JUSTICEJacqueline Sauvage: Pourquoi le tribunal a refusé sa libération

Jacqueline Sauvage: Pourquoi le tribunal a refusé sa libération

JUSTICE«20 Minutes» a pu consulter les motivations avancées par tribunal d’application des peines (TAP) de Melun (Seine-et-Marne) qui a refusé la demande de libération conditionnelle de Jacqueline Sauvage...
Hélène Sergent

Hélène Sergent

Une décision « choquante », « invraisemblable », « une honte », un « déni de justice ». Depuis l’annonce, ce vendredi matin, du rejet de la demande de libération conditionnelle de Jacqueline Sauvage par le tribunal d’application des peines (TAP) de Melun (Seine-et-Marne), les réactions de ses avocates, de la classe politique et de l’opinion publiques sont quasi unanimes : Jacqueline Sauvage, victime des coups de son mari alcoolique pendant 47 ans, condamnée à deux reprises par deux jurés d’assises à 10 ans de prison pour le meurtre de ce conjoint violent puis graciée partiellement par François Hollande, devait sortir de prison.

Comment l’institution judiciaire justifie-t-elle sa décision ? 20Minutes a pu consulter les quinze pages détaillant les motivations du tribunal.

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  • Un temps de réflexion jugé « trop court »

« La condamnation définitive, en date du 3 décembre 2015, est encore très récente et sa demande de libération conditionnelle est intervenue immédiatement après le décret de grâce présidentielle dont elle a bénéficié. Compte tenu du temps écoulé, le discours de Madame Sauvage sur les faits et surtout sur les ressorts de son passage à l’acte reflète encore une réflexion très limitée », explique le tribunal. Un argument balayé ce vendredi matin par la défense de Jacqueline Sauvage : « L’institution ne tient pas compte du travail colossal engagé, du stage d’évaluation de dangerosité ou des trois rapports d’expertise réalisés », a répondu Nathalie Tomasini.

  • Un lieu de résidence trop proche du lieu des faits et une trop grande médiatisation

« Madame Sauvage ne peut prétendre retourner vivre à proximité du lieu des faits, dans un environnement qui, compte tenu des soutiens dont elle bénéficie et de la médiatisation des faits, risquerait de la conforter encore dans son positionnement largement victimaire ». Dans le projet de réinsertion présentée par Jacqueline Sauvage, la sexagénaire a émis le souhait de résider chez l’une de ses filles, domiciliée dans le Loiret, à 12 kilomètres de la maison où vivait le couple et où la mère de famille a abattu son mari à coups de fusil.

La médiatisation de l’affaire, la mobilisation de milliers d’anonymes via une pétition et la politisation du dossier avec l’accord d’une grâce partielle auraient participé, selon le tribunal, à conforter Jacqueline Sauvage dans son statut de victime.

  • Une notion d’interdit « pas encore intégrée »

« Cette notion d’interdit n’apparaît pas encore vraiment intégrée par Madame Sauvage. Le sens de la peine lui échappe et elle a été confortée dans cette position par les soutiens dont elle a bénéficié, l’évolution très rapide de sa situation pénale et la médiatisation de son affaire ». Là encore, l’institution judiciaire est intraitable. Selon elle, Jacqueline Sauvage n’a pas suffisamment travaillé sur « sa responsabilité personnelle » dans l’assassinat de son mari.

  • Une dangerosité pas « caractérisée »

Jacqueline Sauvage est-elle dangereuse et peut-elle récidiver ? C’est sur ces deux questions, centrales lors de l’examen de toute demande de libération conditionnelle, que devait notamment se prononcer le tribunal. S’appuyant sur trois expertises psychologiques et psychiatriques menées en 2012, 2013 et 2016, l’institution reconnaît que la « dangerosité (…) n’apparaît pas caractérisée » et que le « risque de récidive (…) n’est pas avéré ». Les arguments énoncés précédemment ont visiblement davantage pesé que ces deux derniers points.

Le parquet a annoncé ce matin à l’AFP sa décision de faire appel, tout comme les avocates de Jacqueline Sauvage.