VIDEO. Qui est Frank Berton, l'avocat de Salah Abdeslam?
PORTRAIT•L’avocat au barreau de Lille s’est illustré dans des affaires comme Outreau, Florence Cassez ou Dominique Cottrez…H.S et V.V
De l’aveu de ses proches, amis et collègues -souvent les deux à la fois-, sous ses airs un peu bourrus, l’avocat Lillois Frank Berton est un humaniste, un homme « affable ». Arborant son éternelle barbe de trois jours, le ténor du barreau de Lille a annoncé mardi 26 avril qu’il serait en charge de la défense de Salah Abdeslam, suspect clé des attentats du 13 novembre également inculpé en Belgique pour sa participation supposée à la fusillade de Forest, quelques jours avant son arrestation.
« Eclairer les zones d’ombre »
Aux côtés de son collègue belge, Me Sven Mary, et d’un probable troisième avocat français dont le nom n’a pas encore été communiqué, Frank Berton a déclaré sur BFM : « Ce qui m’importe, c’est qu’il ait un procès équitable et qu’il soit condamné pour les choses qu’il a faites et non pour les choses qu’il n’a pas faites ».
Pour Thierry Lazaro, député (LR) du Nord, ami de longue date du pénaliste qui a collaboré avec lui dans le cadre de l’affaire Florence Cassez (2005-2013), le choix de Frank Berton n’a rien d’étonnant : « Je le soupçonnais de vouloir s’engager sur ce dossier. Je ne peux que lui donner raison. Nous sommes dans un Etat de droit, et si Salah Abdeslam est l’horreur incarnée, pour faire éclore et émerger la vérité, il faut une défense et une accusation. Avoir un avocat de l’envergure de Frank, cela va permettre d’éclairer des zones d’ombre ». Rien d’étonnant donc, et un symbole pour le Lillois qui a connu l’une de ses premières « grosses » affaires en assurant la défense d’un des islamistes impliqués dans les attentats de Paris en… 1995.
« Bosseur » et « rigoureux »
A 53 ans, cet avocat né à Amiens, à l’enfance difficile, n’a jamais hésité, tout au long de sa carrière, à s’emparer de dossiers difficiles. Inconnu du grand public au début des années 2000, il fait une entrée remarquée dans la sphère médiatique lors de l’affaire Outreau. Avocat d’Odile Marécaux, acquittée à l’issue du procès, Frank Berton est décrit par ses acolytes du barreau de Lille comme « rigoureux », « bosseur ».
Des qualités inestimables pour Me Hubert Delarue, avocat à Amiens également présent sur le dossier Outreau : « C’est un grand professionnel. D’aucuns moquent sa propension médiatique mais derrière, le travail est au rendez-vous et ce n’est pas forcément le cas de tous ». Egalement père de quatre enfants, l’avocat Berton est régulièrement comparé à l’autre ténor du nord, Eric Dupond-Moretti. Entre les deux, on retrouve « une filiation » assure Hubert Delarue : « Ils font partie de ceux qui ont compris avant d’autres que le procès ne se gagnait pas à la plaidoirie mais pendant le procès, pendant les audiences ». Sa voix caverneuse qui ne souffre ni de micro ni d’envolées sonores a marqué toutes celles et ceux qui l’ont entendu plaider.
Humaniste et bon vivant
Son visage, marqué, et ses sourcils épais souvent froncés dissimulent son goût immodéré pour les « bonnes choses de la vie ». Jean-Luc Roméro, président du comité de soutien de Florence Cassez, française détenue par les autorités mexicaines et défendue par Me Berton, se souvient d’une nuit particulière : « Il bosse comme un taré mais c’est un bon vivant. Je me souviens d’une soirée à Mexico, un avocat mexicain nous avait dégoté un bon restaurant. La soirée a duré des heures. Frank est un homme qui aime les bonnes tables et les beaux endroits ».
Cigarette vissée à la bouche, « il fume un peu trop » déplore son ami député Thierry Lazaro, le pénaliste est un homme entouré. Une bonne chose souligne l’élu : « Il y a chez lui une forme de bonhomie très attachante. Il est très famille et très proche de ses amis. Ce n’est pas quelqu’un d’isolé ou de replié sur lui-même et ça se ressent sur son travail. Il aborde toujours ses affaires de façon humaine ». En acceptant d’assurer la défense d’Abdeslam, ses proches soulignent son courage, à l’instar de Stefan Squillaci, avocat au barreau de Lille et associé de Dupond-Moretti : « C’est sa caractéristique principale. Il accepte les dossiers dans lesquels il y a des coups à prendre et fait partie de ce que j’appelle les 'avocats artistes'. Il a un petit côté canaille et n’a peur de personne ».