TRAVAILLa controverse autour de l'égalité professionnelle en cinq points

La controverse autour de l'égalité professionnelle en cinq points

TRAVAILUne disposition du projet de loi du ministre du Travail est dénoncée par de nombreuses associations comme un recul pour les droits des femmes…
Oihana Gabriel

Oihana Gabriel

Un article polémique. Ce lundi, plusieurs associations ont lancé une campagne contre une disposition du projet de loi sur le dialogue social et l'emploi de François Rebsamen qui risque selon elles de faire reculer l’égalité hommes-femmes.

Reforme du dialogue social: ce que dit le projet de loi

La cause de la colère

Cette réforme du droit du travail qui vise à alléger la tâche des entreprises doit être présentée fin mai à l’Assemblée. Mais une disposition a fait bondir de nombreux féministes et certains politiques: la suppression du «rapport de situation comparée». Sous ce sigle barbare (RSC), se cache un baromètre de l’égalité entre hommes et femmes sur tous les plans salaires, formation, évolution de carrière… Or sans cet outil, impossible de mesurer les progrès… ou retard et donc d’imposer des sanctions. «C’est comme si on demandait à un médecin de soigner sans diagnostic», résume Claire Serre-Combe, porte-parole d’Osez le féminisme. Autre grief: il n’y aura plus un temps des négociations dédié à cet objectif d’égalité hommes-femmes, mais des discussions plus globales sur la qualité de vie au travail.

Les outils de la mobilisation

Le projet de loi Rebsamen supprime «l'obligation d'établir un diagnostic de l'égalité dans l'entreprise (Rapport de Situation Comparée), de négocier sur cette question et pire, rend les sanctions pour les entreprises qui ne respectent pas l'égalité professionnelle… impossibles à appliquer!», résume Yvette Roudy, ministre socialiste des Droits de la Femme entre 1981 et 1986, dans une pétition mise en ligne sur change.org (environ 12.000 soutiens lundi après-midi),

Les initiatrices de la campagne ont également prévu d’interpeller François Rebsamen et Marisol Touraine sur les réseaux sociaux. Et elles ont lancé une plateforme didactique expliquant l’importance du combat pour l’égalité hommes-femmes.

Quelles sont les prochaines étapes?

Ce lundi vers 15h, la secrétaire d’Etat Pascale Boistard chargée des Droits des femmes se rendait au conseil supérieur de l’égalité professionnel, qui doit rendre son avis. Une opinion déjà connue puisque ses membres ont unanimement dénoncé ce projet de loi dans un rapport. Et si le texte poursuit sa route, les diverses associations espèrent peser pendant le travail parlementaire. Certains députés comme Cécile Duflot (EELV) ont déjà manifesté leur soutien.

« Comme dirait Yvette Roudy "on dirait un canular" triste mais donc nécessaire de signer la pétition sur http://t.co/n1lkqwV4Nn — Cécile Duflot (@CecileDuflot) May 11, 2015 »

Recul contradictoire

Cette réforme pose d’autant plus de questions que le gouvernement Valls 1 avait renforcé avec la loi du 4 août 2014 les sanctions envers les entreprises qui ne respectaient pas les objectifs en matière d’égalité professionnelle. Dès lundi matin, le gouvernement semblait gêné par la controverse. Le secrétaire d'Etat à la simplification Thierry Mandon a en effet esquissé un pas en arrière: «si c'est le cas, j'imagine que les parlementaires vont corriger cela, car je ne vois pas une seconde que ce soit l'intention de François Rebsamen».

«On constate que depuis que le ministère de plein exercice des Droits des Femmes a été rétrogradé en secrétariat d’Etat, c’est la dégringolade, tranche Claire Serre-Combe. Le travail de veille pour que les politiques publiques ne soient pas discriminantes pour les femmes n’existe plus. Nous sommes dans un contexte d’austérité et de gages aux entreprises mais cela ne peut se faire sur le dos des femmes!»

La réponse des ministres

«Avec plus de 10.000 signatures de la pétition en quelques heures, le gouvernement ne peut pas rester sourd», soulignait Claire Serre-Combe d’Osez le féminisme lundi midi. Les associations ont visiblement été entendues. Ce lundi après-midi, François Rebsamen et Marisol Touraine ont changé de discours: ils ont rassuré les associations via un communiqué: non le RSC ne disparaîtra pas. «Pour répondre aux inquiétudes qui se sont exprimées, le gouvernement en lien avec les parlementaires proposera un amendement précisant que la base de données unique comprendra obligatoirement une rubrique spécifique à l’analyse de situation comparée des femmes et des hommes. Le contenu du RSC tel qu’il est défini par la loi du 4 août 2014 et donc toutes les données du RSC seront intégralement mentionnées dans la loi.»