Les «Experts» de la Gendarmerie: Plongée au cœur de l'enquête
DiaporamaLa rédaction de 20 Minutes
En avant-première, 20 Minutes vous propose de découvrir le nouveau Pôle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) à Pontoise (Val-d'Oise) qui doit être inauguré par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, le 21 mai 2015.
A l'intérieur de ce laboratoire géant, criminalistes, experts en balistique et en analyse d'ADN croisent dans les couloirs médecins légistes, cyberenquêteurs et statisticiens. Tous œuvrent dans un seul et même but, lutter contre la criminalité et la délinquance.
Ces «Experts» -surnommés ainsi en raison des séries télévisées- nous ont ouvert leurs portes. Voyage au cœur de l'enquête judiciaire...
Textes et photos: William Molinié
En avant-première, 20 Minutes vous propose de découvrir le nouveau Pôle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) à Pontoise (Val-d'Oise) qui doit être inauguré par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, le 21 mai 2015.
A l'intérieur de ce laboratoire géant, criminalistes, experts en balistique et en analyse d'ADN croisent dans les couloirs médecins légistes, cyberenquêteurs et statisticiens. Tous œuvrent dans un seul et même but, lutter contre la criminalité et la délinquance.
Ces «Experts» -surnommés ainsi en raison des séries télévisées- nous ont ouvert leurs portes. Voyage au cœur de l'enquête judiciaire...
Textes et photos: William Molinié
Dans la zone médico-légale, les légistes reçoivent les corps à identifier. Parfois dans un bon état. Parfois «carbonisés, noyés ou déchiquetés», nous explique un «Expert».
Avant d'obtenir les identités, il leur faut déterminer l'âge ou la taille de la victime. Et en premier lieu, le sexe. Un moyen assez simple: l'écartement du bassin est plus large chez la femme.
Les gendarmes de l'Institut de recherche criminelle (IRCGN) sont aussi amenés à déterminer des pathologies sur les ossements que leur transmet le juge.
Crâne, mandibule, bassin... Les parties du corps sont souvent dégradées. «Parfois, ces éléments sont brûlés. On travaille sur tout le corps dans tous ses états», explique-t-on.
Quand les corps sont noyés, des prélèvements sont réalisés dans les poumons pour comprendre à quel endroit la victime est décédée.
C'est dans ce service qu'a été autopsié le petit Marcus, disparu dans le Val-d'Oise et retrouvé mort plusieurs jours après, noyé dans une rivière..
Trois médecins légistes titulaires et deux officiers de gendarmerie sont affectés au département de médecine légale du PJGN.
Un scanner et une salle de radiologie complètent les infrastructures sophistiquées des «Experts». «Le scanner est d'occasion. Nos patients ne sont pas très regardants», plaisante un des responsables du laboratoire.
A la division criminalistique de l'identification humaine, les spécialistes des analyses génétiques traitent environ 10.000 prélèvements par mois. Le laboratoire est entièrement pressurisé pour éviter de polluer les échantillons. C'est
par cette chaîne que sont passés les prélèvements du crash de l'A320 de
la Germanwings dans les Alpes. «La fiabilité de l'ADN provient de la
manière dont on le prélève. Plus les conditions sont dégradées, moins
il y a de matière, plus ça va être difficile et long de recouper les
empreintes génétiques», explique le capitaine Sylvain Hubac, chef du Service central d'analyses génétiques de la gendarmerie individu (SCAGGI).
Dans certains cas, on ne peut pas se fier entièrement à l'ADN. Notamment pour les jumeaux qui ont le même profil. Ou lorsque l'analyste repère moins de cinq régions de comparaison. On dit alors que l'ADN est partiel. «L'ADN est une aide à l'enquête. Nos prélèvements sont conservés pendant 40 ans», résume un gendarme spécialisé.
Les gendarmes disposent d'une série d'outils de reconstitution de scènes de crime en 3D. Ici, le laser-scanner. Il permet aux enquêteurs d'immortaliser une scène de crime et de la numériser jusque dans les moindres détails. Le scanner peut aussi relever les taches de sang. La capture numérique permet, devant les cours d'assises, de rendre compte précisément d'une scène de crime. Indispensable pour que les jurés puissent se forger une opinion...
