REPORTAGEAttentat de Nice: Colère profonde et émotion pendant la minute de silence

VIDEO. Attentat de Nice: La ville, réunie pour la minute de silence, partagée entre deuil et colère

REPORTAGEDes milliers de personnes se sont réunies sur la promenade des Anglais à Nice pour respecter une minute de silence, quatre jours après l’attaque qui a causé la mort de 84 personnes…
Hélène Sergent

Hélène Sergent

De notre envoyée spéciale à Nice,

« Qu’est ce que vous voulez, nous les Niçois, on est toujours impulsifs », glisse René*, en s’éloignant doucement du mémorial installé près du kiosque à musique et du monument aux morts, sur la promenade des Anglais. Quatre jours après l’attaque au camion, jeudi 14 juillet, qui a tué 84 personnes et blessé 303 autres, une foule immense s’est réunie à midi à l’occasion d’une minute de silence nationale, tiraillée entre hommage, recueillement et profonde émotion et une colère sourde qui chaque jour, s’exprime davantage dans les rues de la ville.

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« Ils ne respectent pas les morts »

Sous un soleil de plomb, des dizaines de milliers de personnes affluaient déjà une heure avant le début de la cérémonie. Margaux, est venue d’Antibes pour assister à cette minute de silence : « Il y avait beaucoup de monde dans le train pour Nice, certains avaient des roses à la main », décrit la jeune fille, accompagnée de sa grande sœur. À l’arrivée du Premier ministre Manuel Valls, du président LR de Paca et ancien maire de la ville, Christian Estrosi et d’autres élus locaux, de nombreux sifflets et invectives émanaient de la foule. « Ils étaient où les militaires ? », crie un homme, « Hollande démission ! », lui répond un autre. Au coup de canon, la tension s’atténue et laisse place, enfin, au silence.

Après plusieurs salves d’applaudissement et quelques Marseillaises improvisées, les huées reprennent, tandis qu’une majorité des personnes présentes préfèrent rebrousser chemin et se recueillir autour des autels et des dizaines de mémoriaux installés le long de la promenade. D’autres, comme Eliane*, n’arrivent pas à quitter les lieux. Face aux fleurs qui s’amoncellent devant le kiosque à musique, la sexagénaire craque : « Ils ne respectent pas les morts ! Demain on pourra siffler le Premier ministre. Ces gens, les enfants sont encore dans des frigos et on siffle, on crée la polémique, on fait de la politique ! ». Un dégoût partagé par de nombreux habitants, soucieux de retrouver un réel apaisement.

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« L’humain doit gagner sur la bête »

Derrière elle, un cercle s’est formé autour du Cheikh Bentounes, président fondateur des scouts musulmans de France et membre de l’association Vivre ensemble à Cannes. « Quand un tel malheur arrive, il faut se fortifier, s’unir. Il faut que la colère s’exprime mais il faut aussi guérir cette colère. L’humain doit gagner sur la bête. On travaille beaucoup avec la jeune génération, on leur apprend à se responsabiliser, à débattre ». Un message de paix, d’espoir parfois difficile à entendre tant la blessure est profonde : « Comment débattre quand, en face, ils ont des balles et des grenades ? », interroge Alain, un Niçois venu lui aussi se recueillir.

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Dans sa main, Alain tient une feuille sur laquelle figure un article publié sur le site d’Europe 1 et daté du 5 novembre 2010. Le papier, intitulé « À Nice, Hu Jintao ne veut voir personne », détaille le colossal dispositif de sécurité mis en place pour la visite, à l’époque, du président Chinois. « Il y avait 1.500 policiers. Et jeudi soir ? Combien étaient-ils ? Tout ça c’est de la politique. Le maire de la ville, Philippe Pradel, il est où ? On ne le voit pas, on ne l’entend pas ! C’est un homme de paille. Et Estrosi, qu’on voit partout, pourquoi il n’a pas annulé le feu d’artifice s’il savait que le dispositif de sécurité était trop faible, il l’a fait en juin avec toutes les kermesses, pourquoi pas là ? », interroge le Niçois.

Des questions partagées par Moustapha, président de la Fédération des musulmans du Sud, endeuillée parla mort de Fatima Charrihi, la mère d’un des bénévoles : « Ce qui m’offusque, c’est la présence des politiques. Le soir du 14 juillet, la sécurité n’était pas opérationnelle pour protéger 3.000 personnes. C’est la faute des politiques, ce sont eux qui font la guerre quand Hollande, dit le soir de l’attaque : “On va frapper la Syrie et l’Irak”, et c’est nous qui payons les pots cassés ». Plus loin, face au Palais de la Méditerranée, à l’endroit où la course folle de Mohamed Lahouaiej Bouhlel s’est terminée, abattu par les policiers, un amas d’ordures et de pierres s’est constitué après la cérémonie. Certains passants, crachent, insultent le conducteur du camion qui a tué 84 personnes et fait plus de 300 blessés. La haine et la gêne s’entrechoquent. Un petit groupe, effaré par le spectacle, déplore : « Allez, on s’en va, on peut pas rester sur cette image négative, allons au mémorial ».