EVENEMENTLes Eagles Of Death Metal ont offert du rock et des larmes

VIDEO. Concert des Eagles Of Death Metal: Rock et crise de nerfs à l'Olympia

EVENEMENTTrois mois après l’attentat au Bataclan du 13 novembre, le groupe de rock américain est remonté sur scène à Paris mardi soir pour terminer son concert…
Romain Scotto

Romain Scotto

Il est adossé au mur, tout au fond de la partie basse de l’Olympia. Dans son long caban noir, Matt McJunkins enchaîne les étreintes et les tapes dans le dos. Parfois de longues secondes. Comme s’il retrouvait les membres d’une immense famille, perdue de vue depuis trop longtemps. Trois mois exactement après la tuerie du Bataclan, le bassiste des Eagles Of Death Metal écoute les mots de chacun, pose pour les photos et essaye de sécher les larmes des plus bouleversés. La scène est d’autant plus forte qu’elle se déroule une petite heure avant le début d’un concert aux allures de catharsis générale.



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« Les voir et leur parler, ce n’est pas juste pour leur demander un autographe. C’est vraiment quelque chose de fort, glisse Axel, victime de l’attentat qui s’est fait tatouer l’emblème des EODM sur le biceps droit depuis la tragédie. « Je leur dois ça. J’étais là quand ça s’est passé. On ne l’oubliera jamais. » Comme beaucoup, le jeune homme a un temps hésité avant de se rendre à l’Olympia. Puis l’insistance de ses amis et le sentiment qu’après tout, « il n’y a pas de raison de se stresser vu les moyens de sécurité », l’ont emporté.

« Ce n’est pas facile pour tout le monde de pleurer en public »

Pour les retrouvailles des rockeurs avec leur public parisien, un imposant dispositif avait été déployé. Rues alentour bloquées, fouilles poussées lors de quatre contrôles de sécurité et présence renforcées de policiers. A l’intérieur de la salle, une équipe de 30 psychologues et 10 médecins secouristes étaient également mobilisés. Il fallait bien cela pour rassurer ceux qui en éprouvaient la nécessité. « Ce n’est pas facile pour tout le monde de pleurer en public », glisse Jérôme Bertin de l’Institut national de l’aide aux victimes (Inavem). Selon lui 700 à 800 billets d’entrée du Bataclan ont été réutilisés, sachant que des membres des familles endeuillées ont également été invités.


« Certains ne veulent pas être installés en bas. D’autres demandent à voir les issues de secours. Il y a beaucoup d’interrogations depuis l’ouverture des portes » admet le responsable. Puis à 21h10 sonne le moment le plus intense de la soirée, redouté par certains, attendu par d’autres : L’extinction des lumières et le début d’un concert qu’il faut enfin terminer. L'entrée des musiciens-rescapés s'effectue sur le Paris S'Eveille de Dutronc. Un choix fort et bien calculé pour lancer la soirée. Pour une grande majorité, l’événement correspond parfaitement à l’ode au rock’n’roll espérée. Les pintes de bières tombent par milliers. Les bras restent levés. On se déhanche sans calculer. Mais pour d’autres, l’épreuve se révèle plus compliquée. Au pied de l’escalier du hall d’entrée, près du bar de l’Olympia, les visages sont parfois très marqués.


Des blocages, des pleurs

Juste avant les premiers coups de médiator, une jeune femme reste figée devant les portes battantes de l’entrée. Impossible pour elle d’aller plus loin malgré le réconfort de ses deux amies. Un peu plus tard, une autre, un peu plus âgée, quitte la salle en pleurs, soutenue par son compagnon. « C’est juste que… Je suis désolée. » Les mêmes scènes de trop-plein, d’émotions incontrôlées, s’enchaînent pendant deux heures.


Parfois, au point d’alerter l’équipe médicale mobilisée. « Je n’en peux plus. Je suis en colère. Je vais me casser », soupire une grande brune, aux bords de la crise de nerfs. Elle mettra plusieurs minutes à se calmer et éponger ses sanglots. Devant elle, les portes de la salle ne cessent de s’ouvrir et se fermer au rythme d’un incessant va-et-vient, laissant échapper le son de « Don’t Speak », une chanson phare du groupe. Elle dit notamment ceci : « There’s something happenin' but don’t be scared. » Comprenez : « Il se passe quelque chose mais n’aie pas peur. »