JUSTICEMilitaire poignardé à La Défense: Alexandre Dhaussy passé au crible de l'expertise psychiatrique

Militaire poignardé à La Défense: Alexandre Dhaussy passé au crible de l'expertise psychiatrique

JUSTICELa justice examinait ce jeudi la responsabilité pénale de ce djihadiste revendiqué de 23 ans, poursuivi pour assassinat...
William Molinié

William Molinié

«En d’autres circonstances, on aurait pu être amis. » Depuis son banc, Cédric Cordiez hoche la tête, dépité. De l’autre côté de la salle, dans le box, son agresseur, barbe noire fournie et cheveux bouclés, passe du rire à la colère, de l’empathie à l’absence de regrets en quelques phrases, décousues et bien souvent incohérentes. Les deux heures d’audience durant lesquelles la justice a examiné la personnalité du djihadiste revendiqué Alexandre Dhaussy ont mis en lumière une construction psychique défaillante, alimentée par l’idéologie de Daesh.

L’homme de 24 ans, mis en examen pour avoir poignardé un militaire en patrouille Vigipirate à La Défense (Hauts-de-Seine) le 25 mai 2013, a été convoqué ce jeudi matin par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris qui s’interrogeait sur sa responsabilité pénale. Trois experts-psychiatres ont tenté d’éclairer les juges sur la personnalité du mis en examen : avait-il toute sa tête lors du passage à l’acte ?



Bataille d’experts

Deux d’entre eux concluent à l’abolition du discernement, ce qui exclurait toute responsabilité pénale. « Il était dans un état hypomaniaque, un état neurologique qui abolit le discernement », fait valoir l’un d’entre eux. Il est appuyé ensuite par un confrère, relevant le « chaos » qui habite le mis en examen : « Les psychotiques se saisissent de l’air du temps, des médias, de la géopolitique pour alimenter leurs délires. » Autrefois, ils endossaient le costume de révolutionnaires ou d’anarchistes, « aujourd’hui ils sont djihadistes », ajoute-t-il.

Une troisième experte apporte toutefois une nuance. Selon elle, « on ne peut pas nier qu’il garde une vie ancrée dans la réalité ». Et de citer l’achat d’un couteau pour agresser le militaire, preuve de la préméditation, ou les motivations djihadistes qui appartiennent au réel. La psychiatre conclut à l’altération du discernement ce qui, si la cour retenait cette hypothèse, pourrait ouvrir la tenue d’un procès aux assises.

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Délibéré le 5 novembre

Face à ces exposés techniques, Alexandre Dhaussy s’agace à plusieurs reprises depuis son box. Et explose lorsque l’avocate générale demande à la cour de le déclarer irresponsable pénalement et de l’interner en hôpital psychiatrique. « Vous ne me connaissez pas. Ça ne va pas se passer correctement. Je vois que vous n’avez que des certitudes », interrompt-il avant de se faire rappeler à l’ordre par le président et de se confondre en excuses.

Philippe Lecoyer, l’avocat de la victime, ne se fait pas d’illusion. « Malheureusement, il n’y aura pas de procès », concède-t-il, reconnaissant lui aussi pencher « plutôt » pour la thèse de l’abolition. Pour l’avocat du mis en examen, Me Adrien Mamère, « sa main a été conduite par la folie ». « Son état mental dégradé, sa maladie, l’ont fait passer à l’acte », plaide-t-il. La prison ou l’asile ? La justice tranchera le 5 novembre prochain.