POLITIQUEDéfenseur des droits: Jacques Toubon marque des points devant des députés PS résignés

Défenseur des droits: Jacques Toubon marque des points devant des députés PS résignés

POLITIQUESa nomination devrait être confirmée la semaine prochaine...
20 Minutes avec AFP

20 Minutes avec AFP

L'ancien ministre chiraquien Jacques Toubon, que François Hollande veut nommer Défenseur des droits, s'est employé mercredi à démonter les «caricatures» contre lui, devant des députés parfois convaincus à gauche par ses propos et résignés à sa nomination.

Jacques Toubon, 73 ans, qui doit succéder au centriste Dominique Baudis décédé en avril, passait son grand oral devant la commission des Lois de l'Assemblée, où de nombreux socialistes lui sont hostiles, une pétition revendiquant 95.000 signatures ayant même été lancée contre sa nomination.

Cependant il est peu probable que sa désignation soit l'objet d'un veto parlementaire, qui, aux termes de la Constitution, nécessite trois cinquièmes des suffrages exprimés parmi les commissions des Lois de l'Assemblée et du Sénat. Le résultat de ces votes sera connu le 9 juillet, juste après son audition au Sénat.

Un erreur, avoir laissé des anti-avortements être amnistiés

Ancien ministre de la Culture du gouvernement Balladur (1993-1995), puis garde des Sceaux du gouvernement Juppé (1995-1997), l'ex-maire du XIIIe arrondissement de Paris a été une figure du RPR des années 1980 et 1990. «Je ne suis pas l'homme que certains disent» et les critiques sur des positions d'«il y a plus de vingt ou trente ans» relèvent d'un «anachronisme intellectuel», a d'emblée lancé Jacques Toubon aux députés venus en nombre. Il s'est dit notamment «abolitionniste de raison et de coeur», alors que lui est reproché son vote, lorsqu'il était député RPR, en 1981 contre la loi abolissant la peine de mort - il avait voté l'article central mais pas l'ensemble car il aurait voulu une peine de remplacement.

Il a souvent justifié d'autres votes polémiques, contre la dépénalisation de l'homosexualité ou la loi Gayssot de 1990 réprimant le négationnisme, par des prises de position «politiques» ou des arguments «juridiques et techniques».

Jacques Toubon n'a reconnu qu'une «erreur», n'avoir pas exclu de l'amnistie en 1995 les personnes condamnées pour des «commandos anti-avortement». En tant que garde des Sceaux, «il paraît que mon rôle se serait borné à envoyer un hélicoptère dans l'Himalaya», pour retrouver un magistrat en vacances, afin d'éviter l'ouverture d'une information judiciaire contre Xavière Tiberi, a ironisé Jacques Toubon.

Pas le «Défenseur des droits bisounours»

Cela «occulte le fait que place Vendôme, j'ai fait avancer les droits», a-t-il affirmé, citant ses actions en faveur d'un second degré de justice criminelle ou du bracelet électronique comme substitut aux fins de peine.

En tant que Défenseur des droits, fonction clé créée par la réforme constitutionnelle de 2008, il voudrait faire «la guerre à l'injustice, injustice ressentie, injustice subie, qui naît de l'inégalité et qui ne peut être vaincue que par une réelle égalité des droits».

Face aux questions nombreuses des députés de tout bord, Jacques Toubon a été amené à se prononcer «pour le droit de vote des étrangers aux élections locales» et pour que le «pouvoir politique» se saisisse du sujet des enfants nés d'une mère porteuse à l'étranger et non reconnus en France, afin de leur donner «un statut». «Je suis hostile à la gestation pour autrui», a-t-il néanmoins déclaré.

Il a assuré en conclusion qu'il ne serait pas un «Défenseur des droits bisounours», n'ayant «pas à faire consensus».

Un «animal politique»

Plusieurs députés de gauche se sont dits presque convaincus par son intervention, «vibrant coming out» pour Colette Capdevielle (PS), assorti d'un «sens du punch et de la contre-attaque», selon Alain Tourret (radicaux de gauche). Certains y ont même vu des propos dérangeants pour les députés de droite, «au risque de perdre (leur) assentiment», a glissé Philippe Doucet (PS).

D'autres ont salué «l'animal politique» et attendent qu'il convainque comme Défenseur des droits, «puisque vous assumerez la fonction dès la semaine prochaine», lui a glissé Sergio Coronado (EELV).

Le patron des députés socialistes, Bruno Le Roux, selon qui initialement M. Toubon passait «mal», a appelé son groupe à ne pas «uniquement regarder le rétroviseur» et à se prononcer aussi «sur une proposition du président de la République». Gare «au sectarisme» à gauche, avait averti dès mi-juin le Premier ministre Manuel Valls. Précédemment, la commission des Lois avait entendu Adeline Hazan, ancienne maire (PS) de Reims, pressentie pour succéder à Jean-Marie Delarue comme contrôleure générale des lieux de privation de libertés.