répondre à l’enchaînement des problèmes. Tous les "vendée globistes" passent par cette difficulté pour se découvrir.»
Les problèmes cachés
«Il y a eu pas mal de petites choses que je n’ai pas dites. Par exemple un problème de moteur au 5 ou 6e jour après Madère. De l’eau s’est infiltrée dans le moteur car la pompe à injection ne marchait plus. C’est tellement compliqué à changer que l’on s’était dit que ce n’était pas la peine d’en prendre une de spare (de rechange). Il a fallu que je vidange l’huile, ça m’a pris pas mal de temps. Après ce premier gros problème, une fois que t’as réussi à réparer ça, tu te sens beaucoup plus fort. J’ai fait face à pas mal de petites misères et je m’en suis sorti.»
Sa discrétion sur ses soucis
«C’est marrant il y a quatre an, je n’étais pas convaincu que j’allais faire la même chose (que Michel Desjoyeaux qui cache beaucoup ses problèmes). J’ai une façon de communiquer différente, je suis spontané. J’aime partager. Et puis, il est arrivé ce problème de moteur. J’ai commencé à garder les choses pour moi. Au fur et à mesure de la course, on s’est tiré la bourre et c’est devenu de la pure compétition. Je ne m’attendais pas à ca. Ca devient trop difficile pour que tu te permettes de donner des choses à l’adversaire.»
La découverte des mers du Sud et du rythme
«Je n’ai pas été trop surpris, c’est peut-être pour ça que j’ai réussi à gérer. D’où l’intérêt de travailler avec Michel Desjoyeaux et l’écurie Mer agitée. J’allais dans l’inconnu tout en étant bien renseigné. L’enchaînement, la répétition. Le VG, c’est simple : tu pars, tu prends des coups de vent, tu casses sans chercher à bricoler. Ca va tellement vite, tu regarder les chiffres défiler. Et dès que le vent mollit, tu répares en prévision de ce qui arrive le lendemain. Le mot passion est trop faible. La fascination que j’ai pour cette course m'a fait avancer plus vite.»