HANDICAP«Intouchables», de la fiction à la réalité

«Intouchables», de la fiction à la réalité

HANDICAPPhilippe Pozzo di Borgo, qui a inspiré le personnage tétraplégique de François Cluzet dans le carton cinéma de l’année 2011, cosigne le manifeste «Tous intouchables?»...
Claire Beziau

Claire Beziau

Son histoire portée au cinéma a fait 20 millions d’entrées. Il a reçu des centaines d’emails auxquels il essaie de répondre individuellement. Philippe Pozzo di Borgo, homme d’affaires français devenu tétraplégique à la suite d’un accident de parapente, a lancé ce vendredi un appel à l’espérance lors d’une Table ronde organisée à Paris.

Moins une revendication qu’une déclaration

Si François Cluzet a retrouvé l’usage de ses deux jambes après le tournage, Philippe Pozzo di Borgo est toujours cloué dans son fauteuil roulant. Le 15 mai, les éditions Bayard publieront son manifeste «Tous intouchables?», coécrit avec Jean Vanier et Laurent de Cherisey.

Le premier a fondé l’Arche en 1964, qui regroupe 138 communautés où cohabitent valides et déficients mentaux dans 40 pays. Le second a créé l’association Simon de Cyrène, des maisons partagées entre valides et personnes cérébro-lésées. Peu de revendications dans ce manifeste pris au sens de «déclaration», celle d’une passerelle possible entre fiction et réalité.

«Pas besoin d’être en fauteuil pour être handicapé»

Pour les auteurs, l’acceptation de notre condition humaine, de nos faiblesses, donne un ticket pour le bonheur. Philippe Pozzo di Borgo en est convaincu: «Pas besoin d’être en fauteuil pour être handicapé». La France compte douze millions d’invalides, sans compter les malades d’Alzheimer mais aussi les chômeurs, les mal logés, les exclus.

«Le stress, l’anxiété, les déceptions professionnelles ou amoureuses sont aussi des formes de handicap, y compris social.» assure Philippe. Et le vivre-ensemble, la mise en commun de ces fragilités créent pour lui une force nouvelle. Il a reçu énormément d’e-mails de jeunes de banlieue en souffrance qui l’ont remercié pour son absence «d’a priori» malgré son statut social privilégié.

«Passer du désir d’aider à celui de rencontrer»

Les auteurs espèrent davantage d’engagement bénévole, en particulier par le biais du service civique, réservé aux jeunes de 18 à 25 ans. Selon Laurent de Cherisey, il s’agit de «les sortir un peu de la technique pour aller vers le cœur». C’est bien l’interdépendance qui est au cœur du projet: «Il ne s’agit pas seulement de donner, mais aussi d’apprendre à recevoir de l’autre et l’accepter tel qu’il est» précise Philippe Pozzo di Borgo. Jean Vanier résume: «Passer du désir d’aider à celui de rencontrer».

Il est prévu d’envoyer le livre à François Hollande. «Je vais le dédicacer avec ma bouche», blague Philippe Pozzo di Borgo. Les pouvoirs publics seront sollicités pour fournir de l’aide aux associations sur le terrain, développer les lieux de vie entre valides et handicapés, ou encore donner un coup de pouce au service civique.

Le livre s’engouffre dans la brèche ouverte par le film. «20 millions de gens ont été touchés dans leur inconscience. Il faut maintenant que cela passe au niveau conscient» résume Jean Vanier. «Transformer l’essai, comme au rugby » plaisante Philippe Pozzo di Borgo.