INTERVIEWLa résilience: Comment tirer bénéfice d'un traumatisme

La résilience: Comment tirer bénéfice d'un traumatisme

INTERVIEWJean-Pierre Pourtois, docteur en sciences psycho-pédagogiques, détaille le concept pour «20 Minutes»...
Lucie Romano

Lucie Romano

La résilience. Le concept, développé en France par Boris Cyrulnik est de plus en plus à la mode, jusqu’à en perdre son sens originel: la capacité à surmonter les traumatismes et à se reconstruire de manière positive. Pour la première fois, un congrès mondial sur la résilience, de ce jeudi à dimanche à Paris, doit permettre de rappeler sa signification scientifique. Parmi les nombreux spécialistes, le Belge Jean-Pierre Pourtois, docteur en science psycho-pédagogiques et co-auteur de Les ressources de la résilience, a répondu aux questions de 20 Minutes sur ce concept.

Que pensez-vous de l’utilisation à tout va du concept de résilience, par exemple après chaque deuil?

Cela conduit à des contresens! Premier écueil, il ne faut pas confondre résistance et résilience. Dans le premier cas, après un ou des traumatismes, les personnes traversent les épreuves mais n’en sortent pas pour autant changées. Elles retrouvent la maîtrise de leur vie d’avant. Dans le cas de la résilience, il y a nécessité d’apparition nouvelle, une dimension de l’agir qui n’existait pas auparavant. On voit des gens qui se mettent à oeuvrer dans des domaines sociaux, scientifiques... Ils prennent des habitudes nouvelles. Positives.

La résilience est-elle forcément positive ?

Parfois le dépassement d’un traumatisme peut prendre la forme d’une désilience. Notre imagination débordante peut se diriger vers les maléfices, la puissance néfaste. Comme Fourniret (violeur et tueur en série des Ardennes). Un être abusé, qui a traversé des moments difficiles et développé un malin génie. D’autres personnes, qui traversent des épreuves très difficiles elles aussi, ont d’autres ruptures de trajectoire. Je pense à cette femme abusée par son père dans son enfance. Elle a perdu toute confiance en l’être humain. En pleine résilience, à travers les actes qu’elle réalise, elle se retrouve et n’a plus peur. Cela prend du temps. C’est un travail personnel qui s’appuie sur notre environnement. Elle fait un saut sur une autre planète. D’ailleurs, ne dit-on pas «dans une autre vie»?

La résilience peut-elle nous conduire à être plus heureux après qu’avant un deuil très difficile ou une enfance violentée?

Disons que de par les actes qu’elle pose dans la résilience, des actes de création, la personne parvient à sortir d’elle des traces de souffrances du passé. Ce dépassement/surpassement conduit à des moments de bonheur.

Quelle thèse défendez-vous dans votre ouvrage?

L’ouvrage a pour visée de permettre aux praticiens de l’humain d’observer les indices, de déceler les ressources que les personnes, après un fracas, vont activer. Les zones de résistance, et les zones nouvelles, si je peux parler aux gens, cela donne des chances de progression plus de que de régression. L’individu est de plus en plus appelé à travailler sur son émancipation.

Pratique

1er Congrès Mondial sur la Résilience: De la recherche à la pratique

Les 7-8-9-10 juin 2012 à l'Espace Reuilly - 21 rue Hénard 75012 Paris