Euro 2016: Peut-on parler d'une réussite en matière de sécurité?
SÉCURITÉ•Pendant un mois, plus de 90.000 policiers, gendarmes et militaires ont été déployés pour assurer la sécurité aux abords des stades et dans les fan-zones…Hélène Sergent
42.000 policiers, 30.000 gendarmes, 5.000 membres de la sécurité civile, 13.000 agents de sécurité privée et 10.000 militaires de l’opération Sentinelle. Depuis le 10 juin, date d’ouverture de l’Euro 2016, près de 90.000 personnes se sont mobilisées pour assurer la sécurité aux abords des stades et des fan-zones. Sept mois après les attaques terroristes de Paris et Saint-Denis, les autorités redoutaient particulièrement le risque d’attentat de masse. Une menace qui s’est intensifiée après l’assassinat de deux policiers par un djihadiste se revendiquant de Daesh, trois jours à peine après le début de la compétition. L’auteur du double meurtre ayant menacé, dans sa vidéo de revendication, de « faire de l’Euro un cimetière ».
Un dispositif salué par l’UEFA
Dès dimanche, avant même le coup de sifflet final actant la victoire du Portugal face à la France, le chef de l’Etat, François Hollande a tenu à saluer les villes « qui ont accueilli l’épreuve », dans « une très grande ambiance et une parfaite organisation » avant de « remercier tous ceux qui s’y sont dévoués, les supporters, tous ceux qui ont permis cette organisation, les bénévoles et les forces de sécurité ».
Un satisfecit partagé par le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve qui a qualifié lundi, lors d’une conférence de presse, cet Euro 2016 de « réussite » : « Nous avions, compte tenu du contexte particulier, fait de la sécurité de l’Euro, une priorité absolue, en la préparant depuis des mois. Je rappelle que nous avions mis en place pour cet événement un dispositif tout à fait exceptionnel ». A ses côtés, le président d’Euro 2016 SAS, Jacques Lambert a révélé qu’en cas d’attentat, la compétition « se serait immédiatement arrêtée ». Une décision tenue secrète tout au long du tournoi.
Angel Maria Villar Llona, patron officieux de l’UEFA, instance organisatrice de la compétition, a lui aussi salué les forces de l’ordre françaises : « La France a aussi montré qu’il est possible de surmonter de grandes difficultés et de rester debout. Je pense également aux événements qui ont récemment frappé de nombreux pays et je me dis qu’à travers cet Euro en France, nous avons montré notre capacité de résilience et notre désir de rester en vie (…) avec une mention spéciale pour la police et à l’armée française. Ensemble elles ont garanti, de façon exceptionnelle, la sécurité de milliers de supporters venus de toute l’Europe pour assister à la compétition. L’UEFA leur tire son chapeau et les félicite pour leur travail ».
1555 interpellations, 891 gardes à vue et 59 condamnations
Pour autant, un épisode particulièrement violent à Marseille, le 11 juin dernier à l’occasion du match opposant l’Angleterre à la Russie est venu émailler ce dispositif « exceptionnel ». Bernard Cazeneuve a reconnu un « incident majeur » et a mentionné « 1.550 interpellations, 59 condamnations à des peines de prison ferme ou avec sursis, 64 reconduites à la frontière et 32 refus d’accès au territoire durant le mois de compétition ». Selon un premier décompte partiel de source policière (qui ne prend pas en compte la zone Paris/Ile-de-France) un tiers des interpellations concernerait des faits de violence et près de 8 % des introductions d’artifices dans les enceintes sportives et fan-zones.
« Ce match Angleterre-Russie nous a ramenés à la réalité. Quoi qu’on en dise, ça a été un gros incident. Tout le monde s’était focalisé sur le terrorisme, le hooliganisme n’était pas forcément la priorité », reconnaît Philippe Capon, secrétaire général du syndicat Unsa-police. « Ça nous a un peu surpris mais finalement ça a été bénéfique en matière de gestion de l’ordre. Maintenant l’Euro est terminé et ça a été une fête grâce à l’engagement total des forces de l’ordre », poursuit le syndicaliste.
Au lendemain de la finale, qui s’est soldée par une cinquantaine d’interpellations aux abords du Stade de France et de la Tour Eiffel, le ministre de l’Intérieur s’est engagé à recevoir l’ensemble des représentants des forces de l’ordre « pour les remercier de vive voix ». L’occasion pour Philippe Capon, de lancer un appel : « Le renforcement des effectifs a poussé certains collègues à largement dépasser leurs horaires de travail. Hier, certaines compagnies de CRS ont embauché à 14h pour terminer à 5h du matin. On ne pourra pas continuer à travailler comme ça, il faut que les choses se normalisent ».