Il lui est reproché d’avoir fait preuve « d’une incurie et d’une précipitation critiquables ». Christine Lagarde, actuelle directrice du Fonds monétaire international (FMI), est jugée, à partir de ce lundi, devant la Cour de justice de la République (CJR) pour son rôle dans l’affaire de « l’arbitrage Tapie ».

Accusée de « négligence », elle aurait, selon le dossier d’accusation, permis un colossal détournement d’argent public au profit de l’ancien homme d’affaires, alors qu’elle était ministre de l’Economie et des Finances en 2007. 20 Minutes fait le point sur cette procédure tentaculaire…

Pour quels faits Christine Lagarde est-elle jugée ?

Ministre de l’Economie et des Finances depuis quelques mois, Christine Lagarde autorise, en 2007, le choix d’une procédure privée d’arbitrage pour solder le vieux conflit entre Bernard Tapie et l’ancienne banque publique Crédit Lyonnais, sur la revente, en 1994, de l’équipementier sportif Adidas. En juillet 2008, elle renonce, un peu vite selon les magistrats instructeurs, à engager un recours contre la sentence arbitrale qui vient d’attribuer à Bernard Tapie plus de 400 millions d’euros pris sur les deniers publics.

Les magistrats instructeurs ont estimé que, par cette décision, Christine Lagarde avait « privé l’Etat d’une chance que ces [400 millions d’euros] soient détournés ». Pour cette « négligence », elle encourt une peine allant jusqu’à un an de prison et 15.000 euros d’amende.

Dans quel état d’esprit est-elle avant ce procès ?

C’est « une situation étrange. » Réservant ses réponses aux magistrats, Christine Lagarde n’a pas voulu s’étendre sur le procès qui l’attend dans l’interview qu’elle a donnée à L’Obs le 30 novembre. A peine a-t-elle confirmé qu’elle se mettait « en congé » du FMI le temps du procès même si elle a prévu de « regarder ses e-mails » et de « répondre aux urgences » le soit et la nuit.

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Pourquoi est-elle jugée devant la Cour de justice de la République ?

Dans son programme présidentiel de 2012, François Hollande avait prévu de la supprimer. Mais la Cour de justice de la République reste, encore aujourd’hui, la seule juridiction habilitée à juger des ministres ou anciens ministres pour les délits commis « dans l’exercice de leurs fonctions ».

Composée de trois juges de la Cour de cassation, de six députés et de six sénateurs, elle a, à ce jour, condamné trois anciens ministres.

Où en est-on du fond de l’affaire Tapie ?

Le fameux arbitrage ayant octroyé plus de 400 millions d’euros à Bernard Tapie a finalement été annulé, en 2015, au civil avec obligation pour l’ancien patron de l’Olympique de Marseille de rembourser.

Au pénal, une enquête pour « escroquerie » a été ouverte. Les magistrats soupçonnent que la procédure d’arbitrage était un « simulacre » de justice organisé au bénéfice de l’homme d’affaires dont l’avocat avait des liens avec l’un des arbitres. Six personnes sont mises en examen dans cette affaire, dont Stéphane Richard, l’ancien directeur de cabinet de Christine Lagarde qui est aujourd’hui le PDG d’Orange.

Le procès peut-il être renvoyé ?

C’est en tout cas ce que compte demander Patrick Maisonneuve, l’avocat de Christine Lagarde. L’enquête pénale n’étant pas terminée, il estime que sa cliente ne peut pas être jugée pour l’instant. « Il faudrait qu’un tribunal dise d’abord si oui ou non il y a eu un détournement de fonds publics » avant de juger la patronne du FMI pour des négligences qui auraient permis ce même détournement de fonds publics.

Si la CJR n’accède pas à sa requête, le procès de Christine Lagarde devrait durer jusqu’au 20 décembre. La décision devrait être rendue dans la foulée.