Le PJGN est doté d'une salle parfaitement insonorisée permettant l'exploitation judiciaire des fichiers sonores. C'est à ce poste de travail qu'ont été écoutés les enregistrements issus des boîtes noires de l'A320 qui s'est crashé dans les Alpes.
Isoler une voix, la reconnaître ou la comparer est un exercice très difficile et pas fiable à 100%. Les enquêteurs se basent d'ailleurs sur une échelle de comparaison lorsqu'ils remettent leur travail à la justice. «La voix est unique, elle change au fil des années et surtout en fonction de l'émotion. C'est très aléatoire», précise un spécialiste.
Le département «Véhicule» est équipé d'une collection de peintures d'aérosol et automobiles. Lorsqu'un indice est prélevé dans le cadre de dégradations par exemple, il est envoyé dans ce service pour que la référence de la peinture soit retrouvée. En attendant de remonter jusqu'à l'acheteur...
Ce jour de début mai, lorsque nous visitons le PJGN, les enquêteurs sont concentrés sur une affaire d'accident de la route avec délit de fuite. Les vêtements de la victime sont analysés car des traces de peinture de la carrosserie y ont été retrouvées.
Chaque année, 2.500 personnes en France sont victimes d'un accident corporel avec délit de fuite. Sur les véhicules récents équipés de boîtiers, les enquêteurs parviennent à isoler les dernières secondes de l'accident. Avec un but à l'esprit: présenter à la justice les éléments qui permettraient d'impliquer les responsabilités des uns et des autres.
Les enquêteurs sont aussi capables de dupliquer des clés pour les services judiciaires ou de renseignement qui seraient amenés à poser des balises sur des véhicules.
Dans la salle optique du département balistique, les gendarmes comparent les étuis et les balles retrouvées sur les scènes de crime. Environ 650 dossiers sont traités tous les ans. «Chaque arme laisse une signature qui lui est propre», explique un expert.
Pour pouvoir comparer une balle à une arme, il faut entre 3 et 15 minutes. De 20.000 à 30.000 armes sont répertoriées dans le fichier national d'identification balistique (FNIB).
60% des missions de ce service sont consacrées au recoupement et au rapprochement entre plusieurs faits.
Un tunnel de tir de 35 mètres de longs permet aux enquêteurs de reconstituer physiquement des angles de tirs. Et s'assurer de la crédibilité des déclarations des personnes entendues par leurs services.
Une collection d'armes complète le service balistique. Modèle, marque, année de sortie... Les pistolets et revolvers saisis sont conservés ou détruits s'ils font doublon avec ceux déjà détenus par les gendarmes.
Fusils automatiques, kalachnikov, mais aussi production artisanale sont conservés. «Nous avons reçu, depuis la Guyane, une arme réalisée avec des tuyaux de chauffage. Bien que très instable, elle fonctionnait parfaitement», raconte un enquêteur.
Le centre de lutte contre la criminalité numérique (C3N) s'attache à déjouer les attaques informatiques et à retrouver leurs auteurs. Comme le réseau démantelé il y a quelques mois qui était parvenu à mettre en circulation de faux lecteurs de cartes bancaires. Ils récupéraient les informations, les déchiffraient et les revendaient à d'autres escrocs.
Les gendarmes ont mis en place un système de détection à distance. «La tête de pont de ce réseau était au Canada. Le préjudice est estimé à plusieurs millions d'euros», précise un responsable.
Depuis quelques années, les gendarmes ont développé un programme de prédiction du crime. «Contrairement au film Minority Report qui cible des individus, nous ciblons des types de criminalité», explique Patrick Perrot, du service central de renseignement criminel (SCRC).
Lui et ses services ont mis au point des algorithmes pour prévoir relativement précisément les tendances d'augmentation de la délinquance par départements, mais aussi dans les ville et les quartiers. «Nous nous sommes par exemple aperçus que les trafics de stupéfiants étaient liés aux cambriolages. Et qu'en luttant contre les cambriolages, on faisait baisser les trafics de drogue.»