Ploërmel: «Des croix, il y en a partout et cela n’a jamais embêté personne»
REPORTAGE•Le Conseil d’Etat a ordonné la semaine dernière le retrait de la croix surplombant le monument breton…Jérôme Gicquel
L'essentiel
- Le Conseil d’Etat a ordonné le retrait de la croix de la statue.
- La décision a entraîné une polémique sur les réseaux sociaux.
- Le maire de Ploërmel entend bien conserver le monument dans sa commune.
D’ordinaire très calme, la place Jean-Paul II à Ploërmel (Morbihan) est devenue depuis quelques jours un véritable lieu de pèlerinage. Le smartphone à la main, de nombreux touristes sont venus immortaliser la désormais célèbre statue à l’effigie de l’ancien pape polonais. Cette soudaine notoriété du monument remonte à mercredi. Ce jour-là, le Conseil d’Etat, plus haute juridiction administrative française, a ordonné le retrait de la croix qui surplombe l’édifice, au nom du respect de la loi de 1905 sur la laïcité qui « interdit d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public ».
Cette décision a provoqué un véritable tollé sur Internet, avec un déferlement de photos de croix accompagnées du hashtag #MontreTacroix ce week-end sur Twitter.
Même la Première ministre polonaise Beata Szydlo a réagi à la polémique en se prononçant en faveur d’un rapatriement de la statue en Pologne et tenter ainsi « de sauver de la censure le monument de notre compatriote ».
La télévision polonaise depuis deux jours sur place
Preuve de l’agitation qui règne dans cette petite ville du Morbihan d’à peine 10.000 habitants, une télévision polonaise est sur place depuis deux jours pour couvrir l’affaire. « En Pologne, on ne touche pas à Jean-Paul II. Cette statue doit rester là et conserver sa croix », assure Jacques Kaszubski. Installé dans le Morbihan, ce jeune Polonais a fait un détour par Ploërmel ce lundi après-midi pour envoyer des photos de la statue à sa famille.
Comme lui, beaucoup de touristes sont scandalisés par la décision du Conseil d’Etat. « Des croix, il y en a partout en Bretagne et dans toute la France. Et cela n’a jamais embêté personne, c’est vraiment stupide », indique Loïc, originaire du nord de la France. « On dirait que la France a honte de ses racines chrétiennes », s’énerve un couple de retraités. « Un pape avec une croix, je ne vois pas ce qui choque », souligne Fontaine des Bouches-du-Rhône, qui se revendique comme « athée ».
Le maire bien décidé à garder sa statue
Dans toute cette agitation, Patrick Le Diffon, maire Les Républicains de la commune, tente jouer la carte de l’apaisement. « Tout le monde ici est surpris car cette statue fait partie de la commune et n’a jamais posé de problème. Mais je ne veux surtout pas que cette polémique serve à attiser les haines religieuses, bien loin du message de paix véhiculé par Jean-Paul II », indique l’élu.
Sommé par le Conseil d’Etat de retirer la croix surplombant la statue dans les six mois, le maire se refuse pourtant à abandonner son monument. « Vous pouvez être sûr que je ne prendrai pas ma scie à métaux pour enlever la croix un bon matin. Cette statue est une œuvre d’art, elle est une et indivisible », assure le maire.
Pour éteindre la controverse, l’élu pourrait d’ailleurs être tenté de vendre la place publique où se trouve la statue à un investisseur privé pour se conformer ainsi à la loi. « La croix serait alors dans un domaine privé et le problème serait réglé », souligne-t-il. Il pourrait également porter l’affaire devant la Cour européenne des droits de l’homme. « J’ai six mois pour prendre une décision. Mais je veux la prendre dans un climat apaisé et serein ».