Premier meurtre, premier chef, premier mot… Les premières fois de l'Humanité décryptées
SOCIETE•Le préhistorien toulousain Nicolas Teyssandier sort un livre, «Nos premières fois», qui dévoile un inventaire (non exhaustif) des premières fois de l'HumanitéBéatrice Colin
C’est en faisant une frise chronologique de la Préhistoire, pour donner quelques repères à ses lecteurs que l’idée a germé dans l’esprit de Nicolas Teyssandier. Spécialiste des premiers outils en pierre taillée, ce chercheur toulousain s’est mis à dresser un inventaire à la Prévert des premières fois de l’Humanité.
Après en avoir répertorié plus de soixante, il en a sélectionné trente. De la première peinture au premier enterrement, ces moments clés de notre Histoire figurent dans son livre Nos premières fois, à paraître ce vendredi aux éditions « La ville brûle ».
« Il y a des figures imposées, comme le premier feu, la première chasse et on y trouve du moins classique comme le premier meurtre, la première leçon, le premier chef. Je ne cherche pas forcément à parler du plus ancien, nous sommes dépendants des découvertes, c’est amené à changer », avance Nicolas Teyssandier, membre du Laboratoire Traces (Travaux et recherches archéologiques sur les cultures, les espaces et les sociétés) de l’Université Jean-Jaurès.
Des premières loin d’être figées
Et ce spécialiste des premiers outils en sait quelque chose. Il y a quinze ans, on croyait dur comme fer que les premiers instruments façonnés par l’homme dataient de 2,6 millions d’années. Ces « galets taillés » trouvés en Afrique de l’Est ont été supplantés il y a quelques années par des outils de pierre datant de 3,3 millions d'années, avant même l’apparition du genre humain.
Racontées sur quelques pages, de manière vulgarisée mais toujours très référencées scientifiquement, « ces premières fois » permettent aussi de découvrir le travail d’enquêteurs des scientifiques.
« Avec la Préhistoire on peut discuter de toutes les problématiques des sciences de l’Homme, des inégalités sociales, de la transmission, de l’apprentissage, de la cognition », énumère le chercheur qui interviendra samedi à la conférence TEDx.
On apprend ainsi « à sortir l’homme des cavernes », à décrypter les contours des sociétés du passé, à savoir si elles étaient égalitaires ou pas.
Quand est arrivé le premier chef ? Difficile de le dater exactement. Mais des signes sont là dès le Paléolithique. Comme cette sépulture de Sungir, vieille de 34.000 ans, découverte à 200 km de Moscou, et où l’on a découvert 13.000 perles en ivoire de mammouth. Ce mobilier funéraire montre que l'on n'avait pas affaire à n'importe qui et qu'il y avait déjà à cette époque des différences sociales.
Du meurtre au hashtag
Nos prédécesseurs évidemment n’ont pas pu échapper aux côtés les plus sombres de l’humain. Et parmi eux, il y en un a qui a pour l’instant le statut de premier meurtrier. On ne connaît pas le motif de son crime, mais on en sait un peu plus sur sa victime.
Cet homicide aurait été perpétré il y a 430.000 ans dans le nord de l’Espagne. Comme dans Les Experts, les scientifiques sont partis d’un crâne retrouvé au fond d’une grotte où gisent les squelettes de 28 personnes. Celui-ci présente deux trous au-dessus de l’œil gauche. Ils leur ont permis de conclure que le tueur était sûrement un droitier, muni probablement d’un biface ou d’une lance à pointe de pierre.
Plus sympa, Nicolas Teyssandier n’oublie pas de faire référence à ce qui rythme l’actualité. N’en déplaise à certains, le premier hashtag n’est pas né avec la génération Twitter, mais plutôt avec celle de Néandertal. Ce dessin, gravé dans une roche de Gibraltar, est vieux de 39.000 ans et a permis de trouver des qualités artistiques de ce cousin très lointain, pas si brute que ça.