VIDEO. Grève à Air France: «Le gouvernement est manifestement prêt à sacrifier le PDG du groupe»
SOCIAL•Dominique Andolfatto, professeur de science politique, analyse les derniers rebondissements dans le conflit autour du projet Transavia du groupe Air France...Propos recueillis par Nicolas Beunaiche
Les pilotes vont-ils réussir leur atterrissage? Si la perspective de voir les syndicats obtenir satisfaction auprès de la direction d’Air France, avec qui ils sont en conflit à cause du projet de compagnie low-cost Transavia, semblait encore très lointaine ces derniers jours, les dernières déclarations peuvent leur faire espérer une issue positive. Dominique Andolfatto, professeur de science politique à l’université de Bourgogne, analyse la situation à la lumière des derniers événements, et notamment le couac ministériel de ce mercredi.
Alain Vidalies a annoncé dans la matinée l’abandon du projet Transavia Europe, avant d’être démenti par la direction d’Air France. Comment analysez-vous ce couac?
Pour la direction, ce projet est manifestement un axe stratégique majeur. La compagnie est confrontée à une très forte concurrence du low cost en Europe et, pour les longs courriers, des compagnies nord-américaines ou du Golfe. Air France est donc aujourd’hui comme étranglée. Le ministre, nouveau dans ses fonctions, paraît avoir une vision assez floue de cette situation et intervient brutalement dans le dossier. On ne peut que se demander pourquoi tout cela n’a pas été mieux géré en amont. Cela donne l’impression de cloisonnements très problématiques pour l’avenir de l’aérien français.
A quel jeu joue le gouvernement dans ce conflit?
Il ne joue pas, il est inquiet. La marque Air France paraît de plus en plus menacée. Outre la quinzaine de millions d’euros que la compagnie perd chaque jour en raison de la grève, il est probable qu’elle va perdre la confiance d’une partie de la clientèle qui lui était encore fidèle. Manifestement, le secrétaire d’Etat est prêt à sacrifier le PDG du groupe pour donner satisfaction aux revendications étroitement corporatives des pilotes qui bloquent toute évolution. Cela permettra-t-il à terme de sauver Air France?
Face aux cheminots, en juin, le gouvernement avait pourtant tenu bon. Son attitude varie-t-elle en fonction des grévistes?
Le ministre a changé [Alain Vidalies a remplacé Frédéric Cuvillier en août]. Il n’a manifestement pas le même savoir-faire. Et la situation d’Air France est sans doute beaucoup plus dramatique que celle de la SNCF. Au fond, même si les gouvernements parlent régulièrement de démocratie et de dialogue social (il y a même un ministre pour cela), ce dialogue n’a pas de réalité. Dans les entreprises publiques ou semi-publiques qui, pourtant, devraient montrer l’exemple, seul le rapport de force compte